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Un soldat se tient à côté d'une pelleteuse en feu utilisée sur un site d'exploitation aurifère illégale, à Triangulo de Telembi, en Colombie, le 25 janvier. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Plus d'une centaine de membres en uniforme de l'armée, de la police et d'un escadron anti-émeute arrivent à bord de quatre hélicoptères dans la région de Traingulo de Telembi, dans le Sud-Ouest de la Colombie.
Leur mission: détruire les engins de chantier qui permettent à l'Armée de libération nationale (ELN) et à des groupes dissidents des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC), qui rejettent l'accord de paix signé en 2016, de financer leurs activités.
Au milieu de la végétation, dans cette région frontalière avec l'Équateur où l'AFP a pu se rendre, non loin des cratères creusés par les mineurs, huit engins de chantier sont détruits à l'aide d'explosifs ou de grenades.
Au moins 5 km2 de jungle ont déjà été rasés par les engins. Selon le dernier rapport de l'ONU, en 2021, l'exploitation minière illégale a dévasté plus de 640 km2 en Colombie.
"Les groupes armés illégaux (...) tirent profit de cette exploitation aurifère. S'ils ne sont pas les propriétaires directs des engins, ils font en sorte de se faire verser une taxe", explique le major Hugo Nelson Gallego, chef du commandement spécial de la police contre les mines illégales.
Gaz lacrymogènes
Vue depuis un hélicoptère d'un lieu d'extraction illégale d'or à Triangulo de Telembi, en Colombie, le 25 janvier. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Des dizaines de jeunes jettent des pierres sur les forces de l'ordre pour tenter de sauver les bulldozers qu'ils ont durement amenés jusqu'ici. Certains essaient d'éteindre les flammes avec de l'eau. La police anti-émeutes répond avec des gaz lacrymogènes.
Des familles avec leurs enfants observent depuis leurs maisons en bois, où elles luttent pour survivre sous le joug des groupes armés et des effets du mercure, utilisé dans les mines mais qui finit dans les cours d'eaux.
La Colombie fait face à ce type d'exploitation minière illégale d'or, mais aussi de platine, d'argent ou d'autres minerais, depuis 2012. Depuis cette date et sous l'impulsion renouvelée du président de gauche Gustavo Petro, arrivé à la tête du pays en août, plus de 800 engins de chantier utilisés dans des mines illégales ont été détruits.
Vu du ciel, des taches brunes au milieu du vert de la dense jungle montrent les dégâts. L'extraction d'or implique de couper des arbres et de retourner le sol. Des bassins aux eaux troubles trahissent l'utilisation de mercure pour séparer l'or des autres sédiments.
Les mineurs "le déversent dans la rivière (...) et cela a pour effet de contaminer toute la zone où se déroule l'activité", explique le général Javier Africano, du commandement de la lutte contre le trafic de drogue.
Pollution au mercure
Un policier anti-émeute se tient à côté d'un engin de chantier en feu auparavant utilisé sur un site d'exploitation aurifère illégale à Triangulo de Telembi, en Colombie, le 25 janvier. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Malgré la limitation de sa production et de son utilisation depuis 2018, la Colombie est le pays au monde où la pollution au mercure est la plus importante proportionnellement à la population, selon des données officielles.
"Pour l'extraction d'un gramme d'or il faut environ cinq grammes de mercure", explique le major Gallego. Une quantité faible capable cependant de polluer 600.000 litres d'eau.
Selon les autorités, l'or est presque aussi rentable que la drogue en raison de la difficulté de remonter à son origine.
Selon les estimations officielles, 85% de l'or exporté par la Colombie est extrait illégalement. "Il est probablement destiné à l'Amérique du Nord et à l'Europe", estime le général Africano.
L'opération menée dans la région de Triangulo de Telembi a entraîné des pertes pour les groupes armés équivalant à quelque 794.000 USD, selon l'armée. En 2022, les pertes qui leur ont été infligées ont avoisiné les 14 millions d'USD.
"Tous les contrôles visent la drogue" en Colombie, premier producteur mondial de cocaïne, "mais l'or est beaucoup plus facile à déplacer", souligne le militaire Carlos Romero. Une personne peut se rendre à l'aéroport avec "ses chaînes, sa montre et passer au détecteur de métaux sans aucun problème parce que c'est un bijou", déplore-t-il.
AFP/VNA/CVN