Le hat xâm, un art qui revient de loin

Le hat xâm (chant xâm), créé au XIIIe siècle, est un art populaire pratiqué autrefois par les aveugles. Quasi disparu pendant des décennies, il a repris de la vigueur ces dernières années.

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Une démonstration du +hat xâm+.

Le chant xâm a connu son apogée dans les années 1920-1939 dans le Nord du pays. Après plusieurs décennies de quasi-disparition, il renaît de ses cendres et a même été reconnu «patrimoine immatériel à sauvegarder». En 2008, le Centre de développement des arts musicaux du Vietnam a réussi à monter le premier spectacle de xâm.

Autrefois, il était habituellement interprété par des chanteurs et musiciens aveugles, qui trouvaient là un moyen commode de subsistance. Ils voyageaient en groupe de deux à cinq, ou en famille, et se produisaient dans les lieux publics comme les gares ou les entrées des marchés, les stations de tramway, ou encore aux coins des rues.

Un véritable métier et un trésor à préserver

Ils composaient des airs de xâm inspirés du destin des pauvres. D’autres airs, plus sarcastiques, critiquaient certains travers de la société, par exemple les excès des mandarins, ou exaltaient les exploits des héros.

Selon la légende, sous le règne du roi Trân Nhân Tông (1279-1293), le prince héritier Trân Quôc Dinh fut rendu aveugle par son propre frère Trân Quôc Toan qui voulait accéder au trône à sa place. Ce dernier l’emmena en forêt afin qu’il se fasse dévorer par les fauves. Ému par les pleurs de Trân Quôc Dinh, le Bouddha apparut et lui apprit des airs touchants, capables d’attendrir les cœurs les plus durs. Sauvé, le prince aveugle refusa de revenir au palais et choisit de passer le reste de sa vie à apprendre à ceux partageant le même handicap cet art musical qui, au fil du temps, devint un vrai gagne-pain. D’où le terme de hat xâm, littéralement le «chant des aveugles».

Mais cet art revient de loin. Récemment, il a été revitalisé et retrouve progressivement sa place dans le cœur des Vietnamiens.

En évoquant le hat xâm, on ne peut manquer de mentionner l’artiste Hà Thi Câu, une figure emblématique, de même que Xuân Hoach, Thanh Ngoan, Van Ty, Thuy Ngân, Mai Tuyêt Hoa.

Pour le compositeur Thao Giang, directeur adjoint du Centre de développement des arts musicaux du Vietnam, le hat xâm est non seulement un art mais aussi un élément de l’âme vietnamienne : «Le +chant xâm+ apparaît non seulement dans des spectacles folkloriques, des berceuses et pour les funérailles, mais aussi dans des pièces de théâtre, des films, des spectacles de cirque. Cela prouve qu’il a profondément imprégné la société vietnamienne».

Le +hat xâm+ était un art populaire traditionnel très répandu dans de nombreuses localités du Nord.

Les instruments de musique comprennent une viole à deux cordes, des claquettes et cliquettes en bambou, ainsi que deux tambourins.

À partir de la moitié du XXe siècle, chaque groupe de xâm disposait généralement d’un chef. Il s’agissait à cette époque d’un véritable métier. Les artistes jouaient de la musique et chantaient, et les spectateurs donnaient un peu d’argent, selon leurs moyens. La société considérait le hat xâm comme une profession à part entière, mais une profession pénible réservée aux pauvres.

Selon l’artiste Duc Huy, «le chant +xâm+ a des variantes selon l’environnement où il est pratiqué. Il y a ainsi le +xâm tàu diên+ interprété dans les stations de tramway, ou le +xâm cho+, à l’entrée du marché».

Un lien étroit avec le passé

Parmi les types d’arts traditionnels vietnamiens, le chant xâm a comme caractéristique d’être simple et donc proche du peuple. «Les mélodies sont familières et faciles à apprendre. Chaque chanson est une petite histoire de la vie quotidienne. Dans le passé, les nouvelles étaient instantanément transformées en chansons, note Thao Giang. Le chant xâm était considéré comme l’un des meilleurs moyens pour diffuser l’information. En relançant cet art vocal, nous veillons à conserver sa couleur d’origine, son essence».

Alors que de nombreux arts populaires sont en voie de disparition, le xâm pourra-t-il trouver sa voie et reconquérir sa place ? «Le chant +xâm+ peut être interprété partout, aussi bien dans un opéra que dans la rue, c’est sa force», ajoute M. Giang.

Nguyên Van Bôn, de Hanoï, est un fidèle admirateur. Lorsqu’il était jeune, il aimait écouter les chanteurs autour des tramways ou dans les marchés. L’image de ces artistes est toujours ancrée dans sa mémoire. «J’avais l’habitude d’écouter le +xâm+ dans les années 1960-1970, explique-t-il, nostalgique. J’ai toujours en tête ces mélodies qui se mêlaient au son des cloches des tramways. De nos jours, les jeunes aiment le jazz, le rap et le rock. Mais les anciens comme moi sont encore attachés à la musique traditionnelle car elle nous rappelle la capitale d’antan et nous relie à nos ancêtres».


Thuy Hà/CVN

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