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Un employé s'affaire sur un chantier de démolition à Seville (Espagne), le 19 juillet, où la chaleur est très étouffante. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Des ouvriers du BTP s'affairant sur du bitume brûlant, des saisonniers suant à grosses gouttes sous des serres agricoles, des livreurs à vélo exposés au soleil toute la journée... Difficile à supporter pour l'ensemble des habitants, la canicule est devenue insoutenable pour certains secteurs d'activité, marqués par plusieurs drames ces derniers jours.
En Espagne, un ouvrier de 56 ans est ainsi décédé après avoir été victime d'un "coup de chaleur" dans un entrepôt de la banlieue de Madrid où il travaillait. Selon les services de secours, sa température corporelle était de 42,9 degrés lorsqu'il a été pris en charge, "inconscient" et secoué de "convulsions".
Dans la capitale espagnole également, un homme de 60 ans, embauché pour un mois par une entreprise chargée de l'entretien de la voirie, est mort après avoir fait un arrêt cardiaque en plein travail. Un second agent d'entretien, âgé de 58 ans, a été hospitalisé après un malaise.
En France, deux personnes ont succombé ces derniers jours à leur travail dans le cadre d'accidents "en lien possible" avec la canicule, l'un en Occitanie (Sud-Ouest) et l'autre en Bretagne (Ouest), ont indiqué les autorités sanitaires mercredi 20 juillet.
Et début juillet, deux travailleurs agricoles âgés de 20 ans et 57 ans étaient déjà décédés en Italie, alors qu'ils travaillaient sous des températures supérieures à 40 degrés, l'un en Campanie (Sud), l'autre en Calabre (Sud), selon des médias locaux.
Un double décès qui a relancé le débat, dans ce pays, sur l'impact des canicules, un an après la mort d'un saisonnier malien de 27 ans, qui avait poussé plusieurs régions à interdire le travail agricole durant les heures les plus chaudes.
"Température limite"
Dans les rues de Madrid, le décès des travailleurs victimes de coups de chaleur a suscité l'inquiétude. "Ça fait peur", a témoigné auprès de l'AFP Javier Herreros, ouvrier du BTP de 52 ans, occupé à remplacer des pavés sur la chaussée dans une épaisse combinaison jaune fluo.
Les derniers jours, confie-t-il, ont été "très difficiles". "Je n'ai pas de problèmes de santé mais comme je travaille toute la journée au soleil, je me fatigue beaucoup", explique-t-il.
Un employé s'affaire dans une station service à Seville, le 19 juillet où la température a dépassé les 40 degrés. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Dans un communiqué commun, les deux principaux syndicats espagnols, l'UGT et CCOO, ont également fait part de leur émotion. De tels drames "ne devraient jamais se produire", ont-ils estimé, en appelant à "réduire le temps et l'exposition" des salariés aux hautes températures.
Ces derniers jours, les autorités ont multiplié les messages de prévention, appelant les salariés pouvant le faire à télétravailler et les autres à se préserver, notamment au Royaume-Uni et en France.
Mais aux yeux des syndicats, ces mises en garde ne sont pas suffisantes et doivent s'accompagner de mesures concrètes pour protéger les salariés, alors que la fréquence des vagues de chaleur devrait doubler en Europe d'ici 2050 sous l'effet du réchauffement climatique.
"L'Europe a besoin de températures maximales de travail", a ainsi estimé sur Twitter la Confédération européenne des syndicats (CES).
Un message relayé au Royaume-Uni par la fédération syndicale TUC, qui a demandé au gouvernement de fixer "une température limite" intérieure de 30°C au-delà de laquelle les salariés devraient cesser le travail.
"Risque professionnel"
Pour CCOO, d'autres mesures sont nécessaires pour réduire les risques, comme l'instauration de pauses allongées et de sessions de formation à destination des employeurs. Il faut aussi "identifier tous les postes" les plus exposés "aux fortes chaleur", insiste le syndicat.
Une approche également défendue par l'Institut syndical européen (Etui), un centre de recherche basé à Bruxelles, qui a appelé dans un rapport à considérer comme un "risque professionnel" à part entière "le stress thermique lié aux conditions météorologiques".
"À l'heure actuelle, de nombreux travailleurs souffrent de l'inaction des employeurs, tandis que les autorités ont tendance à fermer les yeux", avec de lourdes conséquences pour les "travailleurs en situation précaire", en première ligne face au problème, a regretté ce think-tank.
Signe d'un début de prise de conscience toutefois : après la mort de leur collègue, les agents de voirie de Madrid ont obtenu mardi soir 19 juillet la suppression du travail l'après-midi, lors des heures les plus chaudes.