À une quarantaine de kilomètres du centre-ville de Hanoi se dresse un village multiethnique. Originaires de différentes ethnies et domiciliés aux quatre coins du pays, les figurants viennent ici pour des séjours de 15 à 20 jours… Vêtus de leurs costumes traditionnels, replacés dans un "décor naturel" qui n’a rien à envier à celui de leur village natal, ils ont pour mission de ne surtout rien changer à leurs us et coutumes, et de vivre comme ils le font dans leur village natal. La seule différence, c’est que leurs moindres faits et gestes sont observés par des visiteurs...
Village culturel et touristique des ethnies du Vietnam. Un nom qui restitue bien ses deux fonctions : à la fois préserver les identités culturelles de ces groupes ethniques, et les présenter aux visiteurs qui n’ont pas forcément le temps de partir aux quatre coins du pays pour les découvrir. Là, vous avez toutes les ethnies du pays devant les yeux, comme dans un grand livre que vous parcourez... à pied.
La maison commune des 54 ethnies
Dans tous les pays du monde happés par le développement à tous crins, conserver les traditions et faire connaître l’histoire nationale sont devenus un enjeu. Car avoir des racines et savoir d’où l’on vient sont aussi importants que de savoir où l’on va. Les musées et les monuments historiques sont faits pour cela : nous rattacher au passé. Le Village de la culture et du tourisme des ethnies du Vietnam est bien mieux qu’un musée, c’est un espace de vie où évoluent des êtres humains en chair et en os, et non pas des mannequins en carton-pâte. Un espace extraordinaire, unique au Vietnam, où le mot "découverte" prend tout son sens.
Mis en chantier en 2007 à Dông Mô, à 40 km à l'ouest du centre-ville de Hanoi, il a été inauguré en 2010 en l'honneur du Millénaire de Thang Long-Hanoi. Ce site couvre 1.544 ha (dont 939 ha de plans d'eau) et sera achevé en 2015.
L'ouverture de ce village culturo-touristique a constitué un événement important dans la vie culturelle nationale, de celle des différentes ethnies notamment. C'est non seulement la maison commune des 54 ethnies du Vietnam, mais aussi un centre d'échanges culturels, sportifs et touristiques, axés autour de la préservation et de la valorisation de la culture traditionnelle de ces ethnies.
Solidarité et compréhension interethniques
Si reproduire à l’identique des maisons traditionnelles des ethnies bien loin de leur contrée d’origine afin de les présenter n’est pas franchement nouveau (par exemple au Musée d’ethnographie à Hanoi), y faire vivre des gens à l’intérieur est vraiment novateur, au moins au Vietnam. Chaque mois, un groupe de telle ou telle ethnie vient s'y installer pour une durée de 15 à 20 jours. À l'heure actuelle, le village compte une cinquantaine de groupes ethniques et des dizaines de milliers de touristes ont déjà pu les admirer.
Chaque ethnie a une zone particulière, appelée "hameau". Et pour visiter le village entier, il faut consacrer une journée entière. L'entrée est gratuite. Les adeptes de la marche à pied sont ravis car le parc s’étend sur plus de 600 ha...
Ici, les représentants des diverses ethnies continuent de mener leurs activités culturelles et spirituelles qui sont les leurs dans leur village natal. Ils se retrouvent souvent lors de soirées colorées, rythmées par les sons des gongs, des chants... Durant la journée, ils vaquent à diverses occupations : artisanat, riziculture, pêche, célébrations des naissances...
Bô Alê Soai, originaire de l'ethnie Raglai, domicilié dans le hameau de Châu Ðac, commune de Phuoc Ðai, district de Bác Ái, province de Ninh Thuân (Centre), confie gaiement : "Nous venons de fêter notre nouvelle maison ici et la nouvelle saison du riz après une année de travail fatigant. Après la cérémonie de la crémaillère, nous allons célébrer la nouvelle maison de l'ethnie Co, à côté".
Lorsqu’ils viennent s'installer dans le village, ils apportent avec eux leurs instruments de travail et de musique, tels que gongs (ethnie Co), instrument à cordes chapi et trompette bâù (ethnie Raglai), et même... jarres d'alcool pour festoyer le soir. À travers ces activités communautaires, menées sous les yeux des visiteurs ou non, des liens forts se sont tissés. Renforcer la solidarité et la compréhension interethniques, c’est aussi un autre but de ce village. Car en dehors de celui-ci, les opportunités pour qu’un montagnard de l’ethnie H’Mông puisse rencontrer un jour un membre de l’ethnie Cham ou Khmer sont, vous en conviendrez, des plus ténues !
Dans le hameau de l'ethnie Co, le patriarche Hô Ngoc Quang, 94 ans, de la commune de Ngoc Thuy, district de Trà Bông, province de Quang Ngai (Centre), exprime sa fierté de vivre de temps en temps dans ce village qui, bien que construit dans la capitale, présente toutes les caractéristiques architecturales de ceux de sa terre d’origine. "Nous vivons ici à Hanoi comme si nous étions dans notre village natal", confie-t-il.
Préserver l'identité et l'unité nationales
Lors de l’inauguration du village, le Premier ministre Nguyên Tân Dung a déclaré : "Pendant les milliers d'années de lutte pour l'édification et la défense du pays, les 54 ethnies sont toujours restées unies et solidaires, partageant cette même aspiration : indépendance, liberté, bonheur. Elles ont surmonté des milliers de difficultés, se sont sacrifiées, ont énormément contribué à l'œuvre de défense et d'édification de la Patrie. Sous la direction du Parti, conduit par le Président Hô Chí Minh, nos 54 ethnies ont continué de démontrer leur patriotisme, leur fidélité inébranlable, leur volonté de faire triompher la Révolution. Elles ont remporté de grandes victoires, embellissant l'histoire de notre peuple, de notre pays".
En effet, durant toute cette période historique marquée par les privations et les sacrifices, mais ô combien glorieuse, les 54 ethnies n'ont cessé d'édifier, de consolider et de renforcer la culture nationale, une culture qui puise sa richesse dans sa diversité.
Le Village de la culture et du tourisme est non seulement la maison commune des 54 ethnies du Vietnam, mais aussi un lieu d'enseignement des traditions, de la culture et de l’histoire nationales.
NGUYÊN HÔNG NGA/CVN