Les jeunes vietnamiens face aux discours de haine sur Facebook

En 2004, Mark Zuckerburg a lancé Facebook, un réseau social à l’impact immense. Ce site sert non seulement à communiquer et à s’informer mais aussi à s’exprimer.

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Réaction de Minh Tiêp devant les insultes qu’il a reçues. Il a écrit: "Moi, je vous insulterai en retour, vous savez?"; "Aujourd’hui, les journaux ont précisé beaucoup de choses, mais pourquoi vous continuez à m’attaquer? Cela n’a aucun lien avec moi et ma Villa Wings, arrêtez de faire ça, s’il vous plaît".
Photo: ST/CVN

Malgré ses nombreux avantages, Facebook oblige parfois les usagers à devoir faire face à certains problèmes, en particulier des discours de haine qui touchent de plus en plus de jeunes vietnamiens.

En ce qui concerne la définition des discours de haine en ligne, les avis divergent. Mais on peut brièvement comprendre qu’il s’agit de propos publiés sur le web qui attentent à la réputation, à la personnalité et aux droits légitimes d’un individu ou d’un groupe spécifique. Ils peuvent rester longtemps en ligne, sous forme de publications accompagnées ou non de photos, d’un commentaire ou d’un message. Ils peuvent aussi être effacés, republiés et diffusés par un ou plusieurs auteurs.

Pour mieux comprendre cette situation, j’ai mené une petite enquête auprès des utilisateurs de moins de 30 ans en la partageant dans les groupes Facebook des universités et communautés vietnamiennes des fans de K-pop et LGBT+. Le résultat est inquiétant car 55,6% des personnes interrogées affirment souffrir de propos haineux. Les problèmes abordés concernent souvent des controverses tenant à un sujet quelconque (86,7%), à leur classe sociale (48,8%), à leur orientation sexuelle (40%), au sexe (33,3%) et à leur apparence (11,1%). Races et religions n’occupent qu’une petite place dans ce classement.

Comme dans les autres pays, les discours de haine peuvent nuire aux utilisateurs et à leur entourage. 86,7% des personnes interrogées sont d’accord avec le fait que ces agressions verbales grèvent leur réputation. 71,1% d’entre elles affirment qu’elles peuvent entraîner du stress et des pathologies psychologiques. 51,1% pensent qu’elles sont à l’origine de conflits et de comportements violents.

Ces conséquences trouvent leurs meilleures illustrations dans les exemples suivants. Un compte nommé PHT a raconté: "Quand j’étais au lycée, un de mes camarades était en couple avec une lycéenne plus âgée. Celui-ci était à l’époque célèbre pour ses conquêtes. Alors, ce couple a reçu bon nombre d’insultes d’amis sur Facebook. La fille, trop stressée et lassée, a décidé de mettre fin à leur relation après quelques semaines seulement".

Un autre cas, c’est celui de TL: "Les anti-fans médisent souvent de mes idoles sur Facebook. Ils utilisent fréquemment de gros mots, voire des insultes. Cela peut affecter leur réputation et leur carrière. La protection de l’image personnelle leur est très importante".

C’est également le cas de l’animateur Minh Tiêp de la chaîne vietnamienne de télévision par câble VTC. Celui-ci, confondu avec un autre animateur qui porte le même prénom et qui faisait scandale à l’époque, a été verbalement agressé sur son journal Facebook. Par la suite, certains ont retourné les vêtements qu’ils avaient achetés chez lui, d’autres ont refusé de répondre à ses questions quand il faisait un reportage.

Éducation: solution efficace

Depuis la création de Facebook, gouvernements, administrateurs et entreprises gestionnaires ont fait beaucoup d’efforts pour diminuer les discours de haine. Mais au Vietnam, les solutions ne semblent pas encore efficaces.

D’une part, les prescriptions visant à protéger les utilisateurs des réseaux sociaux ont été mises en place dans le système juridique vietnamien mais elles restent abstraites aux yeux des jeunes d’aujourd’hui. En effet, malgré leur présence dans les programmes scolaires d’éducation civique de terminale, les lycéens ne s’y intéressent guère. Ils ne les apprennent que pour leurs examens. À ajouter que dans mon enquête, seulement 40% des personnes sondées comprennent bien ce que sont les discours de haine. Pour la plupart, ce ne sont que des insultes ou des propos ironiques. Or, les propos qui "portent atteinte à la réputation, à la personnalité et aux droits légitimes d’un individu ou d’un groupe spécifique" comportent différentes formes: insultes, propos ironiques et aussi fausses informations.

D’autre part, les fonctions de Facebook "Signaler" et "Donner votre avis sur cette publication" ont leurs limites. On ne peut pas nier que grâce à ces utilités, les utilisateurs peuvent masquer des contenus inappropriés, bloquer leurs auteurs et leur envoyer des messages privés. Mais elles ne permettent pas de préciser à quel point ce sont des propos haineux ou irrespectueux. Et encore, toutes les signalisations sont temporaires. Si ces contenus n’enfreignent pas les conditions d’utilisation, tout reviendra comme avant.

Puis, selon mon enquête, 86,7% des personnes interrogées affirment que les discours de haine dont ils souffrent viennent de controverses sur un sujet quelconque. Autrement dit, la plupart des propos haineux se trouvent parmi les commentaires. Mais dans les faits, si ces derniers sont inappropriés, on ne peut que les masquer.

De plus, il faut également souligner que certains utilisateurs vietnamiens ont tendance à considérer Facebook comme un espace d’expression libre: il est possible de profiter de la fonction "Confidentialité" et d’un compte anonyme. Ils publient donc tout ce qu’ils veulent et ignorent les conséquences.

Il n’est pas facile de lutter contre les discours de haine en ligne car ceux-ci s’attachent toujours à la liberté d’expression. Mais on peut quand même les éclipser. Quelque 91,1% des personnes interrogées dans le cadre de mon enquête pensent que les attitudes adoptées en ligne sont aussi importantes que dans la vie réelle et 97,8% sont favorables à la protection des victimes. Les propositions les plus approuvées sont le renforcement de l’éducation civique, notamment en ce qui concerne la vie virtuelle et le développement de l’esprit critique; la prise de sanctions contre l’auteur des discours de haine; des signalements plus actifs de la part des utilisateurs. Et le plus important, c’est que tout le monde doit savoir se contrôler.

Finalement, jeunes vietnamiens, utilisez d’abord votre cerveau avant de bouger vos doigts!

Dào Phuong Loan/CVN

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