>>Le Black Friday, ces soldes à l'américaine, peine à s'imposer en France
>>Début d'un “Mois des soldes de Hanoï”
Des vêtements à prix réduits, le 2 janvier dans un magasin à Talange. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
"Je ne comprends pas, c'est déjà les soldes ou pas ?", demandent, interloquées face à une affiche annonçant jusqu'à -40% de réduction, plusieurs clientes à une vendeuse de l'enseigne Camaïeu rue de Caumartin.
Depuis lundi 2 janvier, les panneaux de réductions se multiplient dans cette rue commerçante de la capitale : "-50% à partir de trois articles achetés" chez Promod, "-20% sur le maquillage" chez Monoprix.
À l'exception de certains départements frontaliers, les soldes ne débutent pourtant officiellement en France que le 11 janvier au matin.
Mais depuis quelques années déjà, les commerçants n'attendent plus la date officielle pour allécher des consommateurs au budget contraint, et déjà assaillis de réductions à longueur d'année sur internet ou via les cartes de fidélité.
Lors des soldes d'été 2016, environ 50% des commerçants parisiens ont déclaré avoir pratiqué des réductions avant les soldes, selon des données transmises par la Chambre de commerce et d'industrie de Paris.
Autrefois annoncées par mails et SMS, ces bonnes affaires s'affichent désormais en gros sur les vitrines.
"Depuis quelques années, on assiste à une sorte de surenchère, sur le montant des rabais, mais aussi sur la date du lancement des baisses" qui commencent de plus en plus tôt, note François-Marie Grau, délégué général de la Fédération française du prêt-à-porter féminin (FFPAPF).
Cette année, Promod a ainsi dégainé ses baisses de prix dès le lendemain de Noël. Même chose aux Galeries Lafayette, où "des avant-premières" sont proposées aux porteurs de carte de fidélité depuis le 26 décembre.
Cannibalisation des soldes
Pour respecter le texte de la loi, le mot "soldes" n'apparait nul part, remplacé par les termes "offres exclusives" et autres "ventes privilèges".
Préparatifs des soldes, le 2 janvier dans une boutique de vêtements à Talange |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Pourtant dans les faits, cela prête à confusion. Outre les baisses de prix, la présentation des magasins prend des allures de soldes : les vêtements sont rangés par catégories et par couleur comme un premier jour de soldes.
"C'est vrai que les réductions sont arrivées un peu plus tôt cette année, car les soldes tombent plus tard (le 11 janvier au lieu du 6 l'an dernier, ndlr). Et comme la nouvelle collection est arrivée, il faut faire de la place", explique une vendeuse.
Pour certains consommateurs, ces soldes avant les soldes sont une bonne nouvelle. "Beaucoup de gens ne savent pas que les rabais ont commencé, ça permet de faire ses courses plus tranquillement. Et toutes les tailles sont encore disponibles", remarque Sylvie, venue chez Camaieu.
Mais pour les commerçants, c'est aussi un pari risqué. "Quand arrivent les soldes, les clientes ont déjà dépensé leur budget habillement, il faut bien reconnaitre qu'on récolte ce qu'on sème, on a tué les soldes avec toutes ces promotions, on ne peut s'en prendre qu'à nous-mêmes", expliquait en juillet à la CCI une commerçante parisienne.
Pour la FFPAPF, l'avis est plus nuancé. "C'est vrai que la multiplication des promotions a relativisé l'importance des soldes aux yeux de certains consommateurs", dit M. Grau.
"Mais dans le même temps, la date de l'ouverture des soldes reste un moment fort pour beaucoup d'entre eux, qui l'assimilent à un moment où on se font les meilleures affaires", le seul où les commerçants peuvent revendre à perte, explique-t-il.
"Preuve que les soldes ont encore un petit effet magique malgré les promotions : chaque année, on constate que des marques qui ne font pas de soldes, comme celles du luxe par exemple, réalisent pourtant des chiffres d'affaires plus importants pendant la période. Signe que les soldes mettent encore dans de bonnes dispositions pour consommer", ajoute-t-il.