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Le Premier ministre britannique Boris Johnson devant la Chambre des communes, le 9 septembre à Londres. |
Les cinq anciens Premiers ministres britanniques encore en vie, dont David Cameron lundi 14 septembre, ont désormais tous critiqué la loi "sur le marché intérieur", laissant entrevoir des débats animés dans l'après-midi et la soirée à la Chambre des communes.
De l'aveu même du gouvernement britannique, ce projet de loi viole le droit international "d'une manière très spécifique et limitée" en contredisant certaines parties de l'accord de retrait de l'UE que Londres s'était engagé il y a moins d'un an à respecter, en particulier le protocole de l'Irlande du Nord.
Bruxelles a menacé d'entamer une action en justice et y a vu un coup porté à la "confiance" mutuelle au moment où les deux parties n'ont que quelques semaines pour parvenir à un accord de libre-échange et éviter une rupture brutale au 1er janvier prochain. Cette date correspond à la fin de la période de transition amortissant le divorce effectif depuis le 31 janvier dernier.
Signe de l'importance du texte pour le pouvoir, le Premier ministre Boris Johnson ouvrira lui-même les débats au Parlement, prévus pour durer jusqu'à mardi prochain. Selon lui, il s'agit d'"un texte de loi essentiel pour le Royaume-Uni", dont l'adoption avant la fin de l'année est "cruciale", a dit son porte-parole.
Si la large majorité dont dispose son gouvernement rend peu probable un rejet du texte en deuxième lecture lundi soir, les députés rebelles pourraient apporter un soutien décisif à un amendement présenté par le député Robert Neill qui limite les pouvoirs du gouvernement concernant toute atteinte à l'accord de Brexit.
Donnant du poids à la fronde, Geoffrey Cox, un ancien attorney general (conseiller juridique du gouvernement), a jugé "impensable" que le gouvernement se soustraie à ses obligations internationales et prévenu qu'il voterait contre le texte, bien qu'il soit conservateur et favorable au Brexit.
S'il est voté à la Chambre des Communes, le texte devra ensuite franchir l'obstacle de la Chambre des Lords, la chambre haute du Parlement, où les critiques ont fusé face à une violation assumée du droit international.
"Blocus" alimentaire
Le négociateur britannique David Frost (gauche), et son homologue européen Michel Barnier à Bruxelles, le 21 août. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Ce projet a provoqué une nouvelle crise politico-diplomatique dans la saga du Brexit, qui a commencé il y a plus de quatre ans avec la victoire du "leave" au référendum.
L'accord conclu l'année dernière entre Londres et Bruxelles prévoit des dispositions douanières particulières pour l'Irlande du Nord, destinées notamment à éviter le rétablissement d'une frontière physique entre la République d'Irlande, membre de l'UE, et la province britannique, conformément à l'accord de paix de 1998 qui a mis fin à trois décennies de violences.
L'Irlande du Nord doit rester pendant quatre ans soumise à certaines dispositions européennes, notamment concernant les échanges de marchandises.
Mais, selon le négociateur britannique David Frost, l'UE menace de refuser de placer le Royaume-Uni sur la liste des pays autorisés à exporter des produits alimentaires vers ce territoire qui en fait partie, ce qui empêcherait les importations en Irlande du Nord à partir du reste du pays.
Boris Johnson a expliqué sa démarche par la nécessité d'éviter ce risque de "blocus" alimentaire.
Si le projet de loi est approuvé, le gouvernement pourra unilatéralement prendre des décisions commerciales en Irlande du Nord, contrairement à ce qui avait été initialement convenu.
Malgré la crise déclenchée par ce projet, les discussions se poursuivent entre négociateurs britanniques et européens sur un accord de libre-échange.
Elles doivent reprendre cette semaine à Bruxelles mais une huitième session la semaine dernière n'a permis aucune percée majeure sur les principaux blocages, à savoir le respect par Londres de règles évitant de créer une concurrence inéquitable aux portes de l'UE et les conditions de l'accès des pêcheurs européens aux eaux britanniques.
Les deux parties ont affirmé qu'un accord devait être conclu en octobre pour éviter un "no deal" revenant à l'introduction de droits de douane entre le Royaume-Uni et le bloc européen et risquant d'aggraver la crise économique historique provoquée par la pandémie liée au nouveau coronavirus.
AFP/VNA/CVN