>>Préserver la biodiversité du système lagunaire de Tam Giang-Câu Hai
Lê Van Hiêp et son restaurant "Dâm Chuôn hôi quán". |
Photo: NVCC/CVN |
Le marais de Chuôn fait partie de la vaste lagune de Tam Giang, située dans la commune de Phú An, district de Phú Vang, province de Thua Thiên-Huê (Centre). Au-dessus de cet immense territoire d’eaux saumâtres battu par les vents ont émergé ces dernières années des dizaines de restaurants sur pilotis. Un espace agréable et esthétique qui attire de plus en plus de touristes, heureux de contempler à loisir un paysage unique tout en goûtant des spécialités culinaires locales.
L’œuvre d’un "bambousiasthe"
À leur arrivée à l’embarcadère, les visiteurs sont attendus par des sampans qui les amènent à travers un dédale de pieux de bambou vers tel ou tel restaurant. Façades, planchers, toits, ponts, pilotis…, tout est en bambou. D’une superficie parfois de plusieurs centaines de mètres carrés, chaque établissement est capable d’accueillir des centaines de convives.
Ces ouvrages sont le fruit du travail d’un habitant local de 40 ans, Lê Van Hiêp, qui a fait lui-même la conception et dirigé la construction. Un pêcheur pauvre, qui a dû abandonner ses études quand il était en 6e classe (soit la première du collège) pour commercer à gagner sa vie.
"Avant les années 1980, comme la plupart des gens de Phu An, ma famille pratiquait la pêche sur la lagune de Tam Giang, raconte Lê Van Hiêp. Et puis, la tempête Cecil de 1985 a bouleversé notre vie. Des centaines de maisons furent détruites, autant de bateaux de pêche et de sampans abîmés et coulés…". Ce fut une période difficile pour ces familles de pêcheurs qui, avec l’aide des autorités locales, se sont déplacées dans un secteur plus haut, près d’une forêt de… bambou. Et au fil des années, le bambou s’est lié étroitement à leur vie, en tant que matières premières pour la construction de maisons, de sampans, d’outils de pêche et, finalement, de maisons sur pilotis.
Et c’est ainsi qu’est apparu à Phu An un nouveau métier artisanal, celui de "bamboutier"… dont Lê Van Hiêp est parmi les plus dignes représentants. "C’est après mon mariage que j’ai construit pour ma petite famille une maison sur pilotis au bord du marais. Ce fut ma première construction en bambou", se rappelle-t-il.
Avec le temps, ce simple "artisan-bamboutier" est devenu "architecte-bamboutier", surnom amical donné par la population locale.
Des restaurants sur pilotis en bambou à Huê (Centre) conçus par Lê Van Hiêp. |
Photo: Huong Linh/CVN |
Les commandes affluent
Ces dernières années, la lagune de Tam Giang a connu un afflux croissant de touristes vietnamiens et étrangers. L’idée de bâtir des restaurants est alors venue dans la tête de Lê Van Hiêp. Soutenue par des restaurateurs, elle a rapidement été concrétisée. En quelques années, une dizaine de restaurants ont émergé des eaux saumâtres, chacun avec son propre style. Le bambou garantit à l’ensemble une certaine harmonie qui ne gâche pas le paysage, bien au contraire.
L’année passée, le bonze supérieure Thích Thanh Toàn, gérant de la pagode de Nga Hoàng, dans le district de Tam Dao, province de Vinh Phúc (Nord), est venu à Phu An pour contempler les constructions inédites de Lê Van Hiêp. Séduit par la beauté des ouvrages, il a passé une commande singulière: construire à Tam Dao une pagode en bambou!
"Notre groupe de neuf artisans est venu sur place. En trois mois, nous avons achevé la construction de la pagode de Nga Hoàng, longue de 32 m et large de 18 m. L’architec-ture, à la fois traditionnelle et charmante, est en harmonie avec l’environnement, un paysage de collines", raconte Lê Van Hiêp. Sans cacher sa fierté, il informe sur un autre ouvrage au-dessus de l’eau qu’il a construit à Lang Cô en début d’année: "C’était une commande d’un investisseur de Thua Thiên-Huê. Notre groupe d’artisans a réussi à dresser un beau restaurant sur pilotis dans le marais de Lâp An, relevant du bourg de Lang Cô".
Actuellement, l’équipe de Lê Van Hiêp s’attèle à la construction d’un restaurant dénommé "Ðâm Chuôn hôi quán", c’est-à-dire "restaurant et lieu de réunion de l’Association religieuse du marais de Chuôn". L’ouvrage, de 500 m², est sur le point d’être achevé. Il comprend aussi une jolie tour de cinq étages en miniature. Sous un soleil de plomb, Lê Van Hiêp et ses ouvriers tronçonnent des tiges de bambou et donnent les dernières touches aux jolis motifs ornementaux de l’ouvrage.
La créativité de l’"architecte-bamboutier" semble inépuisable. "Ces constructions diversifiées, j’en suis fier bien sûr. Mais celle que j’aime le plus, c’est un ouvrage en miniature, la pagode de Thiên Mu, très connue à Huê comme vous le savez, que j’ai confectionnée avec soin au temps où je commençais ce métier. Cela reste mon meilleur souvenir, confie Lê Van Hiêp avec un sourire.
Nghia Ðàn/CVN