Pour le rayonnement et l’enseignement du français en Asie du Sud-Est

Née en 1995 à Dijon à l’initiative d’un groupe d’enseignants et maintenant installée à Grenoble, l’association Préfasse, c’est-à-dire «Pour le rayonnement et l’enseignement du français en Asie du Sud-Est», s’est engagée sur des projets de formation et d’échanges culturels, au Vietnam notamment.

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Régine Hausermann (centre) lors de la cérémonie de signature de la nouvelle convention de coopération éducative entre la Préfasse et l'Université nationale de Hanoï.
Photo : UL/CVN

Depuis une vingtaine d’années, elle se concentre sur un partenariat fructueux avec le département de Français de l’Université de Hanoï. Régine Hausermann, sa présidente, a accepté de nous en dire plus.

La première chose, c’est de faire venir soit des étudiants, soit de tout jeunes professeurs, en France, l’été. Ça permet, notamment aux jeunes professeurs qui enseignent le français mais qui ne sont jamais venus en France, de découvrir la France en étant accueillis dans des familles, de comprendre comment vivre les Français, et de bénéficier d’un stage de formation pendant un mois à l’université de Grenoble. Et puis le deuxième aspect, c’est d’envoyer un expert, un professeur chevronné, expérimenté, pour aider au développement du français dans ce département. Il faut que les étudiants aient l’occasion de rencontrer un Français natif, de parler avec lui, de bénéficier de son enseignement qui est quand même assez différent de l’enseignement vietnamien. Et puis le plus gros aspect de ma mission, c’est de participer à la formation des enseignants. Il faut aider les débutants à commencer dans le métier. Mais je crois, de toute façon, que c’est vraiment une caractéristique de notre métier, d’être constamment en formation, que ce soit dans le domaine linguistique ou dans le domaine culturel.

- VOV5 : Préfasse a réussi à maintenir ses programmes pendant une vingtaine d'années sans avoir besoin d'aide de l'ambassade de France au Vietnam. Qui, alors, prend en charge tous les efforts nécessaires ?

C’est vrai qu’au début, il y a deux missions que l’ambassade de France a financées en payant mes billets d’avion. Mais c’est maintenant ma 11ème mission. Les autres fois, c’est moi, personnellement, qui ai payé les billets d’avion. Comme nous sommes une petite association, nous avons un budget de quelques milliers d’euros seulement. Alors nous préférons utiliser cet argent pour accueillir le jeune professeur qui vient trois mois en France. Ça tourne environ autour de 2.000 euros. C’est modeste, mais je pense que ce sont les petits ruisseaux qui font les grandes rivières. Et en France, comme vous le savez sans doute, il y a une multitude d’associations. Donc, une petite association plus une petite plus une petite, ça finit par faire beaucoup d’effets. Comment faisons-nous? Eh bien, nous sommes une cinquantaine d’adhérents, nous payons une cotisation, et puis comme nous sommes dans un pays de vignobles avec des Grands Crus de Bordeaux, de Bourgogne, nous avons grâce à des amis qui ont des parents viticulteurs, notamment en Bourgogne, au printemps, une opération de vente de vins qui nous rapporte quelques bénéfices. Nous sommes modestes mais nous sommes assez satisfaits de l’effet, de la modestie de nos moyens parce qu’on se rend compte à quel point ça crée un réseau. Préfasse, c’est petit et grand en même temps. C’est un réseau qui s’autofinance parce que par rapport à votre question initiale, je regrette un peu les orientations prises par notre gouvernement et par la majorité des ambassades, j’ai le sentiment qu’on consacre beaucoup moins à l’aide au français et à la culture française et qu’on s’intéresse plus au business.

Je dois dire d’ailleurs que depuis 2-3 ans, nous avons additionné nos forces avec celles d’une autre association: l’association franco-vietnamienne du Val-de-Marne qui co-accueille la Préfassienne avec nous et qui participe au frais occasionné par les bourses.

Régine Hausermann (4e à gauche) et des Préfassiennes.
Photo : PF/CVN

- VOV5 : Moi, je suis très impressionné par votre «carnet», et notamment le journal sur votre mission de formation. On peut y trouver des expériences pédagogiques mais aussi tout un aspect «découverte au Vietnam». D'où vient-elle, cette idée ?

C’est-à-dire que quand je suis ici, je tiens un journal. Maintenant, j’en suis à mon 11e cahier et tous les jours, je note. Et puis, en fin de mission, je fais un bilan de mission. En cours de mission, j’écris des lettres de Hanoï à mes amis français de l’association et au-delà et puis on s’est dit avec les membres de l’association: «C’est dommage de ne pas le diffuser au-delà». Bon il y a un problème technique. Heureusement dans l’association il y a un professeur d’informatique qui est un jeune retraité qui m’a dit «Mais tu sais, on peut créer un site, moi, je peux mettre en ligne. Toi tu écris, moi, je mets en ligne». Ça nous est paru intéressant justement pour partager cette expérience, pour donner des idées à d’autres, pour montrer en quoi c’est utile, en quoi ça consiste, pour essayer de créer des vocations… Vous avez vu mon sourire, je suis très contente que vous soyez allés consulter le site parce que je trouve ce n’est pas la vitrine seulement. Je crois qu’il y a de la substance derrière à essayer de partager l’intérêt de ce genre de mission et puis vous avez vu qu’il y a aussi d’autres rubriques dont «Livres» et «Voyages». J’ai beaucoup écrit cet été mais mon ami qui s’occupe de la mise en ligne n’a pas encore eu le temps de le mettre, c’est-à-dire j’ai extrait de mes cahiers, des moments où je suis partie en voyage au Laos, au Cambodge. Pour l’instant, il n’y a que le voyage que j’ai fait sur les traces d’Alexandre Yersin parce que j’ai été enthousiasmée par la lecture du bouquin de Patrick Deville «Peste & Cholera» qui raconte un peu la vie d’Alexandre Yersin. Ça m’a passionné et je suis donc allée à Dà Lat, Nha Trang, sur les traces de ce grand bonhomme, franco-suisse comme moi. Donc, voilà, c’est pour faire partager le sens de notre engagement, Par exemple vous avez vu les jeunes préfassiennes. Celles de cette année, elles ont raconté ce qu’elles ont fait.

- VOV5 : Force est de constater la domination de la langue anglaise à travers le monde, et le Vietnam ne fait pas exception. À votre avis, quel avenir pour la langue de Molière ?

Je pense qu’il y a un avenir réel parce qu’il y a encore une imprégnation, beaucoup de contacts entre les entreprises françaises et les entreprises vietnamiennes. Il y a donc des besoins de gens qui maîtrisent le français dans les entreprises implantées au Vietnam et puis je pense que le deuxième aspect qui est le plus important, c’est le développement du tourisme. Les Français, les francophones sont très attirés par le Vietnam. Le Vietnam est un pays qu’ils ont envie de visiter. Donc il y a encore un potentiel considérable de développement touristique en direction des francophones, ce qui créé beaucoup d’emplois non seulement les guides, mais aussi dans les hôtels, la restauration.

- VOV5 : Pourriez-vous nous parler de vos projets d’avenir ?

Malgré mon grand âge, je reviens avec plaisir parce que je constate que même si c’est quelque fois difficile à cause de la chaleur, à cause des modes de fonctionnement, je crois que j’ai su m’adapter. Et c’est grâce aussi à un réseau de jeunes amis qui sont une vingtaine maintenant, ce qui signifie que quand je suis ici à Hanoï, je ne suis pas seule. C’est en fait un peu une deuxième famille parce que je ne les connais pas seulement comme professeurs mais comme ami, comme mes filles.

Donc mon souci maintenant, c’est de trouver des successeurs. Je ne me fixe pas de limite d’âge. Tant que j’ai l’envie et l’énergie, tant que mon mari accepte que je vienne pendant trois mois que je l’abandonne en France… Mais voilà, après, je crois quand on est responsable, il faut penser à la suite, trouver des jeunes retraités qui soient intéressés, qui soient compétents pour continuer cette mission que j’estime absolument indispensable.

VOV/VNA/CVN

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