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Bien que la technique d’impression par gravure sur bois existe depuis des siècles, personne ne sait exactement quand la peinture folklorique vietnamienne est apparue. Actuellement, quelques villages de métier continuent à produire des estampes traditionnelles et donc à préserver et à valoriser cet art.
Le mariage des souris, une célèbre estampe de Dông Hô. |
Photo : Archives/CVN |
Au XIIe siècle, sous la dynastie des Ly (1010-1225), de nombreuses familles étaient spécialisées dans la gravure sur bois et la production de peintures. À la fin de la dynastie des Trân (1226-1400), ces familles imprimaient également des billets. Au début de la dynastie des Lê So (1428-1527), la planche à imprimer chinoise fut introduite, contribuant à l’amélioration de la technique.
Au XVIe siècle, sous la dynastie des Mac (1527-1677), la peinture folklorique est devenue très populaire, en particulier auprès des aristocrates de Thang Long (Hanoi aujourd’hui). Entre le XVIIIe et le XIXe siècle, l’art de la peinture folklorique s’est répandu dans tout le pays. De très anciennes gravures sur bois sont d’ailleurs conservées au Musée national de l’histoire du Vietnam et au Musée des beaux-arts de Hanoi.
Les Vietnamiens pratiquent le culte des ancêtres et croient à la déification des phénomènes naturels. On retrouve ces deux éléments dans la peinture folklorique vietnamienne.
Dông Hô, une école réputée
Les peintures populaires sont divisées en divers courants, en fonction des endroits où elles sont produites. Chacune possède son propre style, mais leurs techniques d’impression sont similaires. La peinture folklorique ne respecte pas les règles de la perspective, mais exprime plutôt une méthode d’observation selon différents angles. Les génies sont imposants et occupent la position la plus élevée, souvent au centre de la peinture. Les gens ordinaires sont dessinés à plus petite échelle. La taille des animaux ou des paysages dépend de leur importance dans l’histoire. Ces caractéristiques font de la peinture folklorique vietnamienne un art unique en son genre.
La procession des tambours, une célèbre estampe de Dông Hô. |
Photo : Archives/CVN |
La peinture de Dông Hô provient du village éponyme, dans le district de Thuân Thành, province de Bac Ninh (Nord). Elle date du XVIe siècle. Il s’agit d’estampes réalisées à partir de planches xylographiques qui sont ensuite enluminées. Populaires, ces images le sont par leur mode de fabrication artisanale, leur prix et leur esthétique. Autant de facteurs qui expliquent leur succès.
Les estampes de Dông Hô font appel à l’imaginaire des Vietnamiens. Elles sont omniprésentes dans les poèmes, chants et œuvres littéraires. La technique s’est transmise de génération en génération. Les planches de bois ont été gravées au ciseau dans des essences différentes selon le résultat recherché. Il en faut une par couleur.
Les couleurs sont d’origine naturelle : sève de sumac, obier ou hibiscus pour le rouge, vert de gris, aiguilles de pin et coquilles d’huîtres écrasées pour le vert, cendres de paille de riz et de feuilles de bambous brûlées pour le noir, pousses de sophora pour le jaune, nacre moulue pour le blanc.
Le matériel est tout aussi simple: pinceaux de jeunes aiguilles de pin, rondelles de noix de coco dont on frotte les planches, feuilles de luffa pour essuyer le dos du papier, minces copeaux de bambous qui n’absorbent pas l’humidité et dont on entoure la planche quand la peinture est fraîche.
Ces estampes représentent des scènes de la vie à la campagne, des jeux traditionnels, etc. L’artisan utilise du papier do (papier d’origine végétale) enduit de nacre (diêp), qu’il colorie grâce aux masses correspondant aux différentes couleurs, appliquées sur autant de planches de bois.
Parmi les plus célèbres estampes figurent La cueillette de la noix de coco, La procession des tambours ou Le jeune pâtre et ses buffles. Traditionnellement, elles servaient à décorer autels, pagodes et maisons communales.
Au fil du temps, Dông Hô est devenu une «école» réputée pour ses techniques d’aplats de couleur.
Les peintures du village de Sinh représentent les valeurs spirituelles que les Huéens pratiquent durant le culte des ancêtres. |
Valeurs spirituelles des Huéens
Une autre école très connue dans le pays est celle du village de Sinh, situé dans le district de Phu Vang (province de Thua Thiên-Huê, Centre). Il regorge d’estampes datant d’environ quatre siècles.
Contrairement aux estampes du village de Dông Hô, qui servent d’objets d’ornement pendant le Têt traditionnel, celles de Sinh représentent les valeurs spirituelles que les Huéens pratiquent durant le culte des ancêtres. L’autre différence est d’ordre chromatique. Alors que les estampes de Dông Hô n’ont que quatre couleurs (noir, vert, jaune et rouge), celles de Sinh en ont beaucoup plus. Les principales sont jaune clair, bleu, rouge foncé, rouge primaire, vert et noir.
Ces peintures sont réalisées à partir d’une seule planche pour former les contours et les formes noires. On y ajoute parfois quelques touches de couleur. Certaines peintures sont encore imprimées sur du papier rustique. Pour fabriquer une peinture grand format, par exemple d’un bodhisattva, une femme portant un habit coloré, d’une allure imposante avec deux servantes, il faut choisir du papier de première qualité afin d’éviter tout effet indésirable.
À Sinh, les artisans gravent les images brutes sur du bois, puis les sèchent avant de colorer les détails. Ces estampes se distinguent donc par leurs couleurs éclatantes, leurs détails et les paysages qu’elles représentent.
Thuy Hà/CVN