>>Le Vietnam cherche une bouée de sauvetage
Un rapport alarmant, publié par l’organisation humanitaire DARA sur les résultats de l’étude concernant la vulnérabilité due au changement climatique en 2012, tente à nouveau d’alerter sur les risques que représente le réchauffement.
D’ici 2100, 5% des terres du pays pourraient disparaître sous les eaux. |
Selon ce rapport, le Vietnam essuie actuellement une perte annuelle de 15 milliards de dollars causée par le changement climatique, soit 5% de son PIB.
Concrètement, les dégâts annuels causés par l’élévation du niveau de la mer sont estimés à 4 milliards de dollars. Chaque année, le changement climatique devrait coûter 8 milliards de dollars au secteur de la production ; 1,5 milliard à celui de la pêche ; 0,5 milliard à l’agriculture. Les dommages dus aux inondations et glissements de terrain s’élèvent à 200 millions de dollars…
Selon ce même rapport, pour la seule année 2012, les dégâts matériels engendrés par les catastrophes naturelles sont estimés à plus de 7.000 milliards de dôngs, tandis que l’on déplore sur le plan humain plus de 700 morts, portés disparus et blessés. Sans compter quelque 100.000 maisons endommagées ou détruites, et environ 80.000 hectares de rizières et autres cultures anéanties.
Selon les mises en garde alarmantes du rapport - l’évaluation la plus complète sur l’impact global du changement climatique publiée jusqu’à aujourd’hui -, si aucun effort n’est fourni pour tenter d’endiguer ses effets, ceux-ci pourraient se chiffrer à 11% du PIB en 2030.
Cette étude, intitulée “Climate Vulnerability Monitor 2012” (Moniteur de Vulnérabilité Climatique), entre dans le cadre du Programme des initiatives sur la vulnérabilité climatique de DARA International, une organisation indépendante d’étude de l’environnement, et de The Climate Vulnerable Forum (Forum sur la vulnérabilité climatique), la tribune des pays vulnérables au changement climatique. Son objectif : élaborer des politiques internationales, renforcer les mesures d’adaptation au niveau mondial.
Le Vietnam particulièrement exposé
«La vulnérabilité climatique du Vietnam est classée la plus élevée du groupe critique et elle continue d’augmenter», a déclaré Nguyên Quang Thành, représentant du rapport de DARA.
Avec ses plus de 3.200 km de côtes qui s’étirent entre deux deltas - du fleuve Rouge au Nord au Mékong au Sud -, le Vietnam est l’un des pays les plus exposés aux conditions météorologiques extrêmes et à la hausse du niveau de la mer liées aux modifications du climat. Un message qu’a martelé Pratibha Mehta, coordinatrice permanente des Nations unies au Vietnam, lors d’un séminaire consultatif consacré aux mesures d’adaptation au changement climatique, organisé fin janvier à Hanoi.
Au sujet de la DARA
Fondée en 2003 par Silvia Hidalgo, DARA est une organisation indépendante qui s’est engagée à améliorer la qualité et l’efficacité de l’aide pour les populations vulnérables souffrant de conflits, des catastrophes et des changements climatiques.
Le groupe d’experts inter-gouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) des Nations unies a affirmé qu’une hausse du niveau de la mer d’un mètre affecterait au moins un Vietnamien sur quatre et submergerait 40.000 km² des terres du pays.
Dans sa stratégie nationale sur le changement climatique, le Vietnam a tablé sur une montée des eaux d’un mètre d’ici 2100. Selon ce scénario, 5% des terres du pays disparaîtraient, en particulier dans le delta du Mékong, «le grenier à riz du Vietnam» (qui assure la moitié de la production nationale rizicole), dont jusqu’à 90% des terres pourraient se retrouver submergées, faisant ainsi planer une lourde menace sur la sécurité alimentaire du pays. Plus d’un Vietnamien sur dix serait affecté. La vulnérabilité climatique pourrait alors menacer les efforts de réduction de la pauvreté, avec l’apparition du phénomène de «réfugiés climatiques».
Le changement climatique est le plus grand défi de notre époque. À tel point que les problématiques qu’il pose constituaient l’un des six grands points à faire l’objet des débats lors du 7e plénum du Comité central du Parti communiste vietnamien (PCV), XIe exercice, qui a eu lieu du 2 au 11 mai à Hanoi. À propos de la résilience au changement climatique ainsi que de la protection des ressources naturelles et de l’environnement, Nguyên Phú Trong, secrétaire général du PCV, a déclaré : «Il s’agit d’une question décisive pour le développement durable de chaque pays. Le grand défi de l’Humanité pour ce XXIe siècle».
Après moi, le déluge ?
Le Vietnam a signé dès 1998 le Protocole de Kyoto, qui s’inscrit dans la Convention-
Au sujet du Climate Vulnerable Forum
Le CVF regroupe 11 pays menacés par les changements climatiques qui sont les Maldives, Kiribati, Bangladesh, Barbade, Bhoutan, Ghana, Kenya, Népal, Rwanda, Tanzanie et Vietnam. Il a été fondé à l’initiative des Maldives en novembre 2009 pour mettre en évidence leurs défis et solliciter une assistance internationale.
cadre des Nations unies sur les changements climatiques. Il n’a cessé de promouvoir les activités afin de réaliser la Convention, d’élaborer une législation dans ce domaine et des politiques d’adaptation. Mais au-delà de ces intentions louables, la réalité est bien différente : des localités ne se rendent pas encore compte des impacts qu’a la modification du climat sur leur développement socio-économique. «Le changement climatique est généralement perçu comme étant relié aux catastrophes naturelles, inondations, sans toutefois établir de lien de cause à effet. Certains pensent même que ce phénomène est responsable de tremblements de terre...», a indiqué le Dr Nguyên Van Tài, directeur de l’Institut de stratégies et de politiques des ressources naturelles et de l’environnement (ministère des Ressources naturelles et de l’Environnement). Et d’ajouter : «Bien que le changement climatique soit un défi vital pour l’Humanité, une partie de la population doute encore de sa réalité et de ses facteurs déclencheurs, à savoir l’activité anthropique».
«La communauté n’est pas clairement consciente du changement climatique et de ses dangers, d’où l’insuffisance de mesures de résilience», a partagé le Pr-Dr Pham Ngoc Đang, vice-président de l’Association de protection de la nature et de l’environnement du Vietnam.
Hông Nga/CVN