Grèce, paradis des abeilles

Dans la colline odorante, quelques virages serrés sur des chemins de terre, et la vieille voiture de Nicos arrive au paradis des abeilles : une prairie tapissée de muscaris violets, tout près des ruines antiques de Mycènes.

Depuis les temps mythologiques, lorsque le dieu de l'Amour, Eros, trempait ses flèches dans le miel avant de les décocher, le liquide doré et aromatique coule à flot en Grèce, un pays sans culture OGM et aux vastes étendues sauvages non cultivées industriellement.
La Grèce fait face à beaucoup de crises, mais pas celle qui décime les populations d'abeilles dans la plupart des pays industrialisés. La raison en est que les apiculteurs parviennent à rester à l'écart des exploitations agricoles et donc des pesticides, mis en cause dans la disparition des abeilles.

La Grèce compte 20.000 apiculteurs.


Environ 30% seulement du territoire est dédié à l'agriculture, le reste est sauvage. Plus de 80% du miel grec est produit à partir de pollens venant de zones forestières ou de plantes sauvages, selon l'association des apiculteurs grecs Omse.
La mort des essaims "est un problème aux États-Unis, dans plusieurs pays européens, dont l'Allemagne et l'Espagne. Nous n'avons pas encore ce problème en Grèce", confirme Paschalis Harizanis, qui dirige le département apiculture de l'Université d'agronomie d'Athènes.
Nicos Reppas, 46 ans, apiculteur à Nauplie dans le Péloponnèse, échappe, plus que ses voisins européens, à ce mal mystérieux qui suscite les plus vives inquiétudes de la communauté scientifique mondiale. La disparition de l'insecte qui joue un rôle fondamental dans la pollinisation, menace l'avenir de l'agriculture et l'équilibre écologique.
Alors qu'en France par exemple, la dernière récolte en 2012, a été jugée "catastrophique" par l'Union nationale de l'apiculture française (UNAF), qui se désole face à un taux de mortalité des abeilles de 30% aujourd'hui, au lieu de 5% dans les années 90, l'apiculteur grec, lui, est encore un homme heureux.
"J'adore ça. Il n'y a pas de moyen de faire cette profession, si vous ne l'aimez pas. Mon père a près de 78 ans, et il continue de travailler. Apiculteur, c'est à vie. Vous naissez apiculteur et vous mourrez apiculteur" dit Nicos, dont la famille élève des abeilles depuis deux siècles. Mais, isolé dans son splendide écrin balkanique et égéen, le pays est-il conscient des dangers qui pèsent sur l'avenir de la pollinisation si les abeilles continuent de mourir par millions ?
Athènes s'est opposée en mars à l'interdiction pour deux ans des pesticides jugés nocifs pour les abeilles (néonocotinoïdes), souhaitée par la Commission européenne. 13 voix pour, 9 contre : l'Union européenne n'est pas parvenue à interdire ces substances chimiques. "Ce vote n'est pas dans l'intérêt de l'agriculture grecque" s'étrangle Elena Danali du mouvement écologiste Greenpeace. "La Grèce, étant un produit producteur de miel, devrait forcément voter pour l'interdiction".
La Fédération de l'apiculture grecque est d'autant plus "déçue" que le gouvernement grec ne se prive pas de vanter à l'étranger la qualité de ses produits agricoles, dont le miel. Elle dit avoir "intensifié ses efforts pour tenter de faire changer la position du gouvernement" avant un nouveau vote qui pourrait intervenir avant l'été.
Pas de crise pour apiculture
Pour Nicos Reppas, la vie se décline au rythme de l'éclosion des fleurs : "En février, on a les fleurs de romarin, en mars, viennent les sauges, puis les fleurs d'oranger, le pollen de pin, les fleurs de thym en juin, celles de châtaigniers et de chêne en juillet, les bruyères en septembre, et les caroubiers en octobre". Il se méfie des orangeraies, malgré le parfum enivrant de leurs fleurs. "Je n'approche jamais les ruches, trop de pesticides".

Envion 80% du miel grec est produit à partir de pollens venant de zones forestières ou de plantes sauvages.


La Grèce aurait tout intérêt à défendre son apiculture. Dans ce pays de 10 millions d'habitants, qui compte 20.000 apiculteurs, on dénombre l'une des plus hautes concentrations de ruches au kilomètre carré, selon le professeur Harizanis.
Et le pays produit entre 12 et 17.000 tonnes de miel par an, ce qui le place en 2e position en Europe, juste derrière l'Espagne, beaucoup plus grande. Côté commercial, pour que le miel figure au nombre des débouchés à l'exportation, dont la Grèce a désespérément besoin pour sortir de sa crise économique, des efforts restent à faire.
Malgré sa forte production, la Grèce a en effet importé l'an dernier plus de miel qu'elle n'en a exporté (2.000/800 tonnes). La raison ? Les Grecs en sont gourmands. Selon le professeur Harizanis, ils sont les premiers consommateurs de miel du monde, avec 1,7 kg par personne et par an contre 0,4 kg aux États-Unis.

AFP/VNA/CVN

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