>>Washington condamne les arrestations en Iran
>>L'Irak lance la dernière grande bataille contre l'EI
La police a dispersé samedi 30 décembre à Téhéran des jeunes qui protestaient contre le pouvoir, malgré la mise en garde du gouvernement contre les "rassemblements illégaux", au troisième jour du mouvement. Dans la nuit, l'AFP a constaté que l'internet avait été coupé sur les téléphones portables, sur lesquels des millions d'Iraniens consultent l'internet. L'accès à l'internet a été rétabli quelques heures plus tard.
Samedi à la mi-journée, des dizaines d'étudiants se sont rassemblés devant l'entrée principale de l'université de Téhéran pour protester contre le pouvoir, mais les forces de l'ordre les ont dispersés avec du gaz lacrymogène. Plus tard, des centaines d'étudiants favorables au pouvoir ont pris le contrôle de l'entrée de l'université en scandant "Mort aux séditieux", selon des vidéos publiées sur les réseaux sociaux.
En fin d'après-midi, des centaines de personnes ont manifesté ailleurs dans le quartier de l'université, scandant des slogans hostiles au pouvoir. Elles ont également été dispersées par la police anti-émeutes. L'agence Mehr, proche des conservateurs, a mis en ligne sur la messagerie cryptée Telegram, suivie par près de 25 millions d'Iraniens, des vidéos montrant des manifestants en train d'attaquer la mairie du deuxième arrondissement de Téhéran et de renverser une voiture de police.
Des manifestants iraniens lors d'un rassemblement à Téhéran, le 30 décembre 2017. |
"Fauteurs de troubles"
D'autres médias ont fait état de destructions dans la capitale, dénonçant des "fauteurs de troubles". Des vidéos diffusées sur Telegram par des chaînes basées à l'étranger et liées à l'opposition montrent des milliers de manifestants criant notamment "Mort au dictateur". Selon ces vidéos, les protestations ont eu lieu notamment dans les villes de Khorramabad, Zanjan et Ahvaz, dans l'ouest de l'Iran.
D'après ces sources, plusieurs personnes auraient été tuées par balles dans la province de Lorestan, dans l'ouest, au cours d'affrontements avec la police. Ces informations étaient invérifiables dans l'immédiat. Sur Twitter, le ministre des Télécommunications, Mohammad-Javad Jahromi, a accusé Telegram d'encourager le "soulèvement armé".
Le ministre de l'Intérieur Abdolreza Rahmani Fazli a demandé à la population de ne pas participer aux "rassemblements illégaux". Et plusieurs responsables ont laissé entendre que les manifestations étaient organisées depuis l'étranger. "L'ennemi veut une fois de plus créer un nouveau complot et utiliser les réseaux sociaux et les problèmes économiques pour fomenter une nouvelle sédition", a déclaré un religieux influent, l'ayatollah Mohsen Araki, cité par l'agence Fars, de tendance conservatrice.
Massoumeh Ebtekar, vice-présidente iranienne chargée des Affaires féminines, a averti les manifestants sur Twitter. "Bien que les gens aient le droit de protester, les protestataires doivent savoir comment ils sont dirigés", a-t-elle écrit. Elle a posté à l'appui de ses propos des images provenant de comptes Twitter basés aux États-Unis et en Arabie saoudite et soutenant les manifestations en Iran.
Face aux difficultés économiques du pays, isolé et soumis pendant des années à des sanctions internationales pour ses activités nucléaires sensibles, des protestations ont eu lieu jeudi et vendredi dans plusieurs villes de province dont Machhad, deuxième ville d'Iran.
Le nombre des manifestants était limité initialement à quelques centaines, mais c'est la première fois qu'autant de villes sont touchées par un tel mouvement depuis 2009, lorsqu'un mouvement de contestation contre la réélection du président ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad avait été violemment réprimé. Le pouvoir a d'ailleurs mobilisé samedi des dizaines de milliers de personnes à travers l'Iran pour marquer l'anniversaire du grand rassemblement prorégime qui avait sonné en 2009 la fin de ce mouvement.
Pour la première fois, la télévision d'État a diffusé des images des manifestations. Elle a déclaré qu'il était nécessaire d'entendre "les revendications légitimes" de la population. Mais elle a aussi dénoncé les médias et les groupes "contre-révolutionnaires" à l'étranger qui cherchent selon elle à exploiter ces rassemblements. Des dizaines de personnes ont été arrêtées depuis jeudi mais la plupart ont été libérées, selon la télévision.
AFP/VNA/CVN