Lê Mai est le pseudonyme qu’il utilisait lorsqu’il écrivait des articles pour le journal âp Bac. Son véritable nom est Lê Thiên Ngu. «Peu importe les aléas météorolo-giques, les lecteurs doivent pouvoir s’informer et avoir le plaisir de lire leur journal», explique M. Ngu qui parcourt ainsi les rues de My Tho, province de Tiên Giang (delta du Mékong) depuis près de 25 ans.
Les kiosques sont nombreux à My Tho, mais l’oncle Lê Mai délivre plus de 200 clients, pour quelques 200 à 300 dôngs supplémentaires. «Il est ouvert, toujours souriant, et connaît bien les nouvelles du jour. Quand il y a des informations marquantes, on y va de nos petits commentaires», indique Mme Lan, abonnée au journal Tuôi tre (Jeunesse) dans le 1er arrondissement. De fait, les sourires que M. Mai suscite attirent une clientèle toujours plus nombreuse qui fait fonctionner le bouche-à-oreille.
Lê Mai délivre des journaux à ses clients. |
En 25 ans de métier, M. Mai en a vu de toutes les couleurs, et ne manque pas d’anecdotes, parfois insolites, parfois embarrassantes. Un jour, alors qu’il faisait sa tournée quotidienne, la femme de l’un des clients a refusé de lui ouvrir. Le lendemain, il a dû s’expliquer auprès du mari, qui pensait que le livreur n’ait pas fait son travail. Il y avait là semble t-il un manque de communication certain entre les deux époux.
Des souvenirs inoubliables
Autre jour, autre récit. Un lecteur peu prévoyant lui tendit un billet de 200.000 dôngs pour acheter son canard. M. Mai n’ayant pas de monnaie sur une telle somme, le client dut attendre quelques jours pour la récupérer. «La vente ambulante ne paye pas vraiment mais les clients, quelle que soit leur milieu social, sont honnêtes. Il y a une vraie relation de confiance entre nous. Ils ont tous en commun cette volonté de continuer à lire les journaux papier en dépit du développement de l’information sur Internet», confie-t-il.
M. Mai était autrefois cadre de santé et collaborait avec les journaux Tiên Giang, âp Bac etc. Mais en septembre 1987, il a décidé de se reconvertir. «Ma femme me l’a beaucoup reproché, mon salaire n’était pas suffisant pour nourrir nos trois enfants. Mais j’avais goûté à ce métier, et il était hors de question d’arrêter».
Aujourd’hui, à 65 ans, il n’est pas prêt de prendre sa retraite. «En fait, je suis heureux comme ça, faire ma tournée quotidienne, discuter de l’actualité avec mes clients. J’exercerai ce métier jusqu’à ce que mon corps me dise +stop+. Après, mes enfants suivront. Nous n’abandonnerons pas lecteurs attachés au support papier. Ils sont devenus trop rares», insiste Lê Mai.
Hà Minh/CVN