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Le verdict rendu dans l'affaire Epic Games vs Apple soulève de nombreuses questions et ne fait pas émerger de vainqueur. |
Mais cette décision ne donne pas de clair vainqueur entre Apple, forcé de faire des concessions mais blanchi des accusations de monopoles, et Epic, largement salué comme victorieux mais insatisfait au point de faire appel.
Le modèle économique de l'App Store
Mis en fonction en 2008, le magasin d'applications mobiles - rapidement imité par les technologies concurrentes - a donné naissance à toute une économie de services accessibles sur son smartphone.
Les éditeurs tiers soumettent leurs applications, et si elles sont validées, les utilisateurs d'iPhone ou d'iPad peuvent les télécharger, uniquement via cette plateforme.
"Apple a aidé à construire une économie qui rapporte plus de 500 milliards d'USD par an, et ne reçoit qu'une lichette de ce montant pour toute l'innovation qu'elle a facilité et les coûts d'opération", a affirmé le patron Tim Cook au New York Times début avril, qualifiant l'App Store de "miracle économique".
La firme de Cupertino prélève une commission de 30% sur les ventes d'applications dans l'App Store et sur les achats de biens et services numériques au sein de ces applis.
Certains développeurs bénéficient d'un taux réduit de 15% (nouveaux venus, revenus annuels inférieurs à 1 million d'USD, etc...).
D'autres sociétés, comme Spotify et Netflix, évitent la commission en n'offrant pas la possibilité de souscrire à leurs services depuis l'appli, et en laissant les consommateurs comprendre d'eux-mêmes qu'ils doivent se rendre sur le site web.
Pas de monopole selon la justice américaine
Apple va désormais devoir laisser les applications rediriger leurs utilisateurs vers leur site web - et ainsi échapper à la "taxe Apple", comme la surnomment ces détracteurs.
Yvonne Rogers, la juge américaine chargée du contentieux avec Epic Games, a décidé vendredi que le fabricant de l'iPhone ne pouvait plus empêcher les éditeurs de communiquer directement avec leurs clients pour les orienter des moyens de paiement alternatifs.
Mais elle n'a pas donné raison au studio de jeux vidéo.
Epic voulait que la cour reconnaisse qu'Apple est en situation de monopole illégal, or la juge n'a pas trouvé "d'infraction au droit de la concurrence". "Le succès n'est pas illégal", a-t-elle ajouté.
Le studio va faire appel du verdict. Il a intenté un procès il y a un an à Apple, après avoir tenté de contourner le système de paiement de l'App Store. Son jeu Fortnite avait immédiatement été retiré de la plateforme.
Tim Sweeney, le patron d'Epic, a promis de "continuer à se battre" pour "une concurrence équitable entre les méthodes de paiement au sein des applis".
Et les consommateurs ?
Ils sont perdants, selon Epic.
"Fortnite reviendra sur l'App Store d'iOS quand Epic pourra proposer son système de paiement dans l'appli en concurrence avec celui d'Apple, en faisant bénéficier les consommateurs des économies ainsi réalisées", a tweeté Tim Sweeney.
Car Apple pourra continuer d'imposer son système de paiement pour les achats réalisés directement dans l'application.
Les utilisateurs souhaitant s'abonner à un programme de méditation, par exemple, ne verront sans doute pas d'inconvénient à aller payer sur le site web. Mais quid des transactions impulsives dans les jeux vidéo, quand la suite de l'aventure dépend de l'achat d'une vie supplémentaire ?
Il est probable que ces transactions restent dans les applis, et donc via l'App Store. Dans l'immédiat, les utilisateurs ne remarqueront donc que peu de changements.
Impact économique pour Apple
L'App Store compte près d'un milliard d'utilisateurs dans le monde, qui représentent un marché juteux. Ils ont dépensé 643 milliards d'USD sur des applications en 2020, d'après Apple.
Mais il est difficile de chiffrer d'éventuelles pertes pour la marque à la pomme.
Le groupe a tiré 64 milliards d'USD de revenus de la plateforme l'année dernière, selon les analystes de la chaîne économique CNBC.
Ces recettes proviennent d'une fraction des applications - 85% de celles présentes sur l'App Store ne payent aucune commission (parce qu'elles sont gratuites, notamment).
Celles qui sont payantes peuvent apprécier les services fournis par Apple, note l'analyste Carolina Milanesi, qui pense que le groupe n'a pas de souci à se faire en termes d'impact sur ses revenus.
D'autant que les consommateurs peuvent aussi préférer ne pas rentrer leurs coordonnées bancaires sur trop de plateformes différentes.
Apple a salué la décision comme une "victoire retentissante" et une "validation de son modèle économique".
AFP/VNA/CVN