>>Mobilisation massive contre le racisme à travers la planète
>>Des milliers de manifestants à Paris contre les violences policières
douard Philippe s'adresse à la presse à Evry, le 9 juin. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Le Premier ministre a passé la matinée à Evry (Essonne), une ville populaire au sud de Paris, ancien fief électoral de Manuel Valls, où il a d'abord rencontré des policiers au commissariat avant de se rendre dans les locaux de l'association citoyenne Générations 2, engagée sur plusieurs fronts dont les relations entre police et population.
Il était notamment accompagné du ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, envoyé la veille en première ligne par Emmanuel Macron, lui-même pressé par l'opposition de se prononcer sur ce sujet sensible, pour annoncer des mesures destinées à améliorer la déontologie des forces de l'ordre.
S'exprimant pour la première fois sur ce sujet depuis le début des manifestations antiracistes et antiviolences policières, Edouard Philippe a reconnu que l'émotion était "très grande, très légitime, très partagée" après la mort de George Floyd. Les images vidéo montrent "la mort d'un homme dans des conditions inacceptables et, à vrai dire, monstrueuses", a jugé le chef du gouvernement.
Un nouvel hommage à George Floyd à l'appel de SOS Racisme a rassemblé mardi soir 9 juin à Paris quelque 12.000 personnes selon les organisateurs, 2.400 selon la préfecture de police, dont plusieurs leaders politiques de gauche. D'autres rassemblements se sont tenus dans plusieurs villes de France comme Bordeaux, Grenoble ou Mulhouse.
Bien que légalement interdites, ces manifestations étaient tolérées car "l'émotion mondiale, qui est saine sur ce sujet, dépasse au fond les règles juridiques qui s'appliquent", a estimé M. Castaner.
Marine Le Pen s'est dite sur Azur TV "extrêmement inquiète de voir la manière dont on fait preuve de complaisance à l'égard de mouvements qui cherchent à importer sur le territoire national des conflits raciaux" et qui sont "appuyés par l'extrême gauche".
Depuis une semaine, des milliers de personnes sont descendus dans la rue pour dénoncer les violences policières en France, en particulier après la mort d'Adama Traoré, survenue en 2016 lors d'une arrestation controversée par des gendarmes.
Edouard Philippe a souligné que la mission des policiers et gendarmes, qui "sont en première ligne" pour "nous protéger tous", était "redoutablement difficile". Car ils sont "confrontés à des tensions, à des menaces à des risques".
"Nous leur devons respect et confiance", comme le fait "l'immense majorité des Français", mais "nous avons également un devoir d'exigence vis-à-vis d'elle", a-t-il ajouté.
"Des actes"
Le PM Édouard Philippe (droite), accompagné par les ministres de l'Intérieur, Christophe Castaner (2e, gauche) et du Logement, Julien Denormandie (2e, droite), rencontre le directeur général de la Police nationale, Frédéric Veaux (gauche), le 9 juin 2020 à Evry. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Le Premier ministre a ainsi rappelé la nécessité de respecter la première phrase de la déclaration des droits de l'Homme : "les hommes naissent libres et égaux en droit, libres et égaux en droit".
"La France, la police nationale, la gendarmerie, ne sont pas racistes. Mais chaque fois qu'un acte, un propos avéré est raciste, il est important que l'ensemble de notre pays réagisse", a insisté M. Philippe dans l'après-midi devant les députés.
"Respect, confiance, exigence, c'est la ligne qui doit prévaloir et c'est la ligne sur laquelle, toujours, je me battrai", a-t-il encore martelé dans l'hémicycle.
Christophe Castaner a prôné lundi 8 juin une "tolérance zéro" du racisme dans les forces de l'ordre, dont la suspension sera "systématiquement envisagée pour chaque soupçon avéré" en la matière. En 2019, "une trentaine d'enquêtes judiciaires ont été engagées contre des policiers sur des propos racistes", a-t-il indiqué mardi 9 juin sur BFMTV.
Le ministre a aussi annoncé l'abandon de la méthode d'interpellation policière controversée de la "prise par le cou, dite de l'étranglement", une décision qui a laissé "dubitatifs" des syndicats de police.
Après sa visite au commissariat d'Evry, et après avoir été interpellé par des élus de l'Essonne sur la question, Edouard Philippe a reconnu que certains policiers avaient fait part de "leur émotion et parfois de leur incompréhension devant un certain nombre de critiques dont ils sont l'objet".
Juste avant l'intervention du Premier ministre, la sœur d'Adama Traoré a elle tenu une conférence de presse à Paris pour réclamer des "actes de Justice" sur la mort de son frère, appelant à de nouveau manifester samedi 13 juin. "On ne demande pas que des discussions se fassent dans un salon de thé de l'Élysée", a déclaré Assa Traoré, en déclinant l'idée d'un rendez-vous avec la ministre de la Justice, Nicole Belloubet.
Comme Jean-Luc Mélenchon (LFI), Christian Jacob (LR) ou Jean-Christophe Lagarde (UDI), le député européen d'Europe Écologie Les Verts (EELV) Yannick Jadot s'est étonné du silence d'Emmanuel Macron sur la question du racisme, l'accusant d'être dans un "déni de la réalité".