Suc sông moi ou nouvelle vitalité de l’orchestre aux instruments en bambou

L’orchestre Suc sông moi a une particularité : il n’utilise que des instruments de musique en bambou pour interpréter les grandes œuvres du répertoire classique vietnamien ou international. Plus que des artistes, des passeurs de culture.

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Le chef d’orchestre Dông Quang Vinh dirige le concert "Bambou d’automne" en 2019.
Photo : Nguyên Hông/CVN

Parmi les nombreux instruments de musique traditionnels du Vietnam, ceux fabriqués en bambou sont particulièrement appréciés. Dans beaucoup de localités du pays, ils rythment la vie quotidienne, les activités champêtres ainsi que les fêtes de la population, notamment des ethnies minoritaires. Les Kinh, Tày, Nùng, Jrai… ont leurs propres instruments et les sons du dàn bâu (monocorde), de la flûte ou encore du t’rung (une sorte de xylophone de Tây Nguyên) sont considérés comme de véritables passerelles à la fois entre l’homme et la nature mais aussi entre les différentes cultures du pays.

Comment, aujourd’hui, valoriser à nouveau ces instruments alors que les rites et fêtes traditionnels risquent de prendre une moins grande importance dans la vie des gens ? Certains artistes, comme Dông Quang Vinh, fondateur et directeur de l’orchestre Suc sông moi (Nouvelle vitalité), les remettent au goût du jour à travers l’interprétation de classiques de la musique.

Un pont entre tradition et modernité

Fondé début 2013 par Dông Quang Vinh et des membres de sa famille, l’orchestre Suc sông moi est l’un des rares groupes vietnamiens à utiliser uniquement des instruments en bambou. Ces derniers sont fabriqués par le père de Dông Quang Vinh, l’Artiste émérite Dông Van Minh. C’est dire si la famille est investie d’une mission, qui n’est pas seulement celle de divertir, mais aussi de promouvoir une identité culturelle particulière, mettant au goût du jour les instruments traditionnels.

Le groupe compte en son sein plusieurs membres de l’Académie de la musique du Vietnam, jouant par exemple de la flûte, du t’rung ou encore du dàn tam thâp luc (cithare à 36 cordes). Ils arrivent à reproduire des œuvres vietnamiennes et étrangères très connues.

Avant la pandémie, le groupe a effectué plusieurs tournées en Europe, au Japon, à Singapour, où il a contribué à faire connaître auprès du public international les grands classiques de la musique vietnamienne tels Cánh chim Pong kle (Les ailes d’oiseau Pong kle), Cam xúc Tây Nguyên (Les émotions des hauts plateaux du Centre), Me yêu con (Bébé, je t’aime), Mùa hái qua (La saison de récolte des fruits), etc. Les Vietnamiens résidant à l’étranger, qui parfois ont quitté le pays il y a des dizaines d’années, en gardent pour la plupart un souvenir intense. En effet, les sons mélodieux, tantôt graves, tantôt aigus, les ramènent dans leur enfance paisible à la campagne.

Le groupe Suc sông moi a récemment fait découvrir également au public vietnamien des morceaux musicaux étrangers, comme Les contes d’Hoffmann, Le Cygne, Le Carnaval des animaux.

À travers les instruments utilisés et le répertoire de musique choisi, le groupe veut être un pont entre le passé et le présent, et entre les cultures. Pour son plus grand bonheur, le public, au Vietnam comme à l’étranger, est au rendez-vous.

Développer un répertoire spécifique

Une représentation d’instruments de musique en bambou.
Photo : Nguyên Hông/CVN

Dông Quang Vinh est un pionnier qui ne veut pas s’arrêter en si bon chemin, même si ce style est encore loin d’être populaire : "La musique de chambre ne conquiert pas encore un grand nombre de spectateurs vietnamiens. L’artiste ne doit donc pas avoir peur d’être un véritable ambassadeur qui apporte à la connaissance du public quelque chose de nouveau. Pour mieux nous faire connaître, nous avons décidé de jouer des morceaux de musique étrangers en utilisant nos instruments en bambou".

Dông Quang Vinh prend très à cœur ce travail de passeur de culture : "Si l’artiste veut conquérir les spectateurs, il lui faut non seulement jouer de la musique mais aussi expliquer au public l’histoire, la culture et le contexte social de l’œuvre, soit par la parole, soit par les mélodies, afin de mieux transmettre le message de l’œuvre".

Aujourd’hui, le groupe envisage de composer ses propres œuvres afin de construire son répertoire : "Ce qui est difficile pour notre musique traditionnelle, c’est que nous avons peu d’œuvres réservées aux instruments nationaux. Les groupes sont ainsi obligés d’interpréter des œuvres anciennes. Ce n’est pas le cas au Japon, en République de Corée ou en Chine où les artistes investissement plus largement ce domaine".

On ne peut que saluer le talent et la volonté de Dông Quang Vinh qui permettent aux musiques et instruments traditionnels de faire peau neuve et d’éviter ainsi de tomber en désuétude ou le folklore.

My Anh/CVN

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