Marianne Dubuis réinvente la tradition suisse du papier découpé

Marianne Dubuis couche sur le papier ses émotions et ses histoires mais c'est avec une petite paire de ciseaux et un cutter que l'artiste taille de délicats tableaux de vie et réinvente la tradition suisse des papiers découpés.

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L'artiste suisse Marianne Dubuis pose à côté d'une de ses œuvres au Centre suisse du papier découpé à Château d'Œx, en Suisse, le 25 juillet.
Photo : AFP/VNA/CVN

Fleuriste de formation, Marianne Dubuis développe sa vision personnelle, empreinte de poésie et de modernité, de cet art populaire auquel elle s'adonne depuis son enfance.

Sa "passion" l'occupe environ six heures par jour, dit-elle, depuis sa maison lui servant d'atelier à Château d'Œx, le berceau suisse du papier découpé.

À 64 ans, elle a exposé en Suisse, en France, en Allemagne et au Japon, où les papiers découpés ont une longue tradition.

"Je suis très fière du découpage, de ce que cela représente de la Suisse. C'est une manière de représenter nos valeurs, nos racines", explique-t-elle.

Mais "si on reste à refaire toujours les mêmes choses, la tradition meurt", ajoute l'artiste qui tient à la réinventer à sa manière.

Ses œuvres délicates et minutieuses - en noir et blanc ou colorées - dont certaines font plus d'un mètre de haut sont présentées jusqu'au 6 septembre au nouveau Centre suisse du papier découpé, situé dans sa petite bourgade de montagne.

Biographie en dentelle de papier

Originaire d'Asie, l'art du papier découpé se propage en Europe vers le XVIIe siècle. Jean-Jacques Hauswirth, ouvrier agricole mort dans la misère au XIXe siècle, est considéré comme le père de cette tradition en Suisse.

Un détail d'une œuvre de l'artiste suisse Marianne Dubuis au Centre suisse du papier découpé à Château d'Œx, en Suisse, le 25 juillet.
Photo : AFP/VNA/CVN

Il sortait ses ciseaux et papiers récupérés et découpait à la veillée des scènes alpines qu'il laissait en guise de remerciement à ses hôtes.

Ses œuvres ou celles d'autres grands maîtres de cette discipline, Louis Saugy et Christian Schwitzguebel, s'écoulent aux enchères à "plusieurs dizaines de milliers de francs", selon Emmanuel Bailly, de la maison de ventes Beurret & Bailly Auktionen.

Très proche de la nature, Marianne Dubuis, se ressource en forêt et y puise son inspiration. Ses découpages - dont certains se vendent à plusieurs milliers de francs suisses - reflètent ses émotions ou prennent la forme d'une biographie en dentelle de papier.

"Quand j'ai une commande privée pour une personne, elle vient et me raconte sa vie", explique l'artiste.

Vient ensuite le temps du dessin : "Je mets ce que je ressens de cette personne, la quintessence de ce qu'elle m'a raconté".

Elle ne se voit pas comme une véritable psychologue, mais son travail peut aider ou soulager, à l'image, dit-elle, d'une œuvre qu'elle a créée pour un père ayant perdu son fils ou pour un couple sur le point de se séparer mais qui y a renoncé après avoir vu le découpage représentant leur vie commune au fil des années.

De Guillaume Tell à l'ONU

Chez Marianne Dubuis, "il y a quelque chose de l'ordre de la spiritualité", raconte Monique Buri, vice-présidente de l'Association suisse du papier découpé, qui compte environ 500 membres.

L'artiste suisse Marianne Dubuis travaille sur une pièce dans sa maison, à Château d'Œx, en Suisse, le 25 juillet.
Photo : AFP/VNA/CVN

La créatrice allie tradition et modernité pour ciseler aussi la Suisse d'aujourd'hui. Fin 2021, elle crée un découpage carré d'environ 50 cm de côté, représentant aussi bien les héros historiques comme Guillaume Tell que le chocolat, les hélicoptères des compagnies de sauvetage en montagne ou les organisations internationales, comme l'ONU et la Croix-Rouge.

Une ouverture saluée par Pierre Mottier, président de l'association du musée hébergeant le Centre suisse du papier découpé : "C'est très joli de faire des petites vaches et des chamois, mais je trouve que c'est aussi très intéressant de découper d'autres choses".

La modernité a aussi ses dangers, avec un nombre croissant d'entreprises proposant des découpages au laser. Mais Marianne Dubuis n'est pas inquiète : avec le laser, "il y a l'âme qui manque".

AFP/VNA/CVN

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