Sécheresse : le delta du Mékong entre en résistance

La sécheresse, conjuguée à une salinisation des sols inédite, a dévasté en 2016 les cultures du delta du Mékong. Les autorités provinciales, échaudées, procèdent cette année à une restructuration des cultures et construisent des digues pour qu’une telle catastrophe ne se répète.

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Une écluse pour ajuster le niveau d’eau douce et bloquer la pénétration d’eau saumâtre dans la province de Kiên Giang.

«Un homme averti en vaut deux». Un adage qui s’applique parfaitement aux autorités des provinces du delta du Mékong, déterminées à empêcher la récurrence de la catastrophe qui a frappé l’année dernière la région après la pire sécheresse en 90 ans, laquelle a eu pour effet, en raison de cours d’eau au plus bas, de saliniser les terres de la région à une échelle inédite.

Investir intelligemment

Cette année, le delta du Mékong stocke autant d’eau douce que possible. Les digues ont été consolidées, des écluses construites un peu partout et les cultures restructurées. Les prévisions sont que les remontées d’eau de mer via les cours d’eau seront à un niveau plus élevé en 2017 que la moyenne, mais bien moindres que l’année dernière, selon le Département général de l’hydraulique (ministère de l’Agriculture et du Développement rural). Ce phénomène commence déjà à se produire dans le delta et s’accentuera au fur et à mesure que la saison sèche avancera. La province de Kiên Giang a pris des mesures de précaution en investissant plus de 40 milliards de dôngs pour consolider 276 digues.

Une autre enveloppe de 20 milliards a été débloquée pour le forage de nouveaux puits pour assurer une alimentation suffisante en eau douce à des fins domestiques. Kiên Giang a également travaillé en étroite collaboration avec la province voisine d’An Giang sur «un plan approprié pour utiliser de manière raisonnée les ressources en eau», selon Nguyên Van Tâm, directeur du Service provincial de l’agriculture et du développement rural. Les autorités provinciales ont aussi établi des plans minutieux pour la récolte de riz d’été-automne, en fonction de la disponibilité des ressources en eau dans les différentes localités.

Dans la province de Bac Liêu, la chaleur et la salinisation sévissent depuis début février. Bac Liêu, en collaboration avec les provinces voisines de Cà Mau et de Soc Trang, exploite actuellement 100 grandes écluses pour ajuster le niveau d’eau douce et bloquer la pénétration d’eau saumâtre. En outre, plus de 40 barrages temporaires ont été érigés dans les districts de Phuoc Long, Hông Dân et le chef-lieu de Gia Rai pour empêcher ces remontées salines et conserver de l’eau douce.

Le gouvernement a permis aussi à la province de Long An d’investir 490 milliards de dôngs dans la construction d’un lac-réservoir au service de la production et du quotidien des habitants de la région de Dông Thap Muoi (Plaine des joncs). Selon les prévisions, ce lac sera mis en service au début de l’année 2018.

Agir ensemble pour demain

En 2016, la sécheresse a dévasté une grande superficie de riz de la province de Kiên Giang.

Les avis sur un plan directeur pour le delta du Mékong pour faire face aux changements climatiques varient d’un expert à l’autre, mais tous sont d’accord pour qu’il soit ajusté et complété le plus tôt possible.

D’après le Dr Tang Duc Thang, de l’Institut des sciences de l’hydraulique du Vietnam, le delta du Mékong a besoin d’un plan directeur à long terme pour faire face à la sécheresse et à la salinité, car il fait partie des endroits dans le monde qui souffriront le plus des conséquences des changements climatiques. Cette année, la quantité d’eau douce dans le delta du Mékong est estimée de 15% à 35% inférieure à la moyenne des années précédentes, selon un rapport du Département général de l’irrigation.

«Le développement lié à l’eau dans le delta du Mékong en amont a déjà affecté la production agricole et la vie quotidienne, et il aura un impact plus grave à l’avenir», fait savoir Tang Duc Thang. Avant d’ajouter : «Le gouvernement devrait accorder la priorité à l’investissement dans les vannes de contrôle de la salinité le long des fleuves Tiên et Hâu (bras du Mékong, ndlr) et la modernisation de l’irrigation en utilisant des mesures automatiques et en reliant les systèmes d’irrigation indépendants à un système plus vaste». Pour faire face aux changements climatiques, le ministère de l’Agriculture et du Développement rural a élaboré un plan d’action 2016-2020 qui lie la production agricole au développement rural dans le delta du Mékong.

Ainsi, le riz est maintenant principalement cultivé dans la région de Dông Tháp Muoi, qui comprend les provinces de Long An, Dông Thap et Tiên Giang. Les cocotiers et les pamplemoussiers sont cultivés dans la sous-région traversée par les fleuves Tiên et Hâu (Tiên Giang, Vinh Long, Trà Vinh et Bên Tre). Les élevages de crevettes sont surtout dans la sous-région de la péninsule de Cà Mau (Soc Trang, Cà Mau, Bac Liêu et Kiên Giang). À noter aussi que le riz et le poisson pangasius sont aujourd’hui les principaux produits de la sous-région de Long Xuyên (Hâu Giang, An Giang, Cân Tho et Kiên Giang).

D’après Trân Công Thang, directeur adjoint de l’Institut des politiques et de la stratégie pour l’agriculture et le développement rural : «Les autorités locales et les habitants ont pris conscience du dérèglement climatique. Pour tenter de s’en prémunir, il faut appliquer un train de solutions comme construction du système de digues, de barrages, culture de nouvelles variétés de riz résistantes à la sécheresse et à la salinité...». Problème, ces mesures ne seront qu’efficaces qu’en cas de modification légère des conditions pédoclimatiques.Dans le cas d’un tel bouleversement annoncé, il faut donc trouver des solutions durables et à long terme.


Huong Linh/CVN

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