États-Unis
Les entreprises américaines face à leurs promesses de lutte contre les discriminations raciales

Après la mort de l'Afro-Américain George Floyd, les grandes entreprises ont fait des promesses ambitieuses sur la lutte contre les discriminations raciales aux États-Unis. Près d'un an plus tard, certains actionnaires leur demandent des comptes.

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Une banderole "Black lives matter" sur la façade d'un immeuble, le 20 avril à Washington.

Dans les prochaines semaines, des résolutions inhabituelles seront présentées lors des assemblées générales : Walmart doit-il démontrer l'équité de sa grille salariale ? Facebook et Alphabet doivent-ils nommer un spécialiste des droits civils à leur conseil d'administration ?
Plusieurs propositions de résolutions demandent aussi aux entreprises de présenter un audit sur l'équité raciale dans leur rapport annuel.
"Un bon nombre d'actionnaires reconnaissent qu'il s'agit d'un problème pouvant endommager la réputation d'un groupe de façon significative", souligne Tejal Patel de CtW Investment Group, un groupe d'actionnaires activistes spécialisé dans les questions de gouvernance.
Si elles n'ont pas été adoptées, les résolutions appelant à un audit sur l'équité raciale ont tout de même recueilli environ 30% des voix, voire plus, lors des assemblées générales de Citigroup, JPMorgan Chase, Goldman Sachs et Johnson & Johnson.
Déserts bancaires
Dans la foulée des manifestations contre les violences policières et le racisme après les morts successives de Breonna Taylor, abattue dans son appartement par des policiers de Louisville, et George Floyd, mort sous le genou d'un policier à Minneapolis, de nombreuses entreprises avaient rapidement émis des communiqués soutenant le mouvement Black Lives Matter ("Les vies noires comptent").
Elles promettaient aussi d'être plus attentives aux besoins des clients et employés non blancs.
Dans la mesure où les grandes sociétés américaines sont encore largement dirigées par des hommes blancs et peinent à accroître la diversité aux plus hauts niveaux, certains activistes ont accueilli ces déclarations avec scepticisme.
CtW et le syndicat représentant les salariés du secteur des services SEIU ont préparé des résolutions présentées aux actionnaires de huit grands établissements financiers.
Les banques du pays sont régulièrement accusées de discriminations dans l'octroi de prêts ou de snober les centre-villes, créant ainsi des "déserts bancaires" pour certaines catégories de population.

Un magasin Walmart en août 2020 à Washington.

Les résolutions appelaient à un examen approfondi de toutes les pratiques pouvant désavantager les personnes non blanches.
"Je crois que si quelqu'un y met son nez, ce sera plus transparent", estime Toni Smith, une Afro-Américaine de La Nouvelle-Orléans.
Quand elle a eu besoin de prêts pour l'achat d'une voiture et d'équipements professionnels, elle a eu l'impression que sa banque, Chase, la décourageait.
Elle peine désormais à rembourser des prêts à plus de 20% d'intérêts accordés par d'autres organismes.
"Si vous n'avez pas déjà de l'argent d'avance, on ne vous offre pas les opportunités", regrette-t-elle. "On n'arrive pas à avancer."
Les organisations de lutte contre les discriminations raciales mettent régulièrement en avant les difficultés des Afro-Américains à produire de la richesse au fil des générations en raison d'un manque d'accès au crédit et de pratiques racistes dans l'immobilier.
Audit indépendant
Il est essentiel que tout audit sur la question des discriminations raciales soit indépendant, estime M. Patel.
Chez Facebook, un tel audit a été entre autres préparé par une ancienne membre de la puissante association de défense des droits civiques ACLU, Laura Murphy.
Celle-ci a reconnu que Facebook avait bien pris "des mesures positives et importantes" contre l'intolérance ou la falsification des résultats des élections, mais a aussi mis en avant des décisions "problématiques" en matière de droits civiques, en particulier concernant des messages de l'ancien président américain Donald Trump.
Quand Morgan Stanley et BlackRock ont accepté le principe d'un audit, CtW a retiré ses résolutions.
Les six autres établissements financiers ont choisi de lutter contre les résolutions préparées par CtW en mettant en avant leurs récentes initiatives destinées à lutter contre les discriminations.
JPMorgan Chase a ainsi annoncé en octobre vouloir dédier 30 milliards d'USD à cette cause, notamment en garantissant l'octroi de prêts immobiliers à 40.000 ménages noirs ou latinos.
Mais la banque a une "histoire compliquée" sur le sujet, selon CtW qui met en avant les 55 millions de dollars versés en 2017 pour solder des accusations de discriminations aux prêts immobiliers ou les dons aux fondations des polices de New York et de La Nouvelle-Orléans.
"Nous estimons que nous prenons les mesures nécessaires pour régler les problèmes évoqués dans la résolution", a rétorqué JPMorgan en rejetant l'intérêt d'un audit sur le sujet.
Lors de l'assemblée générale des actionnaires mardi 25 mai, son PDG Jamie Dimon a affirmé que faire progresser l'équité raciale était "complexe" mais que la banque était "déterminée à faire ce qu'il fallait" pour y parvenir.
La résolution de CtW a, quelques minutes plus tard, reçu 39% des votes.

AFP/VNA/CVN

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