Le jeu de paume, le sport des rois qui traverse le temps

Des raquettes, un filet et une balle de la taille d’une orange, la partie ressemble de loin à du tennis ou du squash, mais il s’agit en fait de leur ancêtre : le jeu de paume, une discipline médiévale qui se perpétue grâce à l’enthousiasme de ses 10.000 adeptes à travers le monde.

«Devers», «dedans», servir en «girafe» ou en «boomerang», «faire une chasse» pour récupérer l’engagement... Au premier abord, les termes du jeu de paume semblent certes désuets ou alambiqués, mais ils offrent aux «paumistes» (joueurs) une grande variété de stratégies.

«Les autres sports sont plus monotones», juge Matthieu Sarlangue, sextuple champion de France en amateur. «Avec la paume, tous les jours on apprend d’autres choses, différents coups, différentes situations de jeu. C’est plus difficile que ça n’en a l’air».

Le jeu de paume est beaucoup plus stratégique que le tennis.
Photo : AFP/VNA/CVN

Le terrain de jeu de paume ressemble à un court de tennis mais il est asymétrique, comporte des murs et des galeries sur trois côtés. Le serveur devra par exemple d’abord toucher la corniche au fond du terrain adverse pour lancer le point. Pour marquer, il pourra comme au tennis réaliser un coup gagnant ou profiter d’une faute adverse, mais aussi toucher des zones bien précises sur le terrain ou les murs.

Dans cette discipline ancestrale, la tenue blanche reste de rigueur, même pour une simple partie entre amis. Les balles continuent également à être fabriquées à la main. Petite concession à la modernité, elles ont adopté la couleur jaune du tennis moderne depuis les années 80, pour offrir un peu plus de visibilité.

Chaque court a ses propres dimensions, donnant un avantage considérable à ceux qui jouent à domicile en terrain connu.

«C’est le côté pétillant de la paume», souligne Tim Batten, le capitaine de l’équipe de France de la Coupe Bathurst, l’équivalent de la Coupe Davis au tennis : «Il faut s’adapter aux différents courts».

À Paris, dans la seule salle encore en activité, ouverte depuis 1908, le plafond Art Nouveau de ferronnerie et de verre culmine à onze mètres. L’enceinte est la plus haute du monde, particulièrement adaptée au fameux service dit «girafe», tout en hauteur.

Le sport des moines et des rois

Au jeu de paume, la tactique est au moins aussi importante voire plus que la force physique, ce qui explique la longévité des joueurs.

Âgé de 46 ans, l’Australien Rob Fahey, surnommé le Roger Federer du jeu de paume, commence seulement à regarder derrière lui. Vainqueur de plusieurs Grand Chelem et de dix titres de champion du monde, il n’a cédé sa place de N°1 mondial que l’année dernière à l’Américain Camden Riviere, de 19 ans son cadet.

Matthieu Sarlangue (à droite), sextuple champion de France en amateur, et son entraîneur, Tim Batten.

À 22 ans, Sarlangue porte sur ses épaules l’espoir d’un renouveau du jeu de paume dans son pays natal, la France. L’ancêtre du badminton ou du squash est en effet né à l’époque médiévale chez les moines français qui jouaient au départ des parties à mains nues, jeu de paume signifiant littéralement avec la paume de la main.

À la fin du XVIe siècle, le jeu de paume, disputé depuis avec des raquettes, est à son apogée. La France compte alors pas moins de 1.500 courts dont 250 à Paris, selon l’expert et joueur Gil Kressmann, contre deux aujourd’hui, un à Paris et un à Fontainebleau.

Peu à peu, le centre de gravité de la discipline se déplace vers l’Angleterre, le pays où la discipline est la mieux représentée aujourd’hui avec une douzaine de clubs, dont l’enceinte la plus fréquentée du monde, celle de Hampton Court, le château d’Henri VIII.

C’est le duc Charles d’Orléans, emprisonné par Henri V au début du XVe siècle pendant la guerre de cent ans, qui aurait importé le jeu de paume en Angleterre, en l’enseignant à ses geôliers.

Le mot «tennis» viendrait de ce va-et-vient entre la France et l’Angleterre, dérivant du terme français «tenez», employé avant de servir.

«Le sport des rois» va devenir incontournable dans les cours de France, d’Angleterre, mais aussi d’Allemagne, d’Autriche, de Belgique, d’Espagne, d’Italie, des Pays-Bas, de Russie et de Suisse.

En France, la longue lignée des rois amateurs de jeu de paume s’arrête avec Louis XIV, à qui ses médecins recommandent de ne plus le pratiquer à cause de la goutte dont il souffre. Le Roi Soleil se met alors au billard, lançant une nouvelle mode à la fois pour la royauté et la haute société.

Après la Révolution, de nombreux terrains disparurent, souvent victimes de spéculations immobilières alors que la population ne cessait d’augmenter.

Une enceinte majeure a été préservée et est devenue un musée à Versailles : la fameuse salle du Jeu de paume, où le tiers-État, le clergé et la noblesse se réunirent le 20 juin 1789 et firent le serment d’élaborer une nouvelle Constitution.

De nombreux autres terrains ont été transformés en théâtre ou en lieux culturels, comme depuis un siècle déjà l’emblématique Jeu de paume à la Concorde. La fermeture de ce club avait conduit à en ouvrir un autre à Paris, où jouent encore aujourd’hui Matthieu Sarlangue et Tim Batten.

AFP/VNA/CVN

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