>>Une taxe exceptionnelle sur les grandes entreprises envisagée par Bercy
Il y a un peu moins de dix jours, le Premier ministre français, Edouard Philippe, avait obtenu, lors d'une visite à Bruxelles, un satisfecit du président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, sur la trajectoire budgétaire de la France, qui se dirige vers une sortie l'an prochain du collimateur de Bruxelles.
Après un déficit public de 3,4% du Produit Intérieur Brut en 2016, la France compte passer - avec -2,9% - sous la barre fatidique des 3% du PIB, respectant ainsi les règles européennes auxquelles les pays membres de la zone euro ont souscrit. Une première depuis 2007, quand son déficit public s'établissait alors à 2,7% du PIB.
Et elle souhaite continuer en 2018, avec un objectif de -2,6% du PIB, ces efforts lui permettant d'échapper au viseur de Bruxelles pour "déficit excessif".
La France reste en effet le seul pays de la zone euro avec l'Espagne encore sous le coup de cette procédure, qui peut aboutir à des sanctions et des amendes, même si cela n'est encore jamais produit.
Or, comble de malchance, alors que la Commission européenne est en plein examen des projets de budgets 2018 des pays de la zone euro, l'invalidation par le Conseil constitutionnel de la taxe de 3% sur les dividendes distribués par les entreprises (instaurée en 2012, lors du premier budget du quinquennat de François Hollande) est venue quelque peu bouleverser la donne : car l'État français est obligé de rembourser environ 10 milliards d'euros aux grandes entreprises.
Le commissaire européen aux Affaires économiques, Pierre Moscovici, le 4 octobre. |
Le commissaire européen aux Affaires économiques, Pierre Moscovici, le 4 octobre. Photo : AFP/VNA/CVN |
Le 31 octobre
D'où les questions de la Commission: dans une lettre adressée vendredi au ministre français des Finances, Bruno Le Maire, elle écrit "souhaiter des précisions sur le respect des efforts budgétaires prévus par la France en 2018".
"Les informations supplémentaires (...) nous seront utiles pour évaluer si le déficit excessif sera corrigé d'une manière durable, en particulier au vu de l'impact de l'invalidation de la taxe à 3% sur les dividendes par le Conseil constitutionnel", assurent le vice-président de la Commission, Valdis Dombrovskis, et le commissaire aux Affaires économiques, Pierre Moscovici, (qui était ministre français des Finances quand cette taxe a été conçue).
"Le projet de budget prévoit un déficit public de 2,9% du PIB en 2017 (...) L'analyse préliminaire de la Commission indique que la correction du déficit excessif et sa pérennité sont toujours sujets à risque", ajoutent-ils, en exigeant une réponse avant le 31 octobre.
Outre la France, quatre autre pays (la Belgique, l'Italie, l'Espagne et le Portugal), ont reçu une lettre de la Commission européenne leurs demandant, pour des raisons diverses, des précisions sur leurs budgets.
Réagissant aussitôt, un porte-parole du ministère français des Finances a estimé qu'"à ce stade du processus, il était tout à fait normal de recevoir une telle lettre, et sans surprise vu la décision récente du Conseil constitutionnel et de son impact sur le budget".
"Nous y répondrons très vite avec les informations supplémentaires requises. Les différences d’analyse sont minimes entre la Commission et les autorités françaises", a promis le porte-parole. "Nous demeurons convaincus qu’avec les efforts déjà réalisés et ceux qui seront annoncés dans les prochains jours, la France pourra sortir de la procédure de déficit excessif dans les mois qui viennent", a-t-il ajouté.
Selon des sources concordantes, le gouvernement français devrait présenter la semaine prochaine un projet de loi de finances rectificative d'urgence consacré au règlement du litige né de l'annulation de la taxe sur les dividendes.
Le gouvernement, contraint de rembourser 10 milliards d'euros aux entreprises concernées, "souhaite aller vite" en présentant "dès le prochain conseil des ministres", prévu le 2 novembre, ce projet de loi de finances rectificative (PLFR), avait indiqué jeudi 26 octobre à l'AFP une source gouvernementale.
AFP/VNA/CVN