Trois écrivains français amis du jeune Hô Chi Minh

L’homme de cultures Huu Ngoc nous présente trois écrivains français amis du jeune Hô Chi Minh pendant ses années de vie en France, entre 1917 et 1923.

En 1884, le traité Patenôtre consacre la fin de l’indépendance du Vietnam.

Vingt-sept ans après, en 1911, Nguyên Tât Thành, le futur Hô Chi Minh, âgé de 21 ans, quitte le port de Saigon pour «aller dans le monde à la recherche d’un moyen de salut national». C’est l’Occident qui le tente.

À l’encontre d’autres éminents leaders révolutionnaires d’Asie, tels Mao Zedong, il s’est formé et a fait ses armes politiques en Occident. De là sa rare ouverture d’esprit.

La France, 1re destination de Nguyên le Patriote

C’est la France qu’il choisit comme première destination. Après avoir erré dans de nombreux pays du monde, il vit de 1917 jusqu’au deuxième semestre de 1923 en France sous le nouveau nom de Nguyên Ai Quôc (Nguyên le Patriote). Ce long séjour fait d’activités politiques et sociales bouillonnantes a fortement marqué sa personnalité. Même intellectuellement et psychologiquement.

La maison au 9, impasse Compoint, dans le 17e arrondissement à Paris, où Nguyên le Patriote a vécu entre 1921 et 1923. Photo : Archives/VNA/CVN

À tel point que, Edmond Michelet, ministre chargé de recevoir Hô Chi Minh à Paris, le qualifiera de «très français». L’historien japonais Tsuboï soutiendra que malgré son choix marxiste, Hô Chi Minh est un républicain inspiré par l’idéal de la Révolution de 1789.

En France, le jeune militant Nguyên le Patriote fait du journalisme, écrit des pamphlets et lit beaucoup, en particulier Hugo, Zola, Anatole France, Colette… Il s’est lié à plusieurs écrivains de gauche dont Henri Barbusse, Romain Rolland et Paul Vaillant-Couturier.

De gauche à droite, Romain Rolland, Paul Vaillant-Couturier et Henri Barbusse. Photo : CTV/CVN

Influence de Gandhi sur le jeune patriote

Barbusse et Rolland parrainent le Paria dont Nguyên Ai Quôc assume la direction et la rédaction. Ils prêtent au journal les locaux du groupe Clarté qu’ils dirigent.

Barbusse est plus âgé que son protégé vietnamien de 17 ans. Plus d’une dizaine d’années après son départ de Paris, Nguyên le Patriote a rencontré Barbusse en Union soviétique dans des circonstances fort tristes. L’écrivain français visite le pays de Lénine et est terrassé par une grave et brusque maladie. Nguyên le Patriote en villégiature au bord de la mer Noire revient en hâte à Moscou pour le voir, déjà agonisant. Pour les vieilles générations de lecteurs vietnamiens francophones, le Feu (1916) de Barbusse reste un chef d’oeuvre anti-guerre inoubliable. Ce «Journal d’une escouade» d’un réalisme cru et cruel est un témoignage direct de la guerre de tranchées avec les misères quotidiennes des poilus. Loin des fresques chantant le patriotisme et l’aventure héroïques, il montre l’absurdité de la guerre. Au Vietnam, en 1991 a paru Nôi buôn chiên tranh (Le chagrin des la guerre) de Bao Ninh, assez proche de cette veine, mais relevant d’une autre inspiration.

Mêlant réalisme et sentimentalité, ce roman conte les doutes, les souffrances morales, les angoisses des combattants.

Romain Rolland, plus âgé que Nguyên le Patriote de 27 ans, pourrait être un père pour lui. Sans doute, le jeune Vietnamien exilé se sent très proche de ce romancier et essayiste prix Nobel qui représente l’idéalisme patriotique et international, dont l’humanisme unit généreusement l’Orient et l’Occident. R. Rolland subit l’influence de Gandhi qu’il reçoit à Villeneuve, en Suisse, en 1931. Il a fait une étude du sage indien. Hô Chi Minh est aussi un admirateur de Gandhi à qui on le compare parfois : dans Franc Tireur, Jean Roux juge que Hô Chi Minh s’est toujours montré comme un Gandhi marxiste représentatif de la philosophe orientale. La générosité de R. Rolland le pousse à évoluer vers le communisme idéaliste, il s’efforce de concilier la pensée de l’Inde et celle de Moscou, mais son communisme, comme celui de Hô Chi Minh, est loin du stalinisme.

De deux ans le cadet de Nguyên la Patriote, Paul Vaillant-Couturier est un homme politique et journaliste. Il est député, rédacteur en chef de l’Humanité et fait partie de l’Association des écrivains révolutionnaires. Son ouvrage Nous ferons se lever le jour (1947) est un recueil de ses articles, essai et reportages qui disent l’amour de l’homme, la lutte inlassable pour la paix et le progrès. Vaillant-Couturier et Nguyên le Patriote participent à la création du Parti communiste français au Tour en 1911. C’est Vaillant-Couturier qui a guidé les premiers pas du futur Hô Chi Minh dans les activités politiques et journalistiques à Paris.

                                                                                           Huu Ngoc/CVN

 

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