Fernando Botero, l'art de la générosité

Célèbre pour ses personnages aux formes voluptueuses, le peintre et sculpteur colombien Fernando Botero, décédé vendredi 15 septembre à 91 ans, a mis en pratique l'art de la générosité, tant dans ses œuvres qu'en militant pour une culture accessible à tous.

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Fernando Botero devant une œuvre de la série "Via Crucis" lors d'une conférence de presse au Musée d'Antioquia à Medellin, en avril 2012. 
Photo : AFP/VNA/CVN

"Je pense souvent à la mort et cela m'attriste de quitter ce monde et de ne plus pouvoir travailler parce que je prends beaucoup de plaisir à mon travail", avait confié le "maestro" lors d'un entretien à l'occasion de ses 80 ans en 2012.

Né le 19 avril 1932 à Medellin (Nord-Ouest), deuxième ville de Colombie enclavée dans les Andes, ce fils d'un représentant de commerce s'initie très tôt à l'art. À l'âge de 15 ans, Fernando Botero vendait déjà ses dessins de tauromachie aux portes des arènes de Bogota.

"Métier exotique"

"Quand j'ai débuté, c'était un métier exotique en Colombie, qui n'était pas bien vu et n'offrait aucun avenir. Lorsque j'ai dit à ma famille que je comptais me dédier à la peinture, ils m'ont répondu : +Bon d'accord, mais nous ne pouvons pas t'aider+", racontait l'artiste colombien le plus coté au monde.

Après une première exposition individuelle à Bogota dans les années 1950, il part pour l'Europe, séjournant en Espagne, France et Italie où il découvre l'art classique. Son œuvre est aussi influencée par l'art précolombien et les fresques du Mexique, où il s'installera plus tard.

Sa carrière décolle dans les années 1970 lorsqu'il rencontre le directeur du musée allemand de New York, Dietrich Malov, avec lequel il organisera plusieurs expositions à succès. "Totalement inconnu, sans même un contrat avec une galerie de New York, j'ai alors commencé à être contacté par les plus grands marchands d'art du monde", racontait-il.

Les dimensions hors du commun de son art, qui deviendront sa marque de fabrique, se révèlent en 1957 dans le tableau Nature morte avec mandoline. Il peint alors l'ouïe centrale (ouverture) de la mandoline trop petite, en comparaison avec la taille de l'instrument.

Sophia Vari Botero et son mari Fernando Botero lors d'une exposition de l'artiste grèque à Rome, le 6 juillet 2004. 
Photo : AFP/VNA/CVN

Ainsi "entre le petit détail et la générosité du tracé extérieur, une nouvelle dimension apparaît, plus volumétrique, plus monumentale, plus extravagante", expliquait-il.

Mona Lisa à l'âge de douze ans, peint en 1959, était une autre de ses œuvres majeures exposée au Museum of Modern Art de New York.

Pour l'artiste, le qualificatif de "gros" ne convenait pas à ses personnages. Amoureux de la Renaissance italienne, il se disait "défenseur du volume" en art moderne. Sa sculpture, également marquée par le gigantisme, a occupé une place très importante dans sa carrière, développée essentiellement à Pietrasanta, en Italie.

Il a partagé pendant des années sa vie entre ce coin de Toscane, New York, Medellin et Monaco où il est décédé. Malade dans les dernières années de sa vie, "il a continué à peindre jusqu'à la fin", a confié sa fille Lina.

Art pour tous

Fernando Botero devant une des 30 œuvres exposées sur les Champs Élysées à Paris, le 16 octobre 1992. 
Photo : AFP/VNA/CVN

L'artiste, qui disait ne jamais savoir ce qu'il allait peindre le lendemain, s'est inspiré de la beauté, mais aussi des tourments de son pays, marqué par un conflit armé de plus d'un demi-siècle. Son oeuvre met en scène guérillas, séismes, maisons de passe.

À travers les époques, son art a fait la satire de l'Église catholique dans les années 1950-60, s'est moqué de l'aristocratie colombienne et des dictateurs en Amérique latine dans les années 1970-80, et a dénoncé les guérillas, paramilitaires et trafiquants de drogue en Colombie dans les années 1990.

L'artiste a aussi été un grand mécène, avec des donations estimées à plus de 200 millions de dollars. Il a donné aux musées de Medellin et de Bogota nombre de ses oeuvres, et des dizaines de tableaux de sa collection privée, dont des Picasso, Monet, Renoir, Miro...

Ses œuvres sont aussi visibles en plein air dans de nombreuses villes du monde, l'artiste estimant que les expositions dans les espaces publics sont un "rapprochement révolutionnaire" de l'art avec le public.

Une idée qu'il avait étrennée en 1992 sur les Champs-Élysées à Paris, puis près du Grand canal de Venise et face aux pyramides d'Égypte. Ses statues ont aussi voyagé jusqu'en Chine en 2015.

Marié trois fois, la dernière à la sculptrice grecque Sophia Vari décédée en mai, le "maestro" a énormément souffert de la mort de l'un de ses enfants, à l'âge de quatre ans, dans un accident de voiture.

Son oeuvre, de plus de 3.000 tableaux et 300 sculptures, démontre son insatiable appétit de créer. La seule idée d'abandonner les pinceaux "me terrorise plus que la mort", disait-il.

AFP/VNA/CVN

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