>>"The Bamboo Talk": quand les bambous rencontrent la musique expérimentale
Le sculpteur sur bois Huynh Phuong Do |
Photo: CT/CVN |
Pour nombre de touristes, la ville de Hôi An (province de Quang Nam, Centre) est une destination de charme qui laisse dans leur mémoire des souvenirs inoubliables. Ses petites rues paisibles bordées de jolies maisons à toit de tuiles, ses vieilles pagodes et autres ouvrages architecturaux de style japonais ou chinois… plongent le visiteur dans une atmosphère désuète que l’on ne retrouve nulle part ailleurs au Vietnam. Ses produits artisanaux originaux tels que lampions, poteries, figurines en terre cuite, sculptures sur bois, articles en soie naturelle, broderies… complètent le tableau de ce "retour vers le passé".
Huynh Phuong Do, sculpteur sur bois, passe ses journées à tailler dans les racines de bambou des têtes humaines hilares et barbues. Des personnages qui, dit-on, apportent paix et bonheur à leurs propriétaires.
De la racine brute au visage avenant
Sis rue Bach Dang, ville de Hôi An, l’atelier-boutique de l’artisan Huynh Phuong Do accueille chaque jour une centaine de visiteurs, vietnamiens et étrangers. Sur les étagères trônent d’innombrables têtes sculptées, toutes arborant une barbe longue, touffue et raide formée par les racines du bambou. On peut y identifier des personnages religieux dont des Bouddhas, les trois génies (du bonheur, de la générosité et de la longévité), des héros légendaires…
''Ce sont vraiment des œuvres d’art. Ces visages en train de sourire ou de méditer sont très expressifs'', observe avec admiration un visiteur étranger.
Huynh Phuong Do a confié que c’est par le plus grand des hasards que l’idée de sculpter des têtes de bambou lui est venue. "Un jour, voici quelques années, j’ai vu sur la rivière Hoài en crue des racines de bambou emportées par le courant et échouées sur la rive. Mes yeux de sculpteur ont vu là une intéressante matière à création", se rappelle-t-il.
Emportant ces racines chez lui, l’artisan a décidé d’y tailler des têtes barbues. "Ces têtes sont drôles mais aussi très impressionnantes. En les contemplant, j’imagine des bouddhas ou des génies bien connus des Vietnamiens, qui arborent souvent un large sourire", confie-t-il.
Selon lui, pour pouvoir créer des têtes expressives, il faut d’abord bien choisir la racine. "Chacune a sa propre forme, et celle-ci oriente le sculpteur dans le choix d’un personnage. Il faut savoir utiliser les caractères uniques de la racine pour créer", révèle Huynh Phuong Do.
À chaque tête son identité
Les Bouddhas en racines de bambou attirent des touristes lors de la visite de Hôi An |
Photo: CT/CVN |
À cause de l’urbanisation galopante autour de Hôi An, les massifs de bambou ne sont plus aussi abondants qu’autrefois. Huynh Phuong Do est obligé d’en faire venir de localités campagnardes parfois éloignées. Le traitement de la racine demande pas mal de travail: il faut d’abord la laver soigneusement en conservant intacts les fragiles brins qui formeront la barbe, avant de couper les blocs de racines en unités isolées, puis les faire sécher au soleil.
"Avant de me mettre au travail, j’examine la racine sous tous les angles pour comprendre ses traits particuliers, qui donneront naissance à tel ou tel personnage. C’est pour cette raison que chaque tête a son identité propre", confie le sculpteur. Normalement, une œuvre nécessite deux ou trois jours de travail. "Il y a aussi des clients qui m’ont demandé de sculpter leur tête. Ils ont toujours été contents du résultat!", se vante-t-il.
Actuellement, l’atelier de Huynh Phuong Do produit une douzaine d’articles par jour. Sa production représente 80% du marché de Hôi An. Il possède une vingtaine de boutiques aux quatre coins de la ville, qui vendent chaque mois 300-400 sculptures, au prix de 150.000-400.000 dôngs/pièce. Bon nombre de ses œuvres ont pris la route de l’étranger dans le bagage des touristes.
Ces derniers temps, le sculpteur a ouvert des cours d’apprentissage gratuits au profit des jeunes locaux, avec 70 artisans formés. "Je suis heureux de voir mes articles autant prisés des touristes. J’ai un souhait ardent, c’est de transmettre ce nouveau métier aux jeunes de Hôi An", confie-t-il.