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Stephanie Williams, cheffe par intérim de la Mission d'appui de l'ONU en Libye (Manul), s'exprime à Genève le 21 octobre. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Plongée dans le chaos depuis la chute en 2011 du régime de Mouammar Kadhafi, la Libye est déchirée aujourd'hui entre deux pouvoirs rivaux: le Gouvernement d'union nationale (GNA), reconnu par l'ONU et basé à Tripoli, et les autorités de l'Est alliées du maréchal Khalifa Haftar.
Ces dernières semaines, les négociations interlibyennes se sont accélérées et une nouvelle session de la commission militaire libyenne conjointe qui doit également définir les conditions d'un cessez-le-feu durable, se poursuit depuis lundi 19 octobre à Genève.
Stephanie Williams, cheffe par intérim de la Mission d'appui de l'ONU en Libye (Manul), s'est déclarée "assez optimiste" sur le fait que les négociateurs parviendraient à "un cessez-le-feu plus durable et permanent".
Elle a annoncé devant la presse des accords sur plusieurs mesures concrètes décidées par les belligérants, comme "l'ouverture des voies terrestres reliant toutes les régions et villes de Libye", avec des "dispositifs de sécurité conjoints".
Pour la population, épuisée par les combats et les divisions, c'est une lueur d'espoir qui permettra aux familles de pouvoir se retrouver après des mois de séparation forcée.
Après une offensive lancée entre avril 2019 et juin 2020 par les pro-Haftar pour s'emparer, en vain, de Tripoli, les principales voies terrestres ont été coupées entre les villes de l'Est et de l'Ouest et les liaisons aériennes intérieures interrompues.
"Impact"
Les combats ont fait des centaines de morts et poussé à la fuite des dizaines de milliers de personnes. Après avoir fait échec à l'offensive, le GNA contrôle aujourd'hui tout l'ouest libyen. Les pro-Haftar, eux, contrôlent l'Est et une partie du Sud.
Vendredi 23 octobre, la compagnie nationale Afriqiyah Airways a effectué un premier vol symbolique entre Tripoli et Benghazi, deuxième ville libyenne située quelque 1.000 km plus à l'Est. Un premier vol Tripoli Benghazi transportant des passagers est prévu vendredi 23 octobre.
Vue de la raffinerie libyenne de Ras Lanouf, le 11 janvier 2017. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Pour Mme Williams, les deux camps ont pris des "décisions importantes" pour la réouverture des routes, la reprise des vols, la facilitation de l'accès aux services vitaux, en particulier le Sud, longtemps en souffrance.
Ces décisions "vont avoir un impact direct et concret sur la vie des Libyens", au moment où "les conditions socio-économiques se détériorent et, bien sûr, la pandémie de COVID-19 augmente exponentiellement dans le pays", a-t-elle ajouté.
L'analyste libyen Mohamed Eljarh estime qu'en vue d'un cessez-le-feu, le volet militaire des négociations est "le plus important". Sans accord de ce type, "toutes les négociations politiques et efforts diplomatiques seront vains et n'auront aucun résultat concret sur le terrain".
Le maréchal Haftar exerce un "meilleur contrôle" que le GNA sur les groupes armés sous son autorité, a estimé M. Eljarh. "Par conséquent, il y aura toujours un écueil dans la mise en oeuvre de tout accord".
Pétrole
Les deux parties ont aussi convenu d'accroître la production de pétrole, en demandant, selon Mme Williams, à leur commandants "de travailler avec le représentant de la National Oil Corporation (NOC, la compagnie publique) pour proposer une restructuration des gardes des installations pétrolières".
Traditionnellement sous l'autorité du ministère de la Défense, ces gardes sont devenus membres de groupes armés aux allégeances changeantes au gré de leurs intérêts et à l'origine de l'insécurité sur les sites pétroliers.
Depuis la levée en septembre du blocus imposé par les pro-Haftar à ces sites, la production pétrolière de la Libye, qui dispose des réserves pétrolières les plus abondantes d'Afrique, a repris et est en nette progression.
Khalifa Haftar avait accepté de lever le blocus à condition d'obtenir un partage équitable des recettes pétrolières. Le blocage depuis janvier a causé plus de 9,8 milliards de dollars (8,2 milliards d'euros) de pertes de revenus, selon la NOC.
Toujours dans ce contexte d'apaisement, Mme Williams a indiqué que les deux camps avaient accepté de "mettre fin à la rhétorique haineuse" dans les médias et sur les réseaux sociaux, d'oeuvrer pour un maintien du calme sur la ligne de front et pour soutenir les efforts pour la libération de prisonniers.
AFP/VNA/CVN