Trop de déchet dans l’envoi des travailleurs à l’étranger
Cinq ans après sa mise en œuvre, force est de constater que les résultats du projet «Aider les districts démunis à accélérer l’envoi de travailleurs à l’étranger dans l’objectif de réduire le taux de pauvreté» ne sont pas à la hauteur des espérances. Bilan et explications.
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Photo : Anh Tuân/VNA/CVN |
Si l’intention, au départ, est bonne, les objectifs sont loin d’être atteints. En cause : le fait que les habitants des districts démunis eux-mêmes ne s’intéressent pas au projet, ce pour diverses raisons comme les us et coutumes, les «à priori», les qualifications et compétences requises, les problèmes de santé, etc.
En 2010, Luong Thi Nguyêt, domiciliée dans la commune de Thach Kiêt, district de Tân Son, province de Phu Tho (Nord), a suivi un cours d’apprentissage et des leçons d’anglais pendant trois mois dans l’optique de partir travailler en Malaisie. Elle a bénéficié d’un prêt à taux d’intérêt préférentiel délivré par la Banque de politiques sociales pour pouvoir concrétiser son projet. Pourtant, alors que les formalités étaient accomplies, elle a brusquement fait volte-face, sur ordre de son mari : «Je veux toujours travailler à l’étranger dans l’espoir de sortir de la pauvreté. Mais c’est impossible, car mon mari s’y oppose», se désole Mme Nguyêt.
Des désistements en pagaille
Cette dame n’est pas un cas isolé, loin s’en faut, dans les districts les plus démunis, bénéficiaires du projet. «Nous, les paysans, rencontrons beaucoup de difficultés dans l’étude des langues étrangères. De plus, ces cours sont la plupart du temps organisés à Hanoi, très loin de chez nous. C’est pourquoi, de nombreuses personnes se sont retirées du projet», argumente Dô Van Luong, domicilié dans la province de Yên Bai (Nord).
Selon un représentant du Service du travail, des invalides de guerre et des affaires sociales de la province de Phu Tho : «Si l’on veut organiser des cours de formation efficaces, nous devons renforcer les activités de mobilisation, d’orientation et de communication auprès des habitants. Aujourd’hui, nous constatons un taux de désistement allant jusqu’à 90% dans certains cas ce qui, convenons-en, n’est pas normal».
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Une foire d'emplois à Hô Chi Minh-Ville. Photo : An Hiêu/VNA/CVN |
Dans le prolongement de cette idée, Nguyên Quang Huy, directeur adjoint du Service du travail, des invalides de guerre et des affaires sociales de la province de Thanh Hoa (Centre), pointe du doigt le peu d’intérêt que portent les habitants des districts pauvres vis-à-vis de ce projet. Les chiffres parlent d’eux-mêmes, la province n’envoyant qu’une grosse centaine de travailleurs à l’étranger chaque année. Pire encore, plusieurs districts ciblés comme Muong Lat, Quang Hoa, Quan Son, n’en font parvenir aucun certaines années. «En dehors du manque d’envie, leur niveau de qualifications ne satisfait pas les critères des marchés étrangers à haut revenu. De plus, plusieurs travailleurs souffrent de problèmes de santé et sont d’office mis de côté», informe M. Huy.
D’après un représentant de la société Simco Sông Dà, spécialisée dans l’envoi des travailleurs à l’étranger, le nombre de partants a diminué de moitié en 2014 par rapport à 2013, principalement en raison des abandons massifs des candidats. Des désengagements qui agacent les entreprises en question, puisque dans le processus de recrutement et de formation, ce sont elles qui avancent tous les frais de déplacement, de logement..., des travailleurs vivant dans les districts pauvres. Si le Département de gestion des travailleurs à l’étranger rembourse la facture, il le fait uniquement pour les partants, ce qui représente parfois à peine 20% des inscrits. «Les politiques d’assistance aux entreprises doivent être revues pour renforcer l’envoi des travailleurs des districts pauvres à l’étranger et éviter d’essuyer des pertes parfois importantes», affirme ce représentant.
En outre, le recrutement dans les districts démunis se heurte au problème des qualifications professionnelles, auquel vient se greffer la complexité des formalités pour obtenir un prêt à taux préférentiel.
Miser sur l’aspect qualitatif
Hoàng Kim Ngoc, chef adjointe du Département de gestion des travailleurs à l’étranger, explique que la première difficulté concerne la santé des candidats. Dans certaines localités, de 40% à 50% du personnel recruté ne répond pas aux demandes des pays d’accueil. Vient ensuite la formation. Pour le marché japonais par exemple, chaque formation dure jusqu’à huit mois. Or, des enquêtes montrent que jusqu’à 60% des candidats ne parviennent pas à suivre six heures continues d’études chaque jour. Ce qui, sur le papier, n’a rien d’insurmontable pourtant...
Si, d’après Hoàng Kim Ngoc, les entreprises et organismes de gestion ont l’intention de réunir un maximum de conditions propices aux travailleurs désireux de partir à l’étranger, il est hors de question de faire n’importe quoi en faisant en sorte de les envoyer coûte que coûte. Le Département de gestion des travailleurs à l’étranger, en collaboration avec les entreprises locales, renforceront les critères de recrutement et la formation pour limiter les désistements.
Pour Nguyên Trong Dàm, vice-ministre du Travail, des Invalides de guerre et des Affaires sociales : «Le renforcement de l’envoi des travailleurs des districts démunis à l’étranger est une orientation pertinente. Le Département de gestion des travailleur à l’étranger doit appliquer des politiques d’assistance aux entreprises». Pour éviter les déconvenues actuelles, profitables à personne.
Huong Linh/CVN