"Gilets jaunes": mobilisation en recul, à nouveau des incidents

Les "gilets jaunes" ont montré samedi 26 janvier leur ténacité face à un exécutif qui regagne en popularité, manifestant par milliers dans de nombreuses villes de France pour leur acte 11, marqué par une mobilisation en léger recul et émaillée à nouveau d'incidents.

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Manifestation de "gilets jaunes" à Paris, le 26 janvier.
Photo: AFP/VNA/CVN

Le ministère de l'Intérieur a dénombré 69.000 "gilets jaunes" dans toute la France pour leur onzième samedi consécutif de manifestation, en baisse par rapport aux 84.000 manifestants recensés la semaine dernière, le seul comptage disponible, contesté acte après acte par les manifestants.

À Paris, où Jérôme Rodrigues, une figure connue du mouvement, a été blessé à l'œil alors qu'il filmait un regroupement de divers cortèges place de la Bastille, les autorités ont comptabilisé 4.000 manifestants, contre 7.000 le 19 janvier.

La préfecture de police, qui n'a pas souhaité confirmer l'identité du blessé, évacué par les pompiers et hospitalisé, a annoncé sur Twitter avoir saisi l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) "afin que soient établies les circonstances dans lesquelles cette blessure est intervenue".

Il a été "lâchement touché à l'œil droit par un projectile des forces de l'ordre (...), semble-t-il une grenade", a dénoncé le collectif "La France en colère !!!", qui demande une "sanction pénale lourde". Cette blessure intervient le jour où, face à la polémique sur les lésions graves causées par les Lanceurs de balles de défense (LBD), le ministre avait décidé d'équiper pour la première fois de caméras-piétons les forces de l'ordre dotées de ces armes.

Autre figure nationale du mouvement des "gilets jaunes", Maxime Nicolle a été brièvement interpellé en début de soirée dans le centre de Bordeaux où 200 personnes s'étaient rassemblées pour mener une action nocturne.

Des heurts éclatés à différentes localités

"Anti flashball", "Stop le bla bla du grand débat", "Le grand débat est ici", "Frexit", "Boxons Macron", proclamaient pancartes et banderoles de Brest à Lille, en passant par Toulouse et Nantes, où partout les manifestants scandaient le désormais habituel "Macron démission".

Ils étaient aussi nombreux dans les cortèges à dénoncer la "grande mascarade" du débat national lancé il y a dix jours par le gouvernement et à réclamer un référendum d'initiative citoyenne (RIC), une revendication qui "hérisse" le Premier ministre Edouard Philippe.

"Il faut d'abord qu'on obtienne le RIC. Mais il n'y a pas que ça, les gilets jaunes, c'est 42 propositions sur la fiscalité, le pouvoir d'achat, les services publics... Faire la grève générale coûtera trop cher aux gens, la solution c'est de continuer à manifester pour créer un climat de prise de conscience dans le pays, que l'on remette les droits humains au centre, avant les droits politiques", lance Eric, 45 ans, dans l'un des cortèges parisiens.

Les forces de l'ordre dispersent une manifestation de "gilets jaunes" à Bordeaux, le 26 janvier.
Photo: AFP/VNA/CVN

À Quimper, Patty, une fonctionnaire de 54 ans explique être "avec les +gilets jaunes+ depuis le 17 novembre parce j'en ai assez de toutes ces taxes". "Il faut baisser les taxes sur les produits de première nécessité et augmenter les taxes sur les produits de luxe", ajoute-t-elle.

Valentin Wimmer, un mécanicien retraité de Molsheim (Bas-Rhin) venu manifester devant le Parlement européen à Strasbourg pour faire "barrage à Macron", estime avec regret que "le mouvement commence à s'effriter".

La mobilisation restait soutenue dans plusieurs grandes villes de province, notamment Toulouse et Bordeaux, deux bastions de la contestation. Dans ces deux villes, les défilés de plusieurs milliers de "gilets jaunes" ont été émaillés de heurts ou d'"accrochages" avec les forces de l'ordre, qui ont procédé à des interpellations.

Des heurts ont également éclaté à Dijon, Montpellier, Avignon, Nantes ou Evreux, où deux véhicules ont été incendiés et des dégradations commises devant le siège de la Banque de France, selon la préfecture.

Le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner a "condamné" dans un tweet "les violences et dégradations commises" selon lui par "des casseurs déguisés en gilets jaunes".

Courte "nuit jaune"

À l'heure où l'exécutif remonte dans les sondages, que les rangs des contestataires sont gagnés par de querelles internes et que l'annonce d'une liste "Rassemblement d'initiative citoyenne" aux européennes de mai sème la division, le défi des "gilets jaunes" était de rester visibles et audibles dans la rue.

Certains avaient appelé à de nouvelles formes de mobilisation, en organisant une "Nuit jaune", en référence aux rassemblements citoyens de "Nuit debout" de 2016.

Mais à Paris, cette première nocturne a été vite écourtée place de la République, où plusieurs centaines de personnes s'étaient regroupées après avoir été évacuées de la place de la Bastille, dans l'optique d'y créer un "rond-point" géant.

L'ambiance de kermesse, avec merguez, fanfare et discussions sous la pluie, n'aura duré que peu de temps, la place ayant été rapidement évacuée en partie par les forces de l'ordre, à coups de gaz lacrymogène, canon à eau et grenades de désencerclement.

Des "gilets jaunes", dont l'une de ses figures Eric Drouet, ont également appelé à une "grève générale" le 5 février avec la CGT et le NPA, soutenue par le leader de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon.

Cette "convergence" des mouvements sociaux s'est retrouvée à Marseille, où pour la première fois des militants de la CGT ont défilé avec des "gilets jaunes".

Au lendemain de l'acte 11, ce sont des "foulards rouges" qui défileront cette fois dimanche 27 janvier à Paris, lors d'une "marche républicaine des libertés" pour faire entendre "la majorité silencieuse" et défendre "la démocratie et les institutions".

AFP/VNA/CVN

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