La maison communale et le village traditionnel

La maison communale ou le dình est un lieu dédié au culte du Génie tutélaire. C’est aussi là que se déroulent toutes les activités religieuses et festives du village.

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Représentation de "hat xoan" (chant printanier) dans la maison communale du village de Hùng Lô à Phu Tho, au Nord.
Photo : VNA/CVN

Une très vieille chanson populaire dit :

"Je passe devant la maison communale,
J’incline mon chapeau conique pour la regarder,
Autant elle a de tuiles, autant je t’aime…"

Il y a un quart de siècle, un écolier de dix ans déclamait ces rimes sous les bombes américaines :

"Mon village possède une maison communale,
Et devant elle, un puits où se mire la lune,
Un kapokier tout près se dresse, vers le Ciel,
Un chemin sablonneux court devant son portique
Toutes les troisièmes lunes, l’arbre est rouge de fleurs
Que se partagent les oiseaux et les poissons
Et les toits recourbés, sur le fond du ciel clair,
Paraissent somnoler, les paupières mi-closes…"

Un célèbre peintre, poète à ses heures, se demande à travers ses errances à l’étranger : "Sont-ils encore frais, les lotus de la mare de notre maison communale ?"

Tout cela montre combien le dình hante l’imaginaire du peuple vietnamien. Foyer de la vie collective du village, il est à la fois un temple, une mairie et une maison de la culture.

Vie spirituelle de la communauté

Le dình régit la vie spirituelle de la communauté, de concert avec la pagode bouddhique (chùa) et le temple de Confucius (van chi). Il faut y ajouter aussi les nombreux petits sanctuaires et autels dédiés aux innombrables esprits du culte animiste teinté de taoïsme populaire.

La maison communale de Cô Mân dans la ville de Dà Nang, au Centre.
Photo : VNA/CVN

À la maison communale, les villageois vénèrent leur Génie tutélaire (Thân thành hoàng). Il peut s’agir d’un personnage historique (héros national ou local, bienfaiteur qui a apporté au village un métier ou des terres défrichées…). Il peut être aussi légendaire (un génie céleste tel que le Génie de la Montagne Tan Viên, un individu quelconque, parfois voleur ou mendiant, frappé de male mort à une heure sacrée, quelque animal divinisé).

Le sacrifice annuel le plus important en l’honneur du Génie tutélaire est célébré au printemps, en automne, et à l’occasion de l’anniversaire de la naissance ou de la mort du génie. Il donne lieu à des cérémonies solennelles et à une fête qui met la population en liesse pendant plusieurs jours. De nombreuses réjouissances s’organisent dans la vaste cour du dình, jeux d’échecs aux pions humains, opéras tuông et chèo, lutte traditionnelle, combats de coqs, d’oiseaux, de buffles, balançoire…

La pagode est une construction close, bâtie à l’écart, consacrée à la vie future et aux rites de la mort. Par contre, la maison communale est un ouvrage architectural ouvert, situé dans un endroit commode pour les réunions, voué aux activités sociales de la vie présente. C’est là que se font les réunions des notables et des inscrits mâles (dình) du village, que se traitent les questions d’administration (répartition des impôts et des terres communales, recrutement des soldats, attribution des corvées…) et de justice (règlement des différends, châtiments infligés à ceux qui enfreignent les prescriptions coutumières du village…).

Valeurs culturelles inestimables

La maison communale se fait gardienne de l’ordre confucéen qui ne s’était implanté solidement dans l’infrastructure familiale et sociale vietnamienne qu’à partir de la dynastie des Lê (XVe siècle). Les premiers dình sont apparus sans doute aux XVIe siècle, ils ont atteint leur apogée aux XVIIe et XVIIIe siècles pour décliner au XIXe siècle à cause de la désagrégation féodale et de l’intervention occidentale. Nés au Nord, ils ont gagné le Sud grâce à l’essaimage des villages dans l’expansion territoriale de la nation.

Quel fut le modèle original du dình ? D’aucuns parlent des maisons communales rông des ethnies du Tây Nguyên, d’autres se réfèrent aux maisons en forme de jonque gravées sur les tambours de bronze de Dông Son (1er millénaire avant J.-C). On n’a pas encore avancé de preuves tangibles.

En tous cas, last but not least, il faut souligner que nos maisons communales constituent un patrimoine culturel inestimable, un musée d’architecture et de sculpture en bois d’importance primordiale. Pour s’en convaincre, il suffit de visiter quelques spécimens parmi les plus célèbres : les maisons communales de Lô Hanh (Bac Giang, 1576), Tây Dang (Hà Tây, fin XVe, début XVIe siècles), Thô Hà (Bac Giang, XVIe-XVIIe siècles), Dình Bang (Bac Ninh, 1736).

Huu Ngoc/CVN
(Juin 1994)

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