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Le "Dry January" commence samedi 1er janvier, une opération qui n'a toujours pas droit au soutien de l'État contrairement à des campagnes de même nature contre le tabagisme. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
"On n'a pas d'aide gouvernementale (et) on est toujours sans moyens", souligne la juriste Claude Rambaud, vice-présidente de la fédération d'associations France Assos Santé, qui chapeaute cette campagne. Lancée pour la troisième année consécutive en France, sur le modèle d'opérations semblables dans le monde anglo-saxon et scandinave, le "Dry January" fonctionne sur un principe simple : ne pas boire d'alcool pendant tout le mois de janvier.
La période est propice à faire une pause, après des fêtes souvent marquées par une importante consommation d'alcool. Mais le but n'est pas seulement de reposer son organisme, c'est de se rendre compte par soi-même de ce qui change dans un quotidien sans alcool. "L'idée, c'est d'essayer de faire cette pause, mais la campagne ne se veut pas du tout moralisatrice : chacun peut essayer de mesurer son rapport à l'alcool pendant ce mois-là", explique Mme Rambaud, craignant toutefois un contexte difficile avec la pandémie de COVID-19 qui perdure dans une ambiance anxiogène.
Ce type de campagne fait de plus en plus ses preuves en matière de santé publique. Au lieu de mettre l'accent sur les risques représentés par une substance - ici l'alcool -, on insiste sur les avantages à ralentir sa consommation. Les participants sont aussi stimulés par un défi qui rassemblent de nombreuses personnes au même moment. "Beaucoup de gens qui font cette pause continuent ensuite" à moins consommer d'alcool, rapporte Mme Rambaud, sur la foi d'études faites dans des pays anglo-saxons.
"Ça lance un élan", insiste-t-elle. C'est le même principe que le "Mois sans tabac", lancé chaque année à l'automne, avec une petite nuance : le Dry January ne vise pas à définitivement inciter à une abstinence totale. Mais, en France, la réalité est bien différente entre les deux opérations. Le "Mois sans tabac" est soutenu depuis des années par l'État, via l'agence Santé publique France, alors que le "Dry January" n'est le fait que d'associations, certes rejointes par plusieurs municipalités comme celle de Lyon.
Pas réservé aux gros buveurs
"Ça n'a rien à voir avec ce qui se passe au Royaume-Uni où ils sont extrêmement soutenus par le gouvernement", regrette Mme Rambaud. Les associations reprochent à l'État de céder aux lobbies de l'alcool, en premier lieu les viticulteurs, qui agitent le spectre d'une campagne hygiéniste et inadaptée à "l'art de vivre" à la française.
Du côté de Santé publique France qui, selon plusieurs sources, avait failli se lancer dans la campagne pour sa première année en 2020 mais y avait renoncé in extremis, le jeu d'équilibriste perdure. L'agence, qui dépend du ministère de la Santé, ne cache pas son intérêt pour le "Dry January" ; elle a mené plusieurs enquêtes sur son déroulement et son vécu par les participants. Mais elle se tient éloignée d'une implication directe.
Santé publique France se place "en soutien" des organisateurs du Dry January, expliquait à l'automne, sa directrice générale Geneviève Chêne, mettant l'accent sur d'autres campagnes de l'agence contre les risques liés à l'alcoolisme. Ces opérations publiques sont, toutefois, plus axées sur les risques liés aux comportements - agressivité, danger sur la route - que ceux qui touchent directement la santé des buveurs.
Or, ces risques pour la santé sont souvent mal appréhendés, comme en témoigne une incompréhension fréquente sur le "Dry January". La campagne ne concerne pas que les gros buveurs car une consommation modérée mais régulière représente aussi un risque pour la santé.
"Pour les non-participants, la cible de l'opération est en priorité constituée des personnes dépendantes ou des jeunes consommateurs qui ne maîtriseraient pas leur consommation", explique une étude réalisée par Santé publique France à partir d'entretiens individuels, et publiée en décembre dans la revue Alcoologie et Addictologie. "Ils ne se sentent donc pas concernés", concluent les auteurs, estimant qu'il y aurait tout à gagner à encore mieux médiatiser le "Dry January".
AFP/VNA/CVN