>>Ouverture de la première fête de la brocatelle du Vietnam
>>Un styliste fait revivre la brocatelle
>>La brocatelle vietnamienne présentée à un festival en France
Initier les jeunes à l’artisanat de la brocatelle dans la province de Gia Lai (hauts plateaux du Centre). |
Photo : VNA/CVN |
Chaque ethnie du Vietnam possède sa propre façon, son style et sa fabrication de la brocatelle, un tissu chamarré de plus en plus prisé des créateurs de haute couture, qui contribuent à la préservation et à la valorisation de cet artisanat séculaire à forte signification culturelle et patrimoniale.
La célèbre styliste Minh Hanh, qui aime pour ses collections des matières traditionnelles d’origine naturelle, fut l’une des premiers à présenter au monde la beauté de la brocatelle vietnamienne.
Fierté des ethnies
C’était en septembre 2012, lors du Festival international des textiles extraordinaires de Clermont-Ferrand, où 50 créations furent présentées. À l’exposition "Métamorphoses" au musée Bargoin, cœur du festival, ses vêtements traditionnels uniques en brocatelle, fabriquée par des tisserandes H’mông des provinces montagneuses de Hà Giang et Lào Cai, au Nord du Vietnam, ont ébloui le public.
En 2017, à Genève, en Suisse, une autre collection de brocatelle de Minh Hanh a également marqué les esprits. Elle a utilisé le tissu zèng des Tà Ôi, une ethnie minoritaire de la province de Thua Thiên-Huê (Centre). Il s’agit d’un type de tissu dont l’originalité réside dans des motifs ornementaux créés à l’aide de petites perles de verre, introduites à même l’étoffe. Une matière précieuse, idéale pour créer des produits de mode haut de gamme.
Selon Minh Hanh, les brocatelles des minorités ethniques du Vietnam sont résistantes et surtout très belles. Chaque ethnie dispose de ses propres couleurs et dessins à forte signification culturelle. Le processus de tissage est entièrement artisanal et les contrastes de couleurs sont recherchés.
Grâce à la styliste, les textiles traditionnels de diverses régions du pays ont trouvé des débouchés à l’étranger. Vêtements et accessoires en brocatelle tels portefeuilles, sacs à main, sacs à dos, mouchoirs, foulards... traversent mers et montagnes dans les valises de nombreux voyageurs. Un bon moyen de promouvoir la culture vietnamienne sur les cinq continents.
Outre la brocatelle, Minh Hanh souhaite que tous les tissus artisanaux du Vietnam se fassent connaître à l’étranger. Pour cela, la participation de toutes les parties prenantes est nécessaire, des tisserandes perdues dans leurs montagnes aux créateurs de haute couture habitués des podiums.
Parmi les stylistes vietnamiens qui ont choisi ces textiles faits main pour leurs collections et qui ont connu le succès sur la scène internationale ces dernières années, citons Nguyên Công Trí, Vo Viêt Chung, Patrick Pham…
Tisser un lien avec ses origines
Une création en brocatelle de la styliste Minh Hanh. |
Photo : VNA/CVN |
Non seulement artisans, tisserands, designers, créateurs... mais les jeunes s’intéressent aussi aux vêtements traditionnels faits par les minorités ethniques du Vietnam.
En 2018, un groupe d’étudiants de la ville de Bao Lôc, province de Lâm Dông (hauts plateaux du Centre), passionné de brocatelle, a donc lancé le projet Ethnicity, visant à numériser ses motifs pour un usage communautaire gratuit.
Ainsi, en juillet 2020, la première bibliothèque numérique nationale consacrée à ces décorations ethniques a-t-elle été fondée, afin de les valoriser dans la vie contemporaine, surtout celles des ethnies K’Ho et Ma des hauts plateaux du Centre.
Les membres d’Ethnicity vont sur le terrain pour collecter ce patrimoine culturel et étudier également sa signification. Selon un membre du projet, les motifs de brocatelle sont composés de figures géométriques de base (triangle, rectangle, carré, cercle, ligne et courbe...), chacune possédant une signification et une histoire particulière pour chaque ethnie.
À partir des ornements originaux, Ethnicity cherche à combiner des couleurs contemporaines pour promouvoir un usage plus large de la brocatelle. Ces nouvelles créations ont certes un style plus moderne mais conservent l’essence originelle de chaque motif.
D’après une jeune employée de Hanoï, grâce à ces produits ethniques "remis au goût du jour", ce patrimoine culturel immatériel qu’est la brocatelle est "dépoussiéré". "Il retrouve ainsi une certaine attractivité pour un usage quotidien, notamment auprès de la jeune génération", indique-t-elle.
Le projet Ethnicity est très apprécié des amoureux de l’artisanat car ses activités permettent de créer une vaste utilisation des motifs de brocatelle dans la vie contemporaine : dans la mode certes, mais aussi dans l’art et les produits souvenirs...
Dans un contexte de déclin de ce métier séculaire chez les minorités ethniques, ces nouveaux usages de la brocatelle offrent de nouveaux débouchés.
"Pour valoriser les textiles faits main, chaque ethnie doit être partie prenante, surtout pour transmettre ce savoir-faire aux jeunes générations. Il faut aussi une combinaison entre la tradition et la modernité, outre la recherche de nouvelles matières, la diversification des produits…", estime la chercheuse en culture Linh Nga Niê Kdam.