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Dinh Lê, une modeste rue qui attire des lecteurs hanoïens de tous les âges. |
Les boutiques multicolores, aux angles des rues Dinh Lê et Nguyên Xi, attirent un grand nombre de lecteurs de tous âges. La première librairie a été ouverte dans les années 1990 par la famille de Madame Mao, qui travaillait à cette époque-là pour l’entreprise d’État de publication de livres. Au début, la propriétaire a installé un modeste stand de livres au bord du lac Hoàn Kiêm (lac de l’Épée restituée), qui est rapidement devenu le lieu le plus fréquenté par les lecteurs hanoïens.
À cette époque-là, les livres restaient le moyen le plus efficace d’accès aux connaissances, ainsi qu’un loisir à la mode. Devant le succès de sa petite affaire, Madame Mao a décidé de transformer son stand en vraie librairie, et de l’installer au deuxième étage de son immeuble dans la rue Dinh Lê. Au fil des années, plusieurs boutiques ont été ouvertes et ont rapidement transformé Dinh Lê en rue des librairies, la plus grande de Hanoï.
La rue des librairies à l’ère du numérique
Actuellement, la rue Dinh Lê participe au charme du Vieux quartier de Hanoï. Elle constitue une animation, une attraction culturelle de la ville. C’est toujours un endroit visité par les lecteurs de tous âges, comme à ses débuts. Des milliers d’ouvrages sont disponibles, et sont actualisés pour répondre à la demande des amoureux des livres.
Madame Mao a confié sa fierté et son émotion de voir sa librairie familiale devenir le lieu de rendez-vous d’étudiants venus de différentes régions du Vietnam. Après leurs études, la plupart sont rentrés dans leur province natale pour gagner leur vie. Mais à chaque fois qu’ils reviennent à Hanoï, ils ne manquent pas d’aller fouiner dans ce lieu spécial, comme s’ils désiraient retrouver des souvenirs de leur jeunesse.
Malheureusement, récemment, le nombre de librairies a montré une tendance à la baisse. Le niveau de vie plus élevé, les médias plus diversifiés, tous ces éléments ont profondément fait évoluer les habitudes de lecture parmi les jeunes Vietnamiens. On se demande même si, un jour, la rue Dinh Lê ne sera plus fréquentée que par des vieux, et que les jeunes auront définitivement délaissé la lecture papier.
Dinh Lê est un lieu incontournable pour tous les amoureux des livres. |
La lecture papier, un passe-temps démodé ?
Avec l’expansion des nouvelles technologies, les jeunes ont accès en quelques clics à une grande masse d’informations. Les livres imprimés, considérés auparavant comme la porte du savoir, intéressent de moins en moins les jeunes. Ainsi, les propriétaires des librairies de la rue Dinh Lê ont tous constaté une chute des ventes ces dernières années. Compte tenu du coût de location élevé, beaucoup ont dû se résoudre à vendre d’autres marchandises, notamment fournitures scolaires, cadeaux souvenirs et même lego…
Madame Mao déplore cette dévalorisation sans précédent des livres au sein de la jeunesse, une situation bien différente des décennies précédentes, en particulier des années 1990-2000, où les profits tirés de la vente des livres ont considérablement contribué à rendre confortable la vie de toute sa famille, et ce à une époque où l’économie du pays connaissait encore bien des difficultés. Le désamour pour les livres s’expliquerait aussi par la diversification des loisirs des jeunes, qui consacrent davantage leurs temps libres aux jeux en ligne, au cinéma, etc. qu’à la lecture de livres autres que les manuels scolaires.
De plus, l’Internet, les Smartphones ont fait évoluer les habitudes de lecture, notamment des jeunes, qui sont les plus sensibles aux innovations technologiques. Selon une étude publiée par Internetworldstats, fin juin 2015, on dénombrait au Vietnam 45,5 millions d’utilisateurs d’Internet, soit 48% de la population, classant le pays à la 6e place en Asie.
À l’ère du numérique, pour l’accès à l’information, les jeunes ne sont pas naturellement tournés vers la lecture papier ; ils préfèrent l’Internet, qui leur offre des réponses rapides et gratuites, ou presque. Mme Mao et les autres libraires de Dinh Lê sont évidemment conscients de cette tendance.
Cependant, la lecture papier apporte des émotions plus concrètes que l’écran de l’ordinateur ou du Smartphone. Feuilleter les pages, sentir l’odeur du papier imprimé confère à la lecture papier un charme bien différent, en plus de susciter une affection réelle pour ces nobles objets que sont les livres. Cela explique pourquoi la rue Dinh Lê reste une destination attrayante pour un certain nombre de jeunes lecteurs, qui considèrent la lecture papier comme plus agréable, plus informative et aussi moins nocive pour leur santé.
Texte et photos :
Nguyên Lê Hông Anh/CVN