Spécialiste français : "Omicron ne fait pas changer notre stratégie contre la pandémie"

Le combat contre le variant Delta n'est pas passé, le nouveau Omicron arrive. Pour connaître ce variant, ainsi que ses menaces pour la communauté, l’Agence Vietnamienne d’Information (Vietnam News Agency - VNA) a eu un entretien avec le Pr. Dr Vincent Thibault, professeur à la Faculté de Médecine de Rennes (Université Rennes 1), chef du Service de Virologie du CHU de Rennes et chercheur au sein de l'unité U1085 INSERM à l'IRSET (Rennes). Ses partages.

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Pr. Dr Vincent Thibault, spécialiste française de virologie.

Pr. Dr Vincent Thibault, le monde est déconcerté par l'apparition d'un nouveau variant nommé Omicron. Alors d'après vous, l'apparition du nouveau variant d'Omicron obligera-t-il les pays à ajuster leur stratégie "cohabiter avec le COVID-19" ?

Face à une infection virale dont le virus possède une capacité importante à évoluer, il faut se réserver de faire toute sorte de spéculations. L'Homme a du mal à rester humble face à l'inconnu. Avouons notre ignorance face à cette situation inédite et essayons d'appliquer des mesures pragmatiques dont on sait qu'elles limiteront, autant que faire se peut, la dissémination incontrôlée de ce nouveau virus et de ses variants.

Nous savons aujourd'hui par expérience que l'application de gestes barrières très stricts et la distanciation sociale sont des mesures efficaces pour limiter la contamination. Ces gestes de la vie courante peuvent être potentialisés par des interventions thérapeutiques qui elles aussi ont démontré leur efficacité et en premier lieu la vaccination.

Par principe et vu le mode de fonctionnement des virus, toute intervention qui empêche le virus de pénétrer dans nos cellules est bénéfique ; la vaccination qui génère des anticorps bloquant l'entrée des virus est la plus efficace des préventions quel que soit le virus concerné. Une fois le virus entré dans une cellule nous ne pouvons que constater notre impuissance à correctement juguler la réplication virale même si certains traitements conduisent à une amélioration clinique pour certaines infections.

Étant donnée l'évolution de la pandémie, il est très probable que ce virus va persister et qu'il faudra attendre une immunité globale de la population suffisante pour que nous puissions considérer cette infection comme une infection commune, telle que celle observée avec d'autres virus respiratoires dont les coronavirus saisonniers "habituels". Les moyens d'atteindre cette immunité populationnelle passent par la vaccination et la circulation du virus au sein d'une population vaccinée. L'essentiel, évidemment, est de limiter la morbidité et la mortalité de cette infection tout en atteignant une immunité post primo-infection.

En conclusion, aujourd'hui, je n'ai pas d'argument pour penser que l'émergence éventuelle du variant Omicron doive faire changer notre stratégie contre la pandémie. Les mesures doivent rester les mêmes en les ajustant pour protéger le système de santé et les plus fragiles. Les capacités d'évolution des virus, comme le SARS-CoV-2, sont pratiquement infinies et de nombreux variants vont émerger. Reste à savoir quels variants auront la capacité de diffuser largement et si l'un d'entre eux aura une pathogénicité différente de celle qu'on connait aujourd'hui.

Le variant Omicron du coronavirus a été détecté dans au moins 38 pays, faisant peser un risque sur la croissance mondiale selon le FMI. Photo : AFP/VNA/CVN

À votre avis, quelles sont les mesures proactives que les pays et les régions devraient prendre pour empêcher le déclenchement d'une nouvelle épidémie dangereuse causée par ce nouveau variant ?

À ce jour, je n'ai pas vu d'information particulière qui indiquerait une capacité de diffusion importante de ce variant Omicron. La vigilance s'impose évidemment et chaque information doit être considérée attentivement pour juger rapidement du risque de diffusion de ce type de variant. Si ce n'est pas le variant Omicron, ce sera un autre.

En fonction des caractéristiques du virus, sa capacité à diffuser largement, à entrainer une pathologie particulière, à échapper à l'immunité naturelle post-infection ou post-vaccinale, les mesures pourront être adaptées mais avec les données actuelles sur ce variant (et les autres), les mesures de protection individuelles doivent être maintenues.

En fonction de la capacité de diffusion de ce variant, la nécessité de mettre en place d'autres mesures de protection pourraient être étudiées. Il faut néanmoins garder à l'esprit quels objectifs sont poursuivis avec la mise en place de nouvelles mesures. Il est certainement difficile de trouver le bon ajustement pour obtenir une immunité collective sans impacter la santé de la population.

Pouvez-vous prédire davantage sur l'évolution et les impacts de cette pandémie du Covid-19 en 2022 ?

Toute prédiction serait présomptueuse de ma part. Même si on peut supputer d'éventuelles évolutions du virus, la nature conserve tous ses droits et le virus s'adaptera quoique l'on fasse à son environnement avec l'objectif de persister dans la population. Plus nous essayerons d'influer le décours de l'infection avec des vaccins, des traitements antiviraux, des anticorps divers, plus nous exercerons une pression sélective sur la population virale avec un risque de voir émerger des variants particuliers adaptés à ce nouvel environnement. Cela sera d'autant plus vrai que le virus circulera à haut niveau dans la population.

Je pense ainsi, qu'il est impossible de prédire de façon fiable l'évolution de ce virus, en particulier du fait de la mise en place d'actions spécifiques pour lutter contre l'infection. La vaccination, qui intégrerait les variants les plus présents au niveau mondial, constitue à mon sens la solution la plus efficace pour adopter ce nouveau virus dans la race humaine.

Merci de vos partages sur le Covid-19 et son variant Omicron./.


Thu Hà NGUYEN/CVN

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