Mobilisation massive en France contre la réforme des retraites

Au moins 800.000 personnes sont descendues dans la rue jeudi 5 décembre partout en France et des secteurs entiers d'activité ont tourné au ralenti dans le cadre d'une mobilisation massive contre la réforme des retraites, promesse phare du quinquennat d'Emmanuel Macron, avec des incidents dans la capitale.

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À Paris, manifestation contre la réforme des retraites, le 5 décembre.
Photo : AFP/VNA/CVN

La CGT annonçait elle plus de 1,5 million de manifestants dans tout le pays et 250.000 à Paris. Le ministère de l'Intérieur a recensé de son côté 806.000 manifestants, dont 65.000 dans la capitale. Le cabinet Occurrence, qui travaille pour un collectif de médias dont l'AFP, a dénombré 40.500 manifestants depuis un point de comptage sur le parcours du défilé parisien, un chiffre susceptible d'avoir été affecté par les heurts ayant conduit certains manifestants à modifier leur itinéraire.
"C'est beau cette manifestation avec les avocats, les gilets jaunes, les soignants, les pompiers, ça fait plaisir", s'est réjoui Pascal Marichala, chercheur au CNRS venu en famille à Bordeaux, où 20.000 personnes ont battu le pavé selon la préfecture, 53.000 selon la CGT.
"Ca me rappelle 68 ! C'est bourré, il y a plein de monde !", commentait Désiré, 79 ans, 59 ans de militantisme à Lutte ouvrière, dans le cortège parisien qui a dû s'arrêter à plusieurs reprises et a été marqué par des incidents, notamment entre police et "blacks blocs". Une remorque de chantier a été retournée et incendiée aux abords de la place de la République, et plusieurs vitrines brisées, tandis que les forces de l'ordre essuyaient des jets de projectile et répliquaient par des tirs de lacrymogène.

À 18h00, 60 personnes étaient en garde à vue en marge de la manifestation, a indiqué le parquet.
Des affrontements entre policiers et manifestants ont également eu lieu dans plusieurs autres villes, dont Lyon, Montpellier ou Toulouse.
En dépit des incidents, le Premier ministre, 
Édouard Philippe, a "rendu hommage" aux syndicats, notant que dans "un très grand nombre de villes", les manifestations "se sont bien passées".
"C'est une très forte mobilisation dans le public comme dans le privé", s'est réjoui plus tôt Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT.
"On démarre très, très haut", a réagi en début de soirée le secrétaire général de Force ouvrière, Yves Veyrier, sur RTL, appelant le gouvernement abandonner la réforme. Pour FO, cette mobilisation est d'une "ampleur rare, inédite depuis 2010 et 1995".
Le président Emmanuel Macron est "calme et déterminé à mener cette réforme, dans l'écoute et la consultation", a indiqué l'Élysée, précisant que "le Premier ministre s'exprimerait vers le milieu de la semaine prochaine sur l'architecture générale de la réforme".

La manifestation contre la réforme des retraites, le 5 décembre à Bordeaux.
Photo : AFP/VNA/CVN

"Il reste des marges de négociation", a assuré la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye.

À l'origine de la mobilisation, le futur "système universel" de retraites par points, censé remplacer les 42 régimes existants (général, des fonctionnaires, privés, spéciaux, autonomes, complémentaires). L'exécutif promet un système "plus lisible" et "plus juste", quand les opposants craignent une "précarisation" des retraités.
Dans la durée ? 
Plusieurs récents sondages ont montré que le mouvement, à l'appel de la CGT, FO, la FSU et Solidaires ainsi que plusieurs organisations de jeunesse, était majoritairement soutenu par les Français.
Dans les transports, on comptait 90% de TGV et 80% de TER annulés, et 10 lignes du métro parisien fermées. Le taux de grévistes à la SNCF a atteint 55,6% en moyenne, jamais vu depuis 2007, et 85,7% parmi les conducteurs, selon la direction.
Sept des huit raffineries françaises étaient en grève et les compagnies aériennes ont été priées de réduire de 20% leur programme jeudi 5 décembre et vendredi 6 décembre. Air France a annoncé l'annulation de 30% de ses vols intérieurs et 10% de ses moyen-courriers.
Nombre d'écoles sont restées closes. Le ministère de l'Éducation a recensé 51,15% d'enseignants grévistes dans le primaire et 42,32% dans le secondaire. Une partie des enseignants seront de nouveau en grève vendredi.
Grève aussi dans la police à l'appel de plusieurs syndicats. Les fonctionnaires ont effectué un service minimum, bloquant certains commissariats.
Au total, 26% des fonctionnaires étaient en grève à 18h00, selon les services du secrétaire d’État Olivier Dussopt.

À EDF, le taux de grévistes atteignait 41,4% selon la direction. La direction d'Enedis faisait part d'un taux de 60,37% parmi les salariés présents.
Le taux de grévistes a atteint 5% chez Renault, selon la direction, un chiffre plus élevé qu'à l'accoutumé, selon Fabien Gâche (CGT) pour qui "on n'avait pas vu ça depuis longtemps"
À Orange, la CFE-CGC a estimé la proportion de grévistes à 15%, soit "l'un des taux les plus élevés depuis les années 2000".
Éboueurs, avocats, retraités ou transporteurs routiers avaient aussi appelé à l'action. De même que des "gilets jaunes", le PS, LFI, le RN ou le PCF.
"Se mettre un peu sur la figure" 
Des syndicats peu coutumiers des manifestations étaient de la partie, dont des fédérations de l'Unsa, des syndicats de la CFTC et la CFE-CGC.
Seule la CFDT continue de soutenir l'idée d'une réforme "universelle". Mais son secrétaire général, Laurent Berger, a regretté que "la logique qui prévaut, c'est quand même de se mettre un peu sur la figure avant de commencer à discuter".
Les syndicats à l'origine de cette journée doivent se réunir vendredi 6 décembre pour décider de la suite du mouvement. Les transports devraient rester très perturbés : à la RATP, la reconduction du mouvement a été votée jusqu'à lundi  9 décembre et la direction prévoyait 10 lignes de métro fermées, comme jeudi 5 décembre. 
À la SNCF, la direction prévoit encore 90% de TGV et 70% de TER annulés vendredi 6 décembre.

AFP/VNA/CVN

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