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Une personne assise sur un muret près du Sacré Coeur, à Paris dans la nuit du 9 au 10 avril 2020. |
La place Stalingrad, à l'est de Paris, n'a jamais autant mérité son surnom de "Stalincrack". Malgré le confinement, nombreux sont les dealers et toxicomanes regroupés autour des points de deal à deux pas de campements de fortune de migrants en errance ou de SDF qui n'ont que la rue pour gîte.
Pour traverser la zone, Amirouche, agent de sécurité à la RATP, tient plus court la laisse de son chien d'attaque.
"C'est catastrophique, maintenant ils commencent à consommer dès 05h00 du matin, après c'est des zombies pour le reste de la journée, et les embrouilles à n'en plus finir à gérer pour nous dans le métro et les stations. Pour eux, il n'y a pas de confinement, c'est comme si de rien était", explique l'agent à l'AFP.
Poussés à bout par le manque de nourriture ou le sevrage forcé, les utilisateurs de la "salle de shoot" installée dans l'hôpital Lariboisière, au nord de Paris, sont devenus plus agressifs avec les rares passants. L'hôpital a recruté en urgence il y a deux semaines, des agents de protection rapprochée pour escorter ses soignants, en journée, comme le soir.
"Gare du Nord, ok je prends", lâche dans son talkie walkie, l'un des six agents recrutés à la hâte par l'hôpital, avant d'accompagner deux infirmières jusqu'à l'entrée du métro.
Pour 10 euros de recette
Stéphane, assis à l'entrée de sa boutique de sandwiches à Paris, dans la nuit du 9 au 10 avril 2020. |
Dans les rues de ces quartiers populaires, la peur de la maladie compte moins que la peur de tout perdre quand cette parenthèse irréelle prendra fin.
Boulevard Barbès, la sandwicherie de Stéphane est l'un des rares commerces à ouvrir dans ce secteur d'habitude bouillonnant de vie. Le gérant campe chaque soir de 18h00 à 23h00 sur sa chaise et regarde le déprimant boulevard vide.
"En ce moment je fais 20 à 30 euros par soir, c'est rien. Vous savez, j'ai un loyer et on parle de quelques milliers hein", dit Stéphane, qui se cache la bouche dans une écharpe après avoir, dit-il, perdu en un mois "plusieurs dents, à cause du stress".
"Je préfère venir, même pour 10 euros de recette, histoire de pas rester enfermer toute la journée à la maison à stresser. Je suis là, j'attends, on sait jamais, il peut se passer quelque chose, ça peut reprendre, non ?" dit un autre commerçant, Ibrahim, propriétaire depuis 1998 d'une épicerie de quartier, à Pigalle.
Ce quartier bien connu de la capitale est plongé dans le noir. Les ailes du cabaret le Moulin Rouge ont coupé les néons rouges.
Au sommet de la butte Montmartre, la basilique du Sacré-Coeur, se détache dans un ciel remarquablement étoilé pour un ciel parisien. Sur le parvis, Camille, 28 ans, musique dans le casque et cigarette roulée à la main, contemple la vue panoramique sur la capitale.
La Tour Eiffel dans la nuit du 9 au 10 avril 2020. |
"C'est une période un peu compliquée pour moi ce confinement. J'ai mon frère qui a des problèmes et qui dort souvent chez moi, dans mon petit 16 m2", confie l'éducatrice, qui s'accorde tous les soirs ce moment d'évasion.
Les policiers arrivés sur les lieux feront finalement comme tout le monde : des photos de cette vision historique d'un Paris à l'arrêt.
Centre fantomatique
"Du produit à lentilles aux tests de grossesse, on nous demande toujours de tout, épidémie ou pas", explique-t-on à la pharmacie de garde de la place Clichy. La place du nord-ouest de Paris est une première poche de normalité. Outre la pharmacie, un tabac, et un snack qui fait des crêpes salées et sucrées restent ouverts une partie de la nuit.
Ce sera le dernier point d'animation, avant de franchir une frontière invisible qui fait basculer dans un autre Paris : le Paris des arrondissements "à un chiffre", peu résidentiels, donc entièrement fantomatiques.
La place Vendôme à Paris dans la nuit du 9 au 10 avril 2020. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Quant à la place de l'Étoile, connue pour sa circulation chaotique, aucun problème pour s'insérer dans la circulation : il n'y en a pas.