>>La Tro Xuân Pha, patrimoine culturel immatériel national
"Lôt ran", une ancienne danse rituelle, est préservée dans le village de Truong Lâm depuis des siècles. |
Photo: My An/CVN |
Semblable à de nombreux villages du Nord caractérisés par un style traditionnel, celui de Truong Lâm est niché sur les rives paisibles de Thiên Duc, ancien nom de la rivière Duông, dans le quartier de Viêt Hung, arrondissement de Long Biên, Hanoï. Il s’agit d’un site riche d’une histoire de plusieurs siècles aux nombreux us et costumes, dont des vestiges culturels conservés jusqu’à ce jour.
Tous les ans, au 2e mois lunaire, les habitants affluent au complexe maison commune - pagode de Truong Lâm pour assister à la fête villageoise et contempler la danse du serpent ou Lôt ran, une ancienne danse rituelle transmise de génération en génération depuis des siècles.
Danse rituelle
Il est rare qu’un endroit ait su conserver presque intégralement une danse traditionnelle comme en témoigne celle de Viêt Hung. Ce quartier compte deux patrimoines culturels immatériels nationaux reconnus, à savoir la fête villageoise de Lê Mât avec sa danse Giảo long (danse signifiant le combat avec le serpent) et celle de Truong Lâm avec Lôt ran. Cette dernière met en lumière Bach xà (Serpent blanc), l’incarnation de Linh Lang Dai Vuong (grand prince Linh Lang), qui mue trois fois pour devenir un génie. Il s’agit du rituel le plus significatif de la fête villageoise de Truong Lâm qui se tient annuellement du 9e jour au 11e jour du 2e mois lunaire.
Aujourd’hui encore, les personnes âgées du village continuent de raconter à leurs descendants l’histoire mythique du grand prince Linh Lang liée à la maison commune de Truong Lâm...
Selon la légende, le roi Lý Thánh Tông (1023-1072) et sa 9e concubine, Hao Nuong, eurent un fils appelé Hoàng Lang. Dès sa plus tendre enfance, le prince témoigna d’une grande intelligence. En grandissant, il combattit l’ennemi aux côtés de son père. Le roi eut l’intention de lui transmettre la couronne mais Hoàng Lang refusa. Il lui expliqua alors qu’il était en réalité le fils de Long Vuong (Roi des eaux) dont le rôle sur terre était d’aider le peuple à lutter contre les ennemis. Hoàng Lang se transforma ensuite en serpent blanc et disparut dans les eaux du lac de l’Ouest le 10e jour du 2e mois de l’année du serpent 1077.
Mais les habitants croient que Hoàng Lang est immortel et qu’il devint alors un génie. Par la suite, de nombreux temples furent construits pour lui rendre hommage. La danse Lôt ran a été créée par les villageois de Truong Lâm pour retracer l’histoire de Hoàng Lang et sa transformation d’humain en déité. Parmi les nombreux rites de la fête traditionnelle du village, cette danse est la plus impressionnante dans l’expression du respect et de la vénération des habitants envers les génies et les ancêtres.
Selon Âu Xuân Kiên, chef du sous-comité de gestion des vestiges de Truong Lâm, la danse du serpent et la fête du village existent depuis le XVe siècle, parallèlement à la création de sa maison commune. De sept à neuf jeunes hommes non mariés sont choisis, chacun chargé d’un segment du corps du serpent. La tête et la queue sont confectionnées à partir de papiers votifs qui seront brûlés après la danse. Une personne se coiffe de la tête, une autre porte la queue sur son dos, tandis que les sept danseurs restants se vêtissent de blanc et se déplacent pour représenter les mouvements du serpent. Indispensable au spectacle, un musicien, tambour à la main, donne la cadence, rythme le récit et chante en même temps.
Selon le Docteur en archéologie Bùi Thê Quân, chef adjoint du Bureau de la culture et de l’information de l’arrondissement de Long Biên, l’image du serpent blanc au long corps rampant symbolise les désirs de la population en matière de régularisation des eaux pour avoir de bonnes récoltes et une vie prospère. La danse Lôt ran à la maison commune de Truong Lâm, fruit de la combinaison entre légende et rite communautaire, manifeste le souhait des habitants de lutter contre les catastrophes naturelles.
Trésor patrimonial et culturel
Danse "Lôt ran" devant la maison commune de Truong Lâm. |
Photo: Doàn Hoa/CVN |
Malgré les vicissitudes histori-ques, le village de Truong Lâm a su conserver non seulement l’intégralité de sa danse traditionnelle mais aussi protéger efficacement ses vestiges. Au fil des siècles, sa maison commune a été restaurée et embellie à plusieurs reprises. C’est grâce aux efforts des autorités locales et des habitants eux-mêmes que cette dimension culturelle a pu être soigneusement préservée.
Sur le même site, se trouve aussi la pagode de Truong Lâm qui pourrait avoir été construite sous la dynastie des Lý (XIe-XIIIe siècles). Elle est également considérée depuis longtemps comme un site religieux important pour les habitants du village, du quartier de Viêt Hung en particulier. La pagode préserve plusieurs objets de valeur, une cloche en bronze et une statue Amitabha (A Di Dà) notamment, qui contribuent à enrichir le trésor patrimonial et culturel du village.
Le complexe maison commune - pagode de Truong Lâm a également fait la fierté des villageois en accueillant l’Oncle Hô le 18 février 1958 à l’occasion du Têt traditionnel. Il y adressa ses meilleurs vœux, appelant les habitants à renforcer leur solidarité et leurs efforts pour l’édification d’un pays riche et puissant.
Grâce à ses valeurs, ce site a été reconnu en 1992 vestige historique et culturel national par le ministère de la Culture et de l’Information (aujourd’hui ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme).