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À My Xuyên, on compte aujourd’hui 20 ateliers avec 150 artisans, qui sculptent leur avenir et celui de la communauté dans le bois. |
À My Xuyên, on compte aujourd’hui 20 ateliers avec 150 artisans, qui sculptent leur avenir et celui de la communauté dans le bois. |
"Remontons un peu le temps, pour commencer. Nous sommes en 1802. L’empereur Gia Long vient de monter sur le trône. Désireux de se faire construire un somptueux palais à Huê, la nouvelle capitale, il lance un appel aux talents de tout le pays. Les sculpteurs sur bois sont bien sûr de la partie. Mais venus du Nord, ces derniers ont besoin de locaux pour leur prêter main forte. Aussi recrutent-ils des apprentis à My Xuyên, un village proche de la toute nouvelle cité impériale", confirme Nguyên Thê, un folkloriste de Huê. Et d'ajouter que "la suite est aisée à deviner. Ces apprentis sculpteurs, après avoir participé à la construction du palais impérial, s’en reviennent dans leur village avec un solide savoir-faire artisanal, qui va se transmettre de génération en génération".
"D’après certains documents historiques, c’est au XVe siècle qu’aurait été fondé le village de Mỹ Xuyên", dit-il. "Ce qui est sûr, en revanche, c’est que la sculpture sur bois n’y a fait son apparition qu’au XIXe siècle, grâce aux sculpteurs venus du Nord et aux jeunes qu’ils ont formés pour travailler sur le chantier de la cité impériale et qui sont revenus au village avec un savoir-faire artisanal qu’ils ne se sont pas privés d’exploiter. À noter au passage qu’après le chantier, plusieurs sculpteurs du Nord ont choisi de rester au village".
Des mains habiles
On peut donc affirmer, sans risquer de se tromper, que les sculptures sur bois que l’on peut admirer dans la Cité impériale de Huê sont toutes estampillées My Xuyên. Bas-reliefs, poutres, portes, panneaux transversaux, sentences parallèles, autels des ancêtres, tables, chaises, lits, armoires… Rien n’aura échappé aux mains habiles des sculpteurs du village. Aujourd’hui, leurs descendants ont de quoi être fiers, et ce n’est certainement pas Nguyên Duc Phi, l’un d’entre eux, qui prétendra le contraire.
"Grâce aux mains d’or et au savoir-faire exceptionnel des artisans de My Xuyên, un tronc d’arbre peut se transformer en une œuvre d’art… Rien qu’en regardant la sculpture, on sait immédiatement de quel atelier elle provient", assure-t-il.
Quelques coups de ciseaux à bois, de bédane ou de gouge savamment distillés, et le miracle s’accomplit… Un simple morceau de bois se métamorphose et prend vie… Et ce depuis maintenant plus de deux siècles.
"J’ai eu la chance de naître dans ce village", confie Nguyên Duc Phi. "Ici, le savoir-faire se transmet vraiment de génération en génération. C’est une tradition à laquelle on reste très attaché. En ce moment, on voit émerger toute une génération de jeunes artisans qui sont prêts à reprendre le flambeau, et ça, c’est formidable".
Nguyên Thê se réjouit lui aussi de constater que la sculpture sur bois a encore de beaux jours devant elle, d’autant plus que les jeunes font montre d’une réelle créativité.
"Aujourd’hui, les artisans innovent pas mal. Les produits qui sortent de leurs ateliers rencontrent pas mal de succès, aussi bien auprès des Vietnamiens qu’auprès des étrangers", note-t-il.