>>Les Sud-Coréens votent pour tourner la page du scandale Park
>>Corée du Sud : le bouclier antimissile américain arrive sur zone
Moon Jae-in, nouveau président de la Corée du Sud, le 9 mai à Séoul. |
Photo : Xinhua/VNA/CVN |
Le scrutin anticipé, organisé sur fond de fortes tensions avec la République populaire démocratique de Corée (RPDC), a été organisé pour remplacer l'ex-présidente Park Geun-hye, au centre d'une énorme affaire de concussion qui a provoqué sa chute.
Washington a immédiatement félicité son successeur : "Nous félicitons le président-élu Moon Jae-in et nous nous associons au peuple sud-coréen dans la célébration de sa transition politique pacifique et démocratique", a réagi la Maison Blanche, dans un bref communiqué émanant du porte-parole de l'exécutif Sean Spicer et non de Donald Trump lui-même.
De nombreux électeurs ont profité du scrutin pour dire leur colère face à la corruption d'une partie des élites, mais aussi à la vie chère, à l'augmentation du chômage et au ralentissement de la croissance.
Selon les résultats fournis par la Commission électorale nationale après dépouillement de la plupart des bulletins de vote, M. Moon, le candidat du Parti démocratique de centre gauche favorable à une forme de dialogue avec Pyongyang, a obtenu 11,4 millions de voix, soit 40,2% des suffrages.
"Je serai le président de tous les Sud-Coréens", s'est-il exclamé devant ses partisans sur la place Gwanghwamun à Séoul où des millions de Sud-Coréens s'étaient massés plusieurs mois durant pour exiger le départ de Park Geun-hye.
"C'est une grande victoire (...) pour créer un pays de justice (...) où les règles et le bon sens prévalent", a-t-il encore dit.
"Je suis si heureuse car il y a de l'espoir pour un réel changement", a quant à elle réagi une femme de 28 ans présente dans la foule, Koh Eun-byul.
Kul Sun-chul, 59 ans, a de son côté expliqué avoir voté pour M. Moon car "ce pays a besoin de rétablir la démocratie qui a été tant laminée par le gouvernement Park".
Le conservateur Hong Joon-pyo, issu du parti de la présidente déchue, est arrivé loin derrière avec 25,2% des suffrages, suivi du centriste Ahn Cheol-soo avec 21,5%.
M. Moon, 64 ans, a expliqué à son équipe de campagne réunie au quartier général de son parti que son triomphe était le résultat d'une volonté de "changement de régime" de la part de la population.
La participation a tourné autour de 77,2%, selon des chiffres préliminaires, le taux le plus élevé en 20 ans pour une élection présidentielle.
Désamorcer les tensions avec le Nord
La campagne s'est largement focalisée sur l'économie, la RPDC étant passée à l'arrière plan. Mais après 10 ans de règne conservateur, la victoire de M. Moon pourrait signifier un changement considérable de politique vis-à-vis de Pyongyang et de l'allié et protecteur américain.
M. Moon prône le dialogue avec la RPDC afin de désamorcer les tensions et de l'inciter à négocier. Il veut aussi plus de distance avec les États-Unis.
Dans un récent entretien avec le Washington Post, il estimait que Séoul devait "jouer un rôle de meneur sur les questions concernant la péninsule coréenne".
Le Nord, qui rêve de mettre au point un engin atomique capable d'atteindre le continent américain, a procédé à deux essais nucléaires depuis début 2016 et à de multiples tirs de missiles.
Les tensions ont rarement été aussi élevées dans la péninsule. Donald Trump a menacé de régler la question par la force militaire avant d'adoucir le ton et de dire qu'il serait "honoré" de rencontrer le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un.
Mais pour la plupart des Sud-Coréens, habitués à vivre avec la menace nord-coréenne, la question des programmes balistique et nucléaire de Pyongyang n'a pas été déterminante dans leur vote, contrairement à la corruption, au ralentissement de la croissance et au chômage.
Tourner la page
Cette présidentielle doit permettre à la société sud-coréenne de tourner la page après des mois de tumulte politique, cependant que Mme Park attend désormais derrière les barreaux d'être jugée pour corruption et abus de pouvoir.
L'affaire a contribué au ressentiment général en illustrant à nouveau les relations malsaines entre la classe politique et le patronat.
En cause notamment, une confidente de l'ombre de l'ex-présidente, Choi Soon-sil, accusée d'avoir profité de ses entrées pour extorquer des dizaines de millions de dollars aux grands groupes.
L'ampleur du scandale, qui implique aussi l'héritier de l'empire Samsung et le président de Lotte, cinquième plus grand conglomérat sud-coréen, a contraint les candidats à promettre des réformes en vue de plus de probité.
Le puissant voisin chinois s'est aussi invité dans la campagne.
Le déploiement en Corée du Sud d'un bouclier antimissile américain destiné à contrer les menaces du Nord a provoqué la fureur de Pékin, qui a pris une série de mesures vues à Séoul comme des représailles économiques.