Quand des théâtres se muent en promoteurs événementiels

Tandis que certaines compagnies artistiques rêvent d'avoir une scène pour faciliter le travail de ses artistes, d'autres qui en possède une ou deux chacune, la louent pour des activités toutes autres comme l'organisation de conférences ou de festins de mariage.

De nombreuses compagnies artistiques nationales se plaignent de ne pas avoir de scène leur étant réservée. Le Théâtre de cai luong (théâtre rénové), l'Opéra-Ballet, l'Orchestre symphonique, le Théâtre parlé du pays et d'autres troupes artistiques de Hanoi, de Hô Chi Minh-Ville… sont dans ce cas. Pour ces compagnies, lors de la mise en scène des programmes, leurs artistes doivent répéter dans des pièces étroites, avec des équipements de son et lumière inadéquats. Les artistes ne connaîtront la scène que lors d'une séance, avant l'heure d'ouverture. Certaines compagnies ne louent la scène qu'au moment de la représentation. Dans ce cas, les artistes arrivent et donnent directement le spectacle, sans avoir le temps de répéter sur scène au préalable. Les responsables de ces compagnies affirment que si leur établissement avait chacun une scène à lui, ne serait-ce que de taille modeste, leurs artistes ne devraient plus être confrontés aux difficultés qu'ils éprouvent lors des répétitions et des spectacles…

À côté de ces compagnies artistiques, d'autres ont de la chance de gérer leur propre lieu de représentation, mais n'arrivent pas à faire fonctionner leur scène à pleine capacité. Ce qui fait que certains établissements la louent pour la tenue de conférences ou encore de festins de mariage.

Le Théâtre de chant, de danse et de musique du Vietnam (TCDM) dispose de sa propre scène, le théâtre Au Co, situé dans l'arrondissement de Dông Da (Hanoi). Mais le TCDM n'a pas encore de programme périodique pour ses représentations. Selon son calendrier, l'établissement n'a organisé que 11 programmes de représentation au cours des neuf mois premiers de l'année, dont sept prévus au théâtre Au Co, utilisant ainsi sa scène à des fins artistiques moins d'une fois par mois... Même si, bien sûr, le TCDM effectue des tournées hors de Hanoi et à l'étran-ger. Mais le fait que le TCDM n'a pas encore de programme régulier sur sa propre scène est regrettable. Le directeur adjoint du TCDM, Truong Ngoc Xuyên, fait savoir : "De nombreux établissements veulent organiser leurs événements sur notre scène. Et nous sommes très disposés à accepter leur proposition". Récemment, le groupe national du gaz et du pétrole a loué la scène du TCDM pour organiser un festival de chant et de danse en l'honneur du 50e anniversaire du secteur pétrolier.

Concernant les spectacles du TCDM, "notre établissement conçoit souvent de nouveaux programmes, toujours selon le directeur adjoint du TCDM. Ces spectacles sont montés avec soin, mêlant danses et chants. Mais, comme ils demandent de minutieux préparatifs et que le nombre de places disponibles dans le théâtre est important, il nous est impossible d'organiser régulièrement ces programmes".

Le calendrier de représentation du TCDM est pourtant plus dense que celui du Théâtre de chèo (théâtre populaire) de Hanoi, qui possède à lui seul deux scènes : l'une rue Kim Ma et l'autre baptisée Dai Nam, récemment inaugurée dans le centre-ville (rue Huê). Depuis l'été, les chants chèo au théâtre Dai Nam se font disparates. Le nombre de spectacles donnés au théâtre de Kim Ma est aussi restreint. "Chaque mois, nous ne donnons que trois spectacles, deux sur la petite scène et un seul sur la grande", révèle le directeur du théâtre Hà Quôc Minh.

"Le grand public a aujourd'hui perdu l'habitude de se rendre au théâtre", regrette le chercheur Bùi Trong Hiên, de l'Institut national de culture et d'art. Le public tourne le dos aux genres théâtraux traditionnels, mais aussi à d'autres arts modernes comme la musique pop ou le théâtre parlé… Les gens ne fréquentent plus les lieux de représentations artistiques, ils n'ont plus l'habitude d'accueillir un bon spectacle. Quand le plaisir d'aller au théâtre s'altère et disparaît, c'est la vie des artistes qui se complique. Ce qui explique la lourde charge des compagnies artistiques qui doivent assurer le minimum vital pour leurs artistes. De nombreuses compagnies se sont donc résolues à vendre leur scène ou à la louer pour avoir un budget plus important. Leur dynamique répond aux besoins économiques des artistes, mais cela ne satisfait certainement pas le besoin de créativité des artistes, essentiel pour l'existence de toute scène.

Comment faire pour susciter à nouveau le plaisir d'aller au théâtre ? "Il faut que notre public soit formé pour se découvrir une fibre artistique", déclare Docteur ès art Nguyên Thi Minh Thai. "Et l'éducation artistique doit être menée dès l'enfance", ajoute-t-elle.

Le directeur adjoint du Théâtre de la Jeunesse, à Hanoi, Truong Nhuân, émet un autre son de cloche. "Il faut que les compagnies conçoivent de bons programmes pour attirer le public", avertit-il. Il cite un exemple selon lequel, les programmes artistiques en plein air, où l'entrée est libre, attirent beaucoup de spectateurs. Ce qui veut dire que le public a besoin d'assister aux programmes artistiques. L'important, c'est que l'État offre des projets d'assistance, encourage les activités culturelles pour que le public prenne l'habitude de se rendre aux spectacles…

Hoàng Hoa/CVN

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