Qualifié pour le Mondial-2019, le rugby russe voit plus loin

La Russie, future grande nation de rugby? S'il a fallu un improbable concours de circonstances pour le voir se qualifier au Mondial-2019, le plus grand pays du monde dispose d'un potentiel immense. Reste à l'exploiter.

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L'entraîneur gallois du XV de Russie, Lyn Jones, lors du match de Coupe d'Europe face à la Belgique, à Sotchi, le 16 février.

"Vous seriez surpris à quel point la Russie est pleine de promesses!" À 54 ans, Lyn Jones a derrière lui une longue carrière d'entraîneur, qui l'a vu passer par plusieurs clubs gallois et faire étape en Namibie. Sa dernière aventure l'a mené en Russie, dont il dirige la sélection depuis août 2018.

Quand ce Britannique haut en couleur a commencé à discuter avec la Fédération russe, il n'était pas question de Coupe du monde. Mais à sa prise de fonction, le XV russe avait obtenu le droit de participer au second Mondial de son histoire.

Entre-temps, la fédération internationale a disqualifié l'Espagne, la Roumanie et la Belgique, coupables d'avoir aligné des joueurs non éligibles durant les qualifications. Et fait le bonheur de la Russie, arrivée à la quatrième place des éliminatoires.

"Cela a été une surprise", admet Lyn Jones. Depuis sa nomination, il parcourt le pays, rencontre les entraîneurs russes et voit autant de matches que possible avec l'objectif de régénérer la sélection.

La mission n'est pas facile. Le championnat russe ne compte que huit clubs, dispersés à travers le pays. Les deux meilleurs, Enisei-STM et Krasny Yar, sont à Krasnoïarsk, 3.400 kilomètres à l'est de Moscou. Et l'hiver russe prive les joueurs de matches une bonne partie de la saison.

Forme et concentration

Lyn Jones reste satisfait de ce qu'il a vu. "Les joueurs russes ne réalisent pas à quel point ils sont bons", assure-t-il en dirigeant un entraînement à Sotchi, la station balnéaire de la mer Noire où le XV russe a pris ses quartiers d'hiver le temps du "Championnat européen international", sorte de tournoi des Six nations B.

"Avec de la confiance et plus de compréhension (tactique), ils pourraient accomplir de si grandes choses", ajoute le coach britannique, qui dit avoir identifié "les trois points que nous devons améliorer: la forme physique, la concentration et la capacité à jouer sous la pression".

Au Japon, où le Mondial-2019 aura lieu du 20 septembre au 2 novembre, l'objectif sera de remporter au moins un match. Une mission quasi-impossible face à l'Irlande et l'Écosse mais les Russes croient en leur chance de battre le pays organisateur ou les Samoa, les deux autres nations de la poule A.

La tâche confiée à Lyn Jones s'étend bien au-delà du Mondial-2019. "On a réellement conscience que notre sélection n'a pas atteint un plafond, qu'on peut la faire grandir", assure le directeur technique national, Sergueï Markov.

La Russie dispose d'infrastructures de qualité à Sotchi, où les sélections masculines et féminines s'entraînent côte à côte. Mais les écoles de rugby sont peu nombreuses et les déplacements rendus compliqués par la taille du pays. Résultat, beaucoup de jeunes abandonnent en route. Les autres manquent de culture tactique.

"Il faut qu'il y ait une vraie structure pour préparer les jeunes (...), qu'ils reçoivent la science nécessaire pour arriver en équipe nationale déjà prêts", explique Sergueï Markov.

"Avec un plan..."

Taguir Gadjiev symbolise le potentiel du rugby russe. Originaire du Daguestan, il pratiquait initialement le MMA (arts martiaux mixte), sport roi dans cette république montagneuse du Caucase.

Avant ses 18 ans, le deuxième ligne n'avait jamais entendu parler du rugby. Sa vitesse et sa capacité de percussion en font aujourd'hui un grand espoir mais à 24 ans, sa marge de progression reste immense: "Lyn Jones réclame de nous une abnégation totale mais avant ça, penser et lire le jeu. Voir le jeu en deux secondes, savoir ce qui se passe".

Le sport souffre aussi d'un manque profond de visibilité. Surplombé par une autoroute, le petit stade dans lequel le XV russe a écrasé la Belgique (64-7) en février n'était pas plein. Pendant la Coupe du monde de football, il servait de terrain d'entraînement à la Seleção brésilienne, dont chaque sortie provoquait des embouteillages.

Posté sur le toit du stade pour mieux observer ses joueurs, Lyn Jones a tout de même apprécié la victoire. "Avec un plan, tout serait possible ici (...) Il y a tellement de potentiel!"

AFP/VNA/CVN

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