Retraites/France
Mobilisation en baisse malgré des manifestants "déterminés"

Après six semaines de conflit et un trafic SNCF revenant progressivement à la normale, la mobilisation a reflué jeudi 16 janvier dans la rue, mais les syndicats opposés à la réforme des retraites s'affirment "déterminés" pour la suite avec un nouveau rendez-vous le 24 janvier.

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Manifestation à Paris le 16 janvier contre le projet de réforme des retraites
Photo : AFP/VNA/CVN

Selon le ministère de l'Intérieur, 187.000 personnes ont manifesté jeudi 16 janvier en France, dont 23.000 à Paris, après 149.000 samedi dernier 11 janvier et 452.000 le 9 janvier de même source. Dans la capitale, ils étaient 250.000 selon la CGT (370.000 le 9 janvier), 28.000 selon le comptage réalisé par le cabinet Occurrence pour un collectif de médias, dont l'AFP (44.000 le 9 janvier). Le cortège s'y est déroulé dans le calme de Montparnasse à la Place d'Italie. La préfecture de police a annoncé avoir procédé à 11 interpellations.

Cette journée, à l'appel de l'intersyndicale (CGT, FO, Solidaires, FSU, CFE-CGC et des organisations de jeunesse), était la 6e depuis le début du mouvement le 5 décembre. Se félicitant jeudi soir 16 janvier de "l'ampleur de la mobilisation et de la multiplicité des actions" dans toute la France, l'intersyndicale a indiqué qu'elle se réunirait de nouveau mercredi après-midi 15 janvier.

À Paris et en régions, ce sont en grande majorité des enseignants qui ont manifesté, malgré des taux de grévistes en baisse dans l'Éducation nationale (6,6% dans le primaire et 6,83% dans les collèges et lycées, selon le ministère à la mi-journée), mais aussi des avocats en robe, cheminots, égoutiers, dockers, salariés du privé ou encore des étudiants et lycéens...

Clarisse Delalondre, rencontrée à Paris, travaille dans la recherche chez EDF. Avec "43 jours de grève dans les pattes", cette déléguée CGT Energie estime qu'"il faut qu'on continue la grève, qu'on la développe même, c'est un mouvement inédit". "On ne peut pas se laisser faire, ce sont nos acquis !" Pour elle, le renforcement de la grève à la Banque de France, dans les raffineries ou dans le privé "donne de l'espoir". "Quand les avocats sont dans la rue contre le gouvernement, c'est le signe qu'il se passe quelque chose dans le pays."

Pour Laure, cheminote de 24 ans encartée à la CGT, "c'est vrai que si on était tous ensemble, avec le secteur privé, ce serait mieux". Mais elle souligne que "dans le privé, c'est dur de faire grève". "La détermination est toujours aussi grande", a assuré le numéro un de la CGT Philippe Martinez. "Il n'est jamais trop tard pour faire céder un gouvernement."

Mais "la lassitude, c'est le risque de ce mouvement", a reconnu Benoît Teste de la FSU. À Dijon, où 2.000 personnes ont manifesté, on pouvait lire sur des pancartes "Après 50 ans c'est difficile, après 60 ans c'est impossible" ou "On ne veut pas perdre notre vie à la gagner".

"Sortir des ambiguïtés"

À Lille, avant la manifestation, une soixantaine de professionnels du secteur paramédical ont jeté leurs blouses blanches devant les locaux de l'Assurance maladie, pour protester contre la perte de leur système autonome.

Un manifestant à Nantes, le 16 janvier, prend pour cible le gestionnaire d'actifs BlackRock, accusé de faire valoir auprès de l'exécutif le régime de retraite par capitalisation, sur le modèle des fonds de pension américains.
Photo : AFP/VNA/CVN

"Nous, on est particulièrement concernés par la question de la pénibilité avec le travail de nuit ou le fait qu'on respire des produits qui ne sont pas très bons", a expliqué Jérémy Colin, 42 ans, opérateur à la raffinerie de Donges, qui défilait à Saint-Nazaire, où des militants CGT côtoyaient des "gilets jaunes". Quatre raffineries sur sept "connaissent des difficultés temporaires dans leurs expéditions", de même que deux dépôts de carburant "sur environ 200", selon le ministère de la Transition écologique et solidaire.

Les accès aux terminaux du port de Nantes-Saint-Nazaire, le premier de la façade Atlantique, étaient toujours bloqués jeudi à l'appel de la fédération CGT ports et docks. Côté transports, à Paris vendredi, deux métros sur trois circuleront aux heures de pointe en moyenne, avec seulement trois lignes sur seize qui fonctionneront normalement.

À la SNCF, la circulation va encore s'améliorer. Le trafic TGV sera "quasi normal" et 8 TER sur 10 sont prévus. L'entreprise ferroviaire est, selon son PDG Jean-Pierre Farandou, "pas très loin du milliard" d'euros de pertes depuis le début de la grève illimitée. Un plan d'économies est prévu pour février. Tombant en pleine saison des achats de Noël, la grève a occasionné un manque à gagner de 70 millions d'euros chez Fnac-Darty et coûté au groupe Casino environ 2% de son chiffre d'affaires du 4e trimestre, selon ces deux sociétés.

Si la mobilisation baisse, elle reste soutenue majoritairement par l'opinion publique, selon plusieurs sondages. Et l'intersyndicale a déjà appelé à de nouvelles actions et manifestations la semaine prochaine, avec une 7e journée d'actions nationale en point d'orgue, vendredi 24 janvier, à l'occasion de l'examen du projet de loi retraites en conseil des ministres. Le futur système universel de retraite "suscite beaucoup d'interrogations", a reconnu jeudi soir 16 janvier sur BFMTV Laurent Berger, le leader de la CFDT.

"Il faut sortir des ambiguïtés, des imprécisions", dire "plus exactement" ce qu'est ce système, davantage "expliquer les transitions" et préciser "comment se finance cette réforme", a-t-il ajouté, en regrettant que sa confédération et lui-même fassent l'objet d'attaques avec des "locaux dégradés" et des "propos dégradants".


AFP/VNA/CVN

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