Grèce
Des milliers de migrants sans abri après un énorme incendie dans le camp de Lesbos

Des milliers de migrants se retrouvent mercredi 9 septembre sans abri sur l'île de Lesbos après l'énorme incendie qui a ravagé au petit matin Moria, le plus grand et sordide camp de réfugiés de Grèce, où un autre feu s'est déclaré en soirée.

>>Un énorme incendie ravage le plus grand camp de réfugiés à Lesbos

Des migrants dans le camp en feu de Moria, sur l'île grecque de Lesbos, le 9 septembre.

Selon le ministre des Migrations, Notis Mitarachi, des demandeurs d'asile qui protestaient contre la quarantaine imposée après la détection de cas de COVID-19 sont à l'origine du sinistre, qui n'a pas fait de victime. La Protection civile grecque a déclaré "l'état d'urgence" à Lesbos, île de la mer Egée forte de 85.000 habitants et principale porte d'entrée des migrants en Grèce en raison de sa proximité avec la Turquie.

"Au moins 3.500 migrants sont sans abri (...) et nous prenons des mesures d'urgence pour ces personnes : les plus vulnérables, environ 1.000, seront hébergés sur un ferry qui va arriver mercredi soir 9 septembre au port de Mytilène", chef-lieu de l'île, a annoncé le ministre des Migrations, Notis Mitarachi. Deux bâtiments de la marine grecque se rendront jeudi 10 septemnre à Mytilène pour héberger d'autres migrants et des tentes vont être installées.

La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a fait part de sa "profonde tristesse", soulignant que l'UE se tenait "prête à aider". D'ores et déjà, la Commission européenne a annoncé qu'elle prenait en charge le transfert immédiat vers la Grèce continentale de 400 enfants et adolescents. "Aucune victime, ni blessé, ni disparu n'a été signalé", a encore souligné le ministre des Migrations, qui a salué "l'intervention rapide" des pompiers et des policiers"

Des milliers d'hommes, femmes et enfants sont sortis paniqués dans la nuit des tentes et des conteneurs, certains se réfugiant dans les champs d'oliviers environnants. Mercredi après-midi 9 septembre, la majorité d'entre eux se sont retrouvés assis au bord de la route reliant le camp au port de Mytilène, formant de longues files d'attente de trois kilomètres, a constaté une journaliste de l'AFP.

"Où aller?"

"Qu'est-ce qu'on va faire maintenant ? Où on peut aller ?", demande Mahmout, originaire d'Afghanistan. À côté de lui, sa compatriote Aisha cherche ses enfants : "Deux de mes enfants sont là, mais je ne sais pas où sont les autres". Cornille Ndama, Congolais, a aussi fui Moria dans la nuit. "Nous avons tout perdu. Comme vous me voyez, je suis laissé comme ça. Je n'ai rien, rien avec moi et pourtant nous ne savons pas où nous allons dormir".

Le camp hébergeait quelque 12.700 demandeurs d'asile, soit quatre fois sa capacité d'accueil, dont 4.000 enfants. "Aucune victime, ni blessé, ni disparu n'a été signalé", a encore souligné le ministre des Migrations, qui a salué "l'intervention rapide" des pompiers et des policiers". Mercredi soir 9 septembre, un nouvel incendie s'est déclaré dans une partie du camp qui avait été relativement épargnée, entraînant les mêmes scènes de chaos : des familles de migrants paniquées fuyant le feu qui consumait leurs tentes. "Moria finished" ("Moria c'est fini" ndrl), criaient des migrants. Cet "incendie est plus limité que celui de mardi soir 8 septembre", a précisé un responsable des pompiers.

Contre la quarantaine

Selon Notis Mitarachi, des demandeurs d'asile sont à l'origine de l'incendie. "Les incidents à Moria ont éclaté quand des demandeurs d'asile ont protesté contre la quarantaine", a-t-il déclaré, précisant que de "nombreux foyers" se sont déclarés dans le camp dans la nuit. Peu avant, le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis, qui a exprimé "sa tristesse", avait attribué l'origine du désastre à "des réactions violentes contre les contrôles sanitaires" effectués depuis la semaine dernière après la détection de 35 cas de COVID-19 dans le camp.

"Je reconnais les conditions difficiles (à Moria) mais rien ne peut servir d'alibi pour des réactions violentes contre les contrôles sanitaires", et "surtout pour des troubles de cette envergure", a-t-il déclaré. Le premier cas de coronavirus avait été détecté à Moria la semaine dernière et le camp a été immédiatement placé à l'isolement pour quinze jours. La partie principale du centre d'enregistrement d'identification a été complètement détruite, selon Notis Mitarachi.

Outre cette partie principale du camp abritant près de 4.000 personnes ainsi que les locaux administratifs et d'asile, le camp de Moria s'étendait dans les oliveraies avoisinantes, où habitaient près de 8.000 personnes dans des tentes, qui ont subi également de nombreux dégâts. L'Allemagne, qui assure la présidence tournante de l'Union européenne, a demandé aux pays de l'UE d'accueillir des migrants du camp. Mais les ONG s'inquiètent de la situation. "De nombreuses personnes sont dispersées à des endroits sur l'île" où les ONG ne peuvent pas avoir accès, explique Giovanna Scaccabarozzi, employée de Médecins sans Frontières (MSF) à Lesbos, qui dit ressentir "détresse et désespoir".

"Personne n'est illégal"

En Allemagne, plusieurs milliers de personnes ont manifesté spontanément dans plusieurs villes pour exiger des autorités de prendre en charge des migrants. "Droit de séjour, partout, personne n'est illégal" ou encore "nous avons de la place" ont scandé des manifestants à Berlin, Hambourg, Hanovre ou encore Münster.

Ces dernières années, le camp de Moria a été décrié pour son manque d'hygiène et son surpeuplement par les ONG qui appellent régulièrement les autorités grecques à transférer les demandeurs d'asile les plus vulnérables vers le continent. La commissaire du Conseil de l'Europe Dunja Mijatovic a critiqué mercredi "le manque de solidarité des pays membres de l'Europe qui sont aussi responsables pour la situation catastrophique" sur l'île.


AFP/VNA/CVN

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