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Le compositeur Van Cao (1923-1995). |
Van Cao n’était pas uniquement un compositeur, connu comme l’auteur de l’hymne national du Vietnam - Tiên quân ca (La chanson du soldat), qui est l’un des symboles de la fierté nationale. Il était aussi peintre et poète qui a créé des œuvres profondément philosophiques et empreintes d’humanisme.
L’artiste polymathe a composé des centaines d’œuvres qui tournent autour de deux thèmes majeurs : l’amour et l’héroïsme. Dans un écrit sur le compositeur Van Cao à sa disparition en 1995, le Général Vo Nguyên Giáp (1911-2013) déclara : “Nous regrettons profondément ce talentueux artiste hors pair. Ses œuvres, en particulier l’hymne national, les chants épiques et lyriques, vivront à jamais avec le temps, avec la nation, comme un point lumineux de l’art vietnamien”.
Sa grande contribution a été honorée par de nobles distinctions, dont l’Ordre Hô Chi Minh, l’Ordre de la Résistance de première classe, l’Ordre de l’Indépendance de première classe, ainsi que le Prix Hô Chi Minh dans le domaine des lettres et des arts en 1996.
Faisant partie de la génération de musiciens pionniers, Van Cao a composé des chansons romantiques très célèbres comme Bên xuân (L’Embarcadère du printemps), Suôi mo (Le Ruisseau du rêve), Thiên Thai (Le Paradis), Truong Chi… qui ont laissé une empreinte indélébile dans l’histoire de la musique vietnamienne.
Le nom complet de l’auteur de l’hymne national du Vietnam est Nguyên Van Cao, né le 15 novembre 1923 à Lach Tray, dans la ville de Hai Phong (Nord). Il est issu d’une famille de fonctionnaires, son père étant directeur d’une usine à Hai Phong.
Enfant, Van Cao étudia à l’École primaire de Bonnal qui était à l’époque l’établissement le plus prestigieux de Hai Phong. Par la suite, entre 1939 et 1940, il poursuivit ses études à l’École des frères Saint Joseph, où il commença à étudier la musique.
En 1941, en raison des difficultés économiques de sa famille, Van Cao abandonna ses études après avoir terminé sa deuxième année de lycée.
Le 13 août 1945, le Président Hô Chi Minh officialisa Tiên quân ca comme l’hymne national de la République démocratique du Vietnam. |
Photo : VNA/CVN |
Première chanson écrite à 16 ans
Vers la fin des années 1930, la nouvelle musique vietnamienne vit le jour. À Hai Phong, de nombreux compositeurs pionniers tels que Ðinh Nhu, Lê Thuong, Hoàng Quý étaient actifs à cette époque. Van Cao joignit donc le groupe Ðông Vong (l’un des groupes ayant une grande influence sur la musique révolutionnaire du Vietnam) dirigé par Hoàng Quý, où il collabora avec d’autres musiciens tels que Tô Vu, Canh Thân, Ðô Nhuân, etc. C’est ainsi qu’il amorça sa carrière dans la composition musicale. En 1939, il écrivit sa première chanson, Buôn tàn thu (Lamentation d’automne qui s’estompe), à l’âge de seulement 16 ans.
En 1942, Van Cao quitta Hai Phong pour s’installer à Hanoï. Il loua une petite chambre au 171 rue Mongrant (actuellement 45 rue Nguyên Thuong Hiên) et s’inscrivit à l’École des beaux-arts d’Indochine.
En 1943-1944, il participa à deux reprises au Salon unique organisé par Khai Trí Tiên Ðuc (Association pour la formation intellectuelle et morale des Annamites - AFIMA) à Hanoï, où il présenta ses peintures à l’huile : Cô gái dây thì (Jeune fille nubile), Sám hôi (Pénitence), Nua đêm (Minuit). L’œuvre Le Bal aux suicidés retint particulièrement l’attention et suscita des réactions élogieuses au sein de l’opinion publique.
En hiver 1944, Van Cao retrouva une vieille connaissance, Vu Quý, un cadre du Viêt Minh (Front pour l’indépendance du Viet-nam). Vu Quý l’encouragea à composer des chansons patriotiques, d’où la naissance de Ðông Ða et Thang Long hành khúc ca (Marche de Thang Long). Il le persuada également de se joindre au Viêt Minh, avec pour première tâche de composer un chant de marche pour l’armée révolutionnaire.
Les paroles et la partition de Tiên quân ca. |
Photo : LD/CVN |
L’écho de l’histoire
La même année, Van Cao, âgé alors de 21 ans, écrivit Tiên quân ca. Dans ses mémoires intitulés “Pourquoi j’ai écrit +Tiên quân ca+”, il partagea : “La chanson a été composée dans un laps de temps incalculable, dans une pièce exiguë au 45 rue Nguyên Thuong Hiên, près d’une fenêtre donnant sur une maison à deux étages, des rangées d’arbres et un ciel gris. Ici, on entendait souvent les échos de chars à bœufs transportant des cadavres de gens mourant de faim vers la rue Khâm Thiên. Ici, je dormais mal la nuit en raison du vent qui se glissait à travers des fentes de la porte, des disputes conjugales de la famille d’un fonctionnaire pauvre. C’est ici que je comprenais plus d’histoires de vie...”.
En novembre 1944, Van Cao a écrit lui-même Tiên quân ca sur une pierre lithographique d’impression pour une première publication dans la rubrique “Van nghê” (Lettres et arts) du journal Ðôc lâp (Indépendance). “Un mois après la parution du journal, alors que je revenais de l’imprimerie, par une petite rue (aujourd’hui rue Mai Hac Ðê), j’ai soudain entendu le son d’une mandoline provenant d’une maison à l’étage. Quelqu’un s’entraînait à chanter +Tiên quân ca+. Je me suis arrêté, profondément ému. Cette émotion m’a submergé bien plus que lors de la représentation de toutes mes œuvres précédentes aux théâtres…”. Voici quelques extraits tirés du manuscrit du talentueux compositeur relatant l’histoire de la genèse de sa chanson.
Le 13 août 1945, le Président Hô Chi Minh officialisa Tiên quân ca comme l’hymne national de la République démocratique du Vietnam.
Le 19 août 1945, lors d’un grand meeting sur la place de l’Opéra, le chœur de l’Union des jeunes pionniers l’interpréta pour saluer le drapeau rouge à l’étoile jaune.
L’hymne national fait toujours vibrer le cœur de tous les Vietnamiens où qu’ils vivent. |
Photo : VNA/CVN |
Le 2 septembre 1945, la chanson fut officiellement jouée sur la place Ba Ðình, à Hanoï, lors de la cérémonie de déclaration d’indépendance donnant naissance à la République démocratique du Vietnam, le premier État ouvrier-paysan d’Asie du Sud-Est.
En 1946, l’Assemblée nationale de la première législature choisit Tiên quân ca comme hymne national. Dans la première Constitution du Vietnam, l’Article 3 stipule clairement : “L’hymne national est la chanson +Tiên quân ca+”.
Pendant les 78 années qui se sont écoulées depuis que le Vietnam a reconquis son indépendance en 1945, le drapeau national, l’hymne national et l’emblème national - témoins et trésors de l’histoire - ont accompagné le difficile et glorieux chemin de la nation.
L’hymne national porte en lui l’âme sacrée des fleuves et monts du pays. Il est le reflet de l’histoire et un appel à avancer. Tiên quân ca a résonné et continuera à résonner éternellement dans le cœur des Vietnamiens, portant la voix souveraine dans tous les moments importants de l’histoire de la nation.
Le père des épopées
Après la Révolution d’Août 1945, Van Cao travailla en tant que journaliste et illustrateur pour le journal Lao Ðông (Travail). Pendant cette période, il continua de composer de nombreuses autres chansons célèbres, telles que Làng tôi (Mon village) en 1947, Ngày mùa (Époque des moissons) en 1948, Tiên vê Hà Nôi (Retourner à Hanoï) en 1949, et surtout Truong ca sông Lô (La chanson de la rivière Lô) en 1947, pour célébrer la victoire sur l’armée française, qui fut qualifiée d’“œuvre magistrale... qui n’est inférieure à aucune œuvre musicale classique occidentale...”. Elle représente le sommet de la musique vietnamienne. En particulier, elle est considérée comme l’apogée de la musique de résistance et de la nouvelle musique vietnamienne en général. Van Cao est souvent désigné comme “le père” des épopées vietnamiennes.
Le compositeur Van Cao (centre) entouré de sa famille. |
Photo : CTV/CVN |
Par la suite, il composa des chansons en l’honneur du Président Hô Chi Minh, des travailleurs, de la police, de la marine et de l’armée de l’air. L’une de ses œuvres les plus remarquables est Mùa xuân đâu tiên (Le premier printemps). Écrite à l’approche du Nouvel An lunaire 1976 et marquant le premier printemps après la réunification du pays, elle est devenue l’une des chansons les plus célèbres sur le thème du printemps.
Selon le musicien Cát Vân, sa mélodie et ses paroles sont toutes deux très douces, évoquant une image rurale paisible qui résonne auprès de nombreux Vietnamiens. Il s’est rappelé : “Lorsque le pays a été réunifié, Van Cao pensa que c’était le véritable printemps du Vietnam. C’est une chanson simple aux paroles profondes et sincères. Parmi toutes ses œuvres, +Le premier printemps+ dégage une vitalité particulièrement puissante”.
On peut affirmer que Van Cao fut un artiste polymathe, doué à la fois pour la musique, la poésie et la peinture. Cependant, il est surtout connu en tant que compositeur extrêmement talentueux, qui a marqué à tout jamais l’histoire de la musique du Vietnam.
Thúy Hà - Hoàng Hoa/CVN