La rose dans la culture vietnamienne

En Occident, la rose est l’image de la romance, de l’amour, mais aussi de l’évanescence de la beauté et de la brièveté de la vie. Dans la poésie vietnamienne, peu d’œuvres célèbrent cette fleur comme en Occident.

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La rose, la reine des fleurs.
Photo: CTV/CVN

Le sous-directeur de l’École des écrivains Nguyên Du m’a demandé un jour: "Pourquoi la rose est-elle absente de notre littérature classique? Est-ce parce que nos ancêtres l’ignoraient?"

J’avoue que ce fut pour moi une colle de taille, n’étant pas ethnobotaniste, ni simplement botaniste.

J’ai fait une hâtive vérification en feuilletant le Truyên Kiêu de Nguyên Du (XVIIIe siècle), roman de plus de trois mille vers qui représente le summum de notre littérature classique. Ce chef-d’œuvre inégalé de notre poésie nationale abonde en chrysanthèmes, orchidées, lotus, tubéreuses, fleurs d’abricotier, de pêcher, de grenadier…, souvent des images littéraires consacrées par les humanités chinoises. Aucune allusion à la rose (hoa hông en vietnamien).

Chansons populaires parlant des roses

L’expression "vuon hông" dans le vers "Vuon hông chi dám ngan rào chim xanh" du Truyên Kiêu pourrait induire en erreur le vietnamisant en herbe qui serait tenté de traduire par "jardin de rosiers" (vuon = jardin, hông = la rose, ou rose, rouge… Dans ce contexte littéraire, il signifie: jardin rouge ou rose de fleurs de pêcher. Allusion à une histoire ancienne).

La littérature populaire vietnamienne semble également ne pas connaître la rose. Parmi les quelque 15.000 chansons populaires recueillies par le Kho tàng ca dao nguoi Viêt (Trésor des chansons populaires Viêt, 1995), j’en ai relevé par hasard deux parlant des roses:

Hoa hông sap hái dên tay
Dê nguoi hái mât dung ngây mà nhìn

(Cette rose, tu vas la cueillir,

Mais quelqu’un te devance, et tu regardes, bouche bée).

Hoa hông trông thât my miêu
Khoe huong buôi sáng, buôi chiêu con dâu!

(Splendide est la rose,

Toute fière de son parfum le matin, elle s’évanouit le soir).

La littérature populaire vietnamienne semble ne pas connaître la rose.
La littérature populaire vietnamienne semble ne pas connaître la rose.

Mais comme ces chansons ne peuvent être datées, je pense qu’elles remonteraient à l’époque coloniale assez récente où les Français propageaient la culture des rosiers.

Pourtant, il y a une espèce de rose sauvage mentionnée par nos chansons populaires: c’est le hoa tâm xuân (littéralement: fleur à la recherche du printemps) qui correspondrait à l’églantine (Rosa eglanteria).

Trèo lên cây buoi hái hoa,
Buoc xuông vuon cà hái nu tâm xuân,
Nu tâm xuân no ra xanh biêc,
Em da co chông anh tiêc lam thay…

(Je grimpe sur le pamplemoussier pour cueillir des fleurs,

Je descends au champ d’aubergines pour cueillir des boutons d’églantine,

Les boutons d’églantine ont des couleurs si fraîches,

Mais tu as déjà un mari, comme je le regrette!)

On estime qu’à l’origine, la rose poussait dans les climats tempérés de l’hémisphère Nord (80% en Asie, 15% en Amérique, le reste en Europe et dans le Nord-Ouest de l’Afrique), très peu dans les pays tropicaux sauf dans les régions élevées. Est-ce pour cela que la rose ne ferait pas partie intégrante de l’horticulture du Vietnam, pays tropical?

Concept de "fleur" en général

La Reine des fleurs, surnom donné par la poétesse grecque Sappho (env. 600 av. J.-C.), est par contre liée à beaucoup de civilisations. Elle est le symbole universel de la perfection, de l’élégance, de la romance, de l’amour, mais aussi de la fragilité du bonheur, de la beauté féminine.

Typiques sont ces vers de Ronsard dans "Mignonne, allons voir si la rose…":

…"Las! Voyez comme en peu d’espace,

Mignonne, elle a dessus la place,

Las, las ses beautés laissé choir!

O vraiment marâtre Nature,

Puisqu’une telle fleur ne dure

Que du matin jusqu’au soir!"

Pour exprimer des sentiments pareils, la poésie traditionnelle vietnamienne emploie souvent le concept de "fleur" en général. Le poète contemporain Xuân Diêu dira: "La fleur s’épanouit pour se faner".

Huu Ngoc/CVN
(Mars 1997)

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