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La Thi Dân (droite) conseille une femme en matière de santé génésique. |
Photo : CB/CVN |
Être sage-femme dans une région reculée et montagneuse n’est pas une sinécure. Malgré un travail d’une importance vitale pour le maintien de la santé maternelle au sein des minorités ethniques, la rémunération est modeste voire dérisoire. Les sages-femmes doivent remplir le rôle de médecins et d’infirmières que l’on trouve dans les hôpitaux appropriés. Elles doivent être joignables à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit, quel que soit le temps, et doivent littéralement traverser des montagnes pour se rendre au chevet d’une femme enceinte dans le besoin.
Pour cela, la seule récompense sur laquelle ces femmes peuvent compter est la gratitude de celles qu’elles aident, motivées par leur véritable désir d’être au service des autres.
Plus qu’un métier, un sacerdoce
La Thi Dân est sage-femme dans la commune de Quang Trung, district de Hoà An, province de Cao Bang. Elle est issue d’une famille de six enfants de Côp My, village le plus défavorisé de la commune, avec un taux de pauvreté oscillant autour de 100%. À 24 ans, elle était déjà mère de deux fils à seulement 12 mois d’intervalle - un “échec de la planification familiale” qu’elle impute au manque de contraceptifs sûrs et disponibles.
Ses fils, comme Mme Dân elle-même ainsi que tous les autres habitants de la commune, ont été nés à la maison. En raison de son éloignement géographique et du manque d’agents de santé obstétrique, l’accès aux soins obstétricaux et infantiles est pratiquement inexistant.
En 2011, Mme Dân a été encouragée par les autorités locales à se joindre à un programme de formation de sages-femmes financé par les Pays-Bas et tenu à la Polyclinique de la province. En six mois, elle et quelque 123 autres femmes venues de 124 communes défavorisées des sept districts de la province ont été formées afin d’être en mesure d’administrer des procédures médicales simples en cas de complications obstétricales et d’offrir des conseils sur la santé maternelle et infantile.
Après plus de cinq ans en tant que sage-femme du village, Mme Dân n’a jamais hésité à retrousser ses manches, que ce soit le jour ou la nuit, sous la pluie ou le soleil et peu importe le nombre de montagnes à franchir pour arriver au chevet des futures mamans. En outre, elle se rend fréquemment dans les villages et les hameaux pour fournir des informations sur la santé et encourager les femmes en âge de procréer à suivre des pratiques de santé reproductive et à accoucher dans des cliniques agréées plutôt qu’à la maison. En tant que native de la région, elle est mieux placée pour transmettre les informations et convaincre les habitants locaux.
Un métier difficile mais mal payé
Un cours de soin des nouveau-nés réservé aux femmes dans le district de Muong Tè (province de Lai Châu). |
Cependant, Mme Dân partage qu’il n’a pas été facile de convaincre sa propre famille de son travail. Elle a fortement été découragée de devenir sage-femme et de devoir se rendre dans des endroits isolés et difficiles d’accès.
Alors que le programme de formation de sages-femmes a connu un succès notable avec une réduction marquée du nombre de mères accouchant à la maison ainsi que de complications et de décès dus à l’accouchement, Mme Dân pense qu’il reste encore beaucoup à faire.
Pour l’instant, ce qui la dérange le plus, c’est qu’il y a encore trop d’habitants de sa région qui demeurent dans l’ignorance et qui ne possèdent pas ou peu de connaissances concernant les soins relatifs à la santé maternelle, et qui choisissent d’inviter des chamanes ou autres gourous à guérir leurs maladies.
De plus, les documents en la matière ne sont "pas aussi efficaces qu’ils devraient l’être" puisqu’ils sont écrits en vietnamien, ce que peu de personnes dans les zones d’ethnies minoritaires sont capables de lire.
D’après La Thi Dân, à l’issue de sa formation en 2009, elle est devenue sage-femme locale et a reçu environ 500.000 dôngs par mois pendant les cinq premiers mois comme “soutien”, mais n’a reçu aucune rémunération depuis. La même chose vaut pour les autres sages-femmes dans le même programme de formation.
Tandis que d’autres sages-femmes formées en même temps qu’elle ont décidé de quitter leurs “postes” dans la commune pour travailler dans des cliniques offrant de meilleurs salaires, La Thi Dân, quant à elle, reste fidèle à sa mission.
"Chaque fois que je vérifie et que j’entends le rythme cardiaque d’un bébé dans l’utérus de sa mère, je suis heureuse. Mieux encore, maintenant nombreux sont les gens qui viennent chez moi pour obtenir des conseils sur la santé génésique, ce qui est vraiment réconfortant et me permet de continuer à faire ce travail", partage Mme Dân.
Pour sa part, Nguyên Thi Lành, directrice adjointe du Centre de soins de la santé génésique de la province de Cao Bang, fait savoir qu’il est regrettable qu’il n’y ait pas de budget officiel pour soutenir les sages-femmes locales. Cela n’encourage pas les femmes à devenir sages-femmes ou à faire en sorte que celles qui le sont déjà puissent poursuivre leur travail sur le long terme.
"J’espère que les autorités compétentes trouveront les mesures nécessaires pour allouer des fonds afin d’aider ces sages-femmes à remplir leur rôle en tant que +bras supplémentaires+ des établissements de santé locaux", indique Mme Lành.
Huong Linh/CVN