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Un panneau indiquant la direction d'un bureau de vote à Featherstone lors des élections locales, le 2 mai 2019 dans le Nord-Ouest de l'Angleterre. |
Photo: AFP/VNA/CVN |
"Ces élections ont été très difficiles pour notre parti", a reconnu Theresa May, en déplacement au Pays de Galles. Pour elle, "un message simple" a à cette occasion été adressé aux conservateurs et aux travaillistes: "concrétisez le Brexit".
La Première ministre conservatrice a vu l'accord de sortie de l'Union européenne qu'elle a négocié avec Bruxelles rejeté à trois reprises par le parlement britannique, ce qui l'a contrainte à demander à l'UE de repousser au 31 octobre le départ du Royaume-Uni, initialement prévue pour le 29 mars. Pour tenter de sortir de l'impasse, elle a engagé en avril des discussions avec les travaillistes.
Cette incapacité à mettre en oeuvre le divorce avec l'Union européenne a pesé sur le scrutin, qui visait à renouveler près de 9.000 sièges dans 248 assemblées locales en Angleterre et 11 en Irlande du Nord.
Les deux formations qui dominent la vie politique ont chacune obtenu 28% des voix, selon les estimations de la BBC. Ce score est une sanction pour le Parti conservateur, qui, a l'issue du dépouillement des bulletins de vote, a perdu le contrôle de 45 exécutifs locaux, et 1.269 élus, soit plus d'un sur quatre, d'après les chiffres de l'agence Press Association. Il a poussé plusieurs députés conservateurs à une nouvelle fois exiger la démission de Theresa May. Elle a "perdu le nord" et le "contrôle des événements", a ainsi jugé Bernard Jenkins.
"Solution alternative solide"
Le Labour, critiqué pour son positionnement flou sur le Brexit, a quant à lui limité les pertes, avec six assemblées locales perdues et 63 élus en moins. "Nous sommes l'unique parti essayant d'attirer des gens indépendamment de leur vote de 2016" au référendum sur le Brexit, a tenté de se justifier Jeremy Corbyn. Il a toutefois reconnu que son parti, qui s'attendait à enregistrer des résultats en progression, aurait "voulu mieux faire".
Les centristes du Parti libéral-démocrate, une formation europhile, ont pour leur part tiré avantage du scrutin. Avec 19% des voix, ils sont devenus majoritaires dans 11 nouvelles assemblées locales et ont obtenu 676 nouveaux élus. "La montée des Lib' Dem' aujourd'hui est un tremplin pour les élections européennes", s'est félicité leur chef de file, Vince Cable. Pour le député et ancien ministre Edward Davey, "les libéraux démocrates ont prouvé qu'ils pouvaient constituer une solution alternative solide face aux conservateurs et aux travaillistes".
Pour les Tories comme pour le Labour, la claque est d'autant plus douloureuse que ces partis "ont perdu le plus de voix dans les zones où ils étaient les plus forts", soit le sud pour les conservateurs et le nord pour les travaillistes, a souligné sur la BBC John Curtice, professeur de sciences politiques à l’Université de Strathclydes.
La formation europhobe Ukip, de son côté, s'est effondrée, perdant plus de la moitié de ses élus locaux pour n'en conserver que 31.
Confiance trahie
À Sunderland, à 450 km au nord de Londres, où 61% des habitants avaient voté pour la sortie de l'UE, le Labour a reculé, même s'il continue à tenir la ville. "J'ai perdu dix sièges", a déploré au micro de la BBC le leader travailliste Graeme Miller, fustigeant un Brexit qui "s'introduit et prend le contrôle" de la politique locale. Alors que des députés travaillistes ont soutenu l'organisation d'un second référendum sur la sortie du Royaume-Uni de l'UE, la population locale a voulu montrer qu'elle "n'acceptait pas" cette perspective, selon M. Miller.
Le district de Bath et North East Somerset, dans le sud-ouest de l'Angleterre, jusque-là dirigé par les Tories, est quant à lui tombé aux mains des libéraux-démocrates. "Les électeurs nous disent sur le terrain qu'ils ne peuvent plus faire confiance aux conservateurs à cause du Brexit", a déploré le leader conservateur local, Tim Warren.
Ces élections locales ont donné un avant-goût de ce qui pourrait attendre les conservateurs et les travaillistes aux élections européennes, qui se dérouleront le 23 mai sauf si le parlement adopte d'ici là l'accord de sortie de l'UE négocié par Theresa May.
Ils seront en plus confrontés à un nouveau concurrent redoutable, le Parti du Brexit emmené par l'europhobe Nigel Farage, donné favori par un sondage YouGov de mi-avril, avec 23% des intentions de vote.