La gemme vietnamienne, tout le monde l’aime !

La gemme, quelle qu’elle soit, ne laisse personne indifférent. Au Vietnam, elle évoque non seulement la beauté en général, mais aussi la pureté de l’âme, la vertu et le savoir.

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Après avoir été lavées dans l’eau du puits au temple d’An Duong Vuong à Cô Loa (Hanoï), les perles deviennent plus brillantes, selon une légende vietnamienne.
Photo : CTV/CVN

Le terme vietnamien ngoc désigne comme le mot "gemme" (gem en anglais) toute matière minérale (pierre précieuse et pierre fine ou semi-precious stone en anglais) ou organique (perle, ambre) employée en bijouterie. Mais dans la catégorie minérale, nous ne distinguons pas la pierre précieuse (saphir, émeraude, rubis et diamant) de la pierre fine (turquoise, topaze, quartz, grenat, etc.). Nous classons à part le diamant (kim cuong).

Pour tous les peuples du monde, la gemme est le symbole de ce qui est rare, précieux, cher, noble. Le saphir (ngoc lam) représentait l’espoir et pouvait guérir les maladies des yeux (anciennes Grèce, Europe), il pouvait traiter la peste (Arabie, Inde). L’émeraude (ngoc luc bao) assurait une reproduction abondante (Amérique centrale) et possédait un pouvoir magique (Europe du Moyen Âge). Le jade (ngoc thach), du principe mâle (Yang), est signe de perfection, de vertu, de pouvoir (sceau impérial en jade), tandis que la perle (ngoc trai), relevant du principe femelle (Yin : Lune - Eau - Femme), avait des vertus aphrodisiaques et prolifiques (ancienne Chine).

Une histoire d’amour

Concernant les perles, il existe une légende vietnamienne, histoire d’amour dont la fin tragique des époux rappelle Roméo et Juliette. Au IIe siècle av. J.-C., vivait le roi An Duong Vuong. Après l’avoir aidé à bâtir la citadelle de Cô Loa, le Génie Tortue d’Or lui donna une griffe de sa patte, laquelle, employée comme gâchette, devait permettre à l’arbalète royale de tuer à chaque coup des dizaines de milliers d’ennemis. Le seigneur chinois Triêu Dà, ne pouvant venir à bout du roi du Vietnam, feignit la paix et sollicita pour son fils Trong Thuy la main de My Châu, fille du monarque. Venu vivre auprès de sa femme, Trong Thuy fut initié pour elle au secret de l’arbalète. Il vola la gâchette magique et rentra en Chine, permettant à son père de reprendre l’offensive.

Les perles de Phu Quôc se distinguent par leur couleur et leur brillance.
Photo : VNA/CVN

Vaincu, An Duong Vuong prit la fuite, avec sa fille en croupe sur son cheval. Tenant la promesse faite à Trong Thuy au moment de la séparation, elle sema son chemin de plumes d’oie. Se voyant acculé à sa fin, le roi invoqua la Tortue d’Or qui lui dit : "L’ennemi est derrière toi". Il dégaina, tua sa fille et se jeta dans la mer.

Guidé par les plumes d’oie, Trong Thuy découvrit le corps de My Châu, l’enterra, puis se donna la mort en sautant dans un puits. On dit que depuis ce jour, les perles lavées avec l’eau de ce puits, actuellement au temple d’An Duong Vuong à Cô Loa, à 18 km de Hanoï, deviennent plus brillantes.

Rappelons encore, au sujet des perles, un souvenir de sinistre mémoire. Pendant la dure domination chinoise de mille ans (179 av. J.-C. - 938 AD), les gouverneurs célestes causaient la mort de beaucoup de Vietnamiens en les obligeant à payer comme tribut en nature des perles d’huître cachées au fond de la mer.

Le Vietnam, ce pays de perles rares

Aujourd’hui, les Vietnamiens élèvent les huîtres perlières et vendent des perles à leur propre compte. Depuis une dizaine d’années, cette activité économique a pris un véritable essor dans le sillage de la politique de Renouveau.

J’en ai été témoin aux îles de Vân Dôn dans la baie de Ha Long, Côn Dao (Poulo Condor) et Phú Quôc. À Côn Dao, j’ai rencontré l’Australien J. Lee, marié à une Vietnamienne, qui m’a montré avec fierté des perles noires, jaunes et roses de sa production. Il escomptait exporter 80% de ses perles et écouler le reste au Vietnam. La demande de perles est en hausse sur le marché mondial. Kichinosuke Hiraga, expert japonais en perles, estime que les perles vietnamiennes comptent parmi les meilleures en qualité dans le monde.

Dans notre pays, les bijoux en pierre précieuse remontent à une date lointaine. En mars-avril 2003, des fouilles archéologiques dans la province de Quang Nam ont révélé 3.000 pièces de pierre précieuse qui, selon l’archéologue allemand Andreas Reinecke, relèvent de la culture de Sa Huynh d’il y a 2.000 ans. Foo Check Teck, de Singapour, au cours de sa visite au Vietnam, a été fasciné par le très rare saphir rose. Le saphir et le rubis constituent d’abondantes réserves minérales au Vietnam, estimées à deux milliards de carats. Les mines de Tân Hung (Yên Bái) et Quy Châu (Nghê An) contiennent le plus de rubis de haute qualité. En avril 1997, on a trouvé à Tân Hung un rubis de 3 kg.

Dans la tradition culturelle vietnamienne, les pierres précieuses évoquent non seulement la beauté en général, mais encore la beauté féminine, la pureté de l’âme, la vertu et le savoir, ce que l’on ne peut représenter. J’ai reçu comme nom Ngoc (pierre précieuse) parce que mon père, un lettré de l’ancienne école, souhaitait que j’acquière la sagesse à travers les livres. Il avait tiré le mot ngoc d’une phrase d’un classique confucéen : "Dans les livres, il y a des femmes belles comme des pierres précieuses". Dans le chef-d’œuvre de notre littérature nationale du XVIIIe siècle, le Kiêu (Kim Vân Kiêu ou L’histoire de Kiêu) du poète Nguyên Du, le mot ngoc est employé 29 fois, pour parler de beauté et de pureté.

Huu Ngoc/CVN
(Février 2005)

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