Les «super seniors» étudiés de près pour percer leurs secrets de jouvence

Mary Helen Abbott dessine ses lèvres en rose éclatant, récolte tous les cancans de la maison de retraite et enfile une courte jupette pour son cours de fitness. Elle a 77 ans.

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Mme Abbott glousse lorsque le prof d’aérobic donne ses instructions : «Pavanez-vous! Comme si vous alliez rencontrer une célébrité !» Ni une, ni deux, la douzaine de seniors bombent la poitrine et s’agitent dans le studio d’exercice.

Mme Abbott est ce que les scientifiques qualifient de «super senior». Elle participe à une étude visant à découvrir les secrets pour rester vif d’esprit et en bonne santé à un âge avancé.

Des personnes âgées soulèvent des poids lors d’une session de gymnastique à Cutler Bay en Floride le 9 octobre.

Tandis que certains cherchent les médicaments pour prévenir ou traiter la démence sénile, d’autres comme le neuropsychologue David Loewenstein de l’Université de Miami (Floride, Sud-Est des États-Unis) s’intéressent aux personnes qui y échappent.

«J’étudie la maladie d’Alzheimer, mais si nous voulons percer les mystères du cerveau nous devons également savoir pourquoi certaines personnes vieillissent bien», explique M. Loewenstein.

À cette fin, l’Institut national américain de la santé (NIH) finance une étude sur cinq ans portant sur des personnes entre 63 et 100 ans sans démence diagnostiquée, et qui soit ont une bonne santé mentale soit présentent des signes précoces de perte de mémoire.

M. Loewenstein cite des études ayant mis en évidence qu’environ un tiers des plus de 85 ans souffre de démence. Pour un autre tiers, des examens post-mortem ont révélé la présence importante de marqueurs de la démence - plaques ou nœuds dans le cerveau - alors que ces personnes étaient en forme de leur vivant.

«Comment ces personnes ont-elles pu vivre normalement ? La science n’a pas été en mesure d’y répondre», relève M. Loewenstein. «C’est ce que nous essayons de découvrir».

Sur la centaine de personnes participant à son étude pour l’instant, plus de quarante vivent à East Ridge, un village de retraités avec des paons sauvages évoluant entre les palmiers, des voiturettes de golf se déplaçant au milieu d’espaces verts impeccablement entretenus et de rangées de maisons de plain pied divisées en appartements.

Travail et vie sociale

Vivre là n’est pas bon marché. Les habitants doivent verser environ 111.000 dollars pour s’installer, puis un loyer mensuel d’au moins 2.700 dollars. Quelque temps après son arrivée il y a sept ans, l’ancienne maîtresse de maternelle Gwen North - qui fait dix ans de moins que ses 85 ans - a commencé à s’occuper de la boutique d’occasion. «Je travaille environ six jours par semaine», se réjouit-elle.

À 86 ans, son mari Art est connu pour être celui vers qui se tourner pour papoter, partager une information ou réparer un objet électronique.

Art et Gwen ont passé des tests de mémoire et donné des échantillons de moelle osseuse pour traquer les premiers signes biologiques du vieillissement. Ils ont même prévu de donner leur cerveau à la science.


Qu’est-ce qui les maintient jeunes ?

«Le fait de rester active. Et de bons gènes», répond Gwen. «Simplement travailler. Et ma femme», ajoute Art. Des données scientifiques confirment leurs dires. «Nous savons depuis longtemps que les gens qui travaillent vont mieux que les gens qui ne travaillent plus», a indiqué Laura Carstensen, qui dirige un centre de recherche de l’Université Stanford, lors d’une conférence à Washington.

Une femme jardine dans une résidence pour personnes âgées de Cutler Bay – Federica.

Faire régulièrement de l’exercice et adopter un régime diététique méditerranéen - beaucoup de fruits, légumes, pommes de terre, céréales, huile d’olive, du poisson, peu de viande, fromage au lait entier... - sont également connus pour favoriser un bon vieillissement.

Mary Helen Abbott reconnaît qu’elle n’était pas en forme avant son arrivée à la maison de retraite. Après la mort de son époux, elle a perdu du poids et se sentait seule. «L’une des principales raisons à ma venue ici est que j’en ai eu assez de manger seule», confie-t-elle.

Inégalités en cause ?

Elle est désormais clairement dans son élément. Elle joue au golf chaque lundi, va à l’église en bus chaque week-end, dirige le comité de bienvenue, connait tout le monde...

«Les études épidémiologiques montrent que les gens ayant une vie riche en activités stimulantes au niveau cognitif et des relations sociales ont moins de risque de déclin cognitif au fur et à mesure de leur avancée en âge», souligne M. Loewenstein.

Mais la situation financière est aussi un facteur important. De nombreux habitants d’East Ridge sont éduqués et blancs. Ils ont fait des économies, bien investi et profité de l’essor des prix de l’immobilier.

Les pauvres sont souvent davantage exposés aux ravages du vieillissement. Des études montrent que les Noirs et les Hispaniques ont des taux de démence bien supérieurs à ceux des Blancs.

Selon certains experts, le triplement probable des cas de démence dans le monde d’ici 2050 - 132 millions de cas attendus - pourrait mener à la banqueroute de grandes économies mondiales et paralyser les systèmes de santé.

AFP/VNA/CVN

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