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Un homme utilisant son portable dans le métro de Paris, le 25 août 2015. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
"Nous avons été sur une tendance déflationniste durant cinq ans et l'on sent qu'elle peut s'inverser. Certains opérateurs font de la croissance, d'autres n'en sont pas loin, le marché à cessé de décroître, même si les situations restent contrastées", analyse Nicolas Teisseyre, "senior partner" de Roland Berger.
Signe de cette tendance, le troisième opérateur, Bouygues Telecom, présenté jusqu'ici comme le plus faible des quatre, a vu tous ses voyants passer au vert, avec un retour au bénéfice net et une hausse de 6% de son chiffre d'affaires, quand sa marge d'excédent brut d'exploitation (Ebitda), particulièrement observée dans le secteur, progresse de 3 points.
Même à SFR, la perte nette annuelle masque une embellie importante sur le dernier trimestre 2016, avec une hausse du chiffre d'affaires, mais également du nombre d'abonnés mobile, une première depuis le passage sous le pavillon Altice, en 2014.
"On remarque que ceux qui sont concentrés sur les fondamentaux du métier vont mieux. Il continue à y avoir de la croissance des volumes et les ARPU (revenu par abonné, NDLR) sont en voie de stabilisation", constate Thomas Coudry, analyste télécoms de Brian, Garnier & Co.
SFR, contrairement à Bouygues, ne profite pas encore de l'embellie. |
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Au point d'estimer que "la boucherie est terminée" ? Pas réellement, estime M. Coudry : "plus de 4.000 personnes doivent encore partir de SFR, les réductions d'effectifs sont toujours en cours".
Mais de l'avis de tous, les opérateurs profitent des investissements réalisés, tant sur le fixe que sur le mobile, au cours des dernières années, en particulier Orange.
Les investissement dans la fibre du premier opérateur français ont été massifs, au point d'attirer l'attention de l'Autorité de régulation des télécoms (Arcep), qui craint désormais le retour d'une forme de monopole de fait dans certaines zones du territoire.
"L'accélération des investissements semble être une bonne stratégie. Les investissements dans le fixe, en particulier, sont extrêmement rentables" et peuvent également l'être dans le mobile, détaille Nicolas Teisseyre.
Marché mouvant
La seule exception au tableau est SFR. La filiale d'Altice a annoncé avoir investi plus de deux milliards d'euros dans ses réseaux en 2016, après deux années d'investissements moindre du fait de sa réorganisation après son rachat en 2014, mais n'en profite pas encore.
"SFR avait un peu délaissé ce point pendant un moment, mais s'y est attaqué d'arrache-pied en 2016. Il faudra cependant du temps pour que cela porte ses fruits. Les contenus pourront ensuite faire la différence, mais uniquement avec de solides fondamentaux", estime M. Coudry.
D'autant que, dans l'intervalle, ses concurrents tentent de conserver leur dynamique et de capitaliser sur leur stratégie.
"Cela reste cependant un marché hyper concurrentiel, très mouvant, une véritable course d'obstacles. Les chiffres peuvent évoluer rapidement, d'un trimestre sur l'autre", ajouté M. Teisseyre.
Car à peine l'échec du rachat de Bouygues Telecom par Orange acté, les promotions sont reparties sur le secteur, parfois très agressives, avec la période de Noël en point d'orgue.
"Je ne peux m'empêcher de faire un parallèle avec ce qui s'est passé sur la télévision payante il y a une dizaine d'années, Canal+ a asséché le marché à coup de promotions pour finalement contraindre TPS à se vendre. Nous sommes un peu dans la même situation", analyse Julien Miniconi, analyste télécoms pour le cabinet Wavestone.
Or, pour de nombreux experts, et les rumeurs régulières de reprise des négociations entre les opérateurs le démontrent, le marché reste difficile pour quatre opérateurs.
"La consolidation est peut-être un peu moins nécessaire et Bouygues Telecom est sans doute plus en situation de force, mais elle représenterait toujours le même intérêt et les mêmes bénéfices pour l'ensemble des acteurs", selon Thomas Coudry.
Un avis que rejoint Julien Miniconi, qui "se demande si un des quatre ne va pas lâcher. On continue de fragiliser soit un Bouygues Telecom soit un SFR. Aujourd'hui, nous sommes encore dans un marché difficile, on y verra plus clair dans six mois".