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Manifestant portant un drapeau algérien en guise de masque, pendant les manifestations à Alger contre un nouveau mandat du président Bouteflika, le 1er mars 2019. |
Photo: AFP/VNA/CVN |
À Alger, des affrontements ont opposé, non loin de la présidence, des policiers à des groupes de jeunes leur jetant des pierres, alors que l’essentiel des manifestants s’était dispersé sans incident. Les vitrines de quelques boutiques ont été brisées, une agence bancaire et une voiture incendiées, selon une journaliste de l’AFP.
Les journalistes de l’AFP ont vu une dizaine de blessés, par des coups de matraque, des pierres que renvoyaient les policiers, des éclats de grenade lacrymogènes ou intoxiqués par les gaz. Selon le bilan de la police, 56 policiers et sept manifestants ont été blessés et 45 personnes arrêtées à Alger. Les nombreuses manifestations en province se sont terminées sans incident.
En annonçant le 10 février sa candidature à la présidentielle du 18 avril, M. Bouteflika, au pouvoir depuis 1999 et handicapé par les séquelles d’un accident vasculaire cérébral (AVC) depuis 2013, a déclenché une contestation d’ampleur inédite en 20 ans et le visant directement, du jamais vu.
La mobilisation a été bien supérieure à celle de la semaine passée à Alger, alors que le camp présidentiel a jusqu’à dimanche minuit heure locale (23H00 GMT) pour déposer dans les délais le dossier de candidature de M. Bouteflika devant le Conseil constitutionnel.
Aucun chiffre indépendant concernant la mobilisation n’était disponible, mais des sources sécuritaires ont fait état de "plusieurs dizaines de milliers de personnes" dans la capitale.
Ces sources ont également recensé des manifestations dans près des deux-tiers des wilayas (préfectures) du nord du pays, zone la plus peuplée, sans donner de chiffre de participation.
Manifestations dans plusieurs villes
Brandissant des drapeaux algériens, une foule de dizaines de milliers de manifestants s’est rassemblée en début d’après-midi aux cris de "Pouvoir assassin" sur l’emblématique Place de la Grande-Poste, dans le centre d’Alger.
La foule, hommes et femmes de tous âges, n’a cessé de grossir, à mesure qu’arrivaient des cortèges de divers quartiers de la capitale - Casbah, Bab el-Oued ou 1er-Mai - qui le long du chemin, ont forcé plusieurs cordons de police, vite débordés.
"Pacifique!, pacifique!", scandaient les manifestants que quelques tirs de lacrymogènes, n’ont pas réussi à décourager. "Le peuple veut la chute du régime", "Non au 5e mandat!", "On ne va pas s’arrêter!", a-t-on également entendu.
Aux balcons du centre-ville, des habitants solidaires agitaient des drapeaux algériens, verts et blancs frappés du croissant et de l’étoile rouge.
Une partie des manifestants a ensuite pris le chemin du Palais du gouvernement proche, siège des bureaux du Premier ministre, Ahmed Ouyahia, aux cris de "Ce peuple ne veut pas de Bouteflika!".
À coups de dizaines de grenades lacrymogènes, la police a dispersé le millier de manifestants regroupés devant l’entrée de l’enceinte.
Un autre groupe de milliers de personnes se dirigeant vers la présidence a été bloqué à environ un kilomètre de sa destination par la police, avant de se disperser face aux tirs de grenades lacrymogènes, ne laissant que quelques groupes désireux d’en découdre.
En province, des défilés d’ampleurs diverses ont été recensés à Oran et Constantine, deuxième et troisième villes du pays. Mais aussi dans de nombreuses autres villes, notamment à Blida, Tizi-Ouzou, Béjaïa, Skikda, Annaba, Bouira, M’sila, Sétif, Biskra, Batna, Médéa, Tiaret et Sidi Bel Abbès.
À Oran, un manifestant a indiqué à l’AFP que la mobilisation était supérieure à celle de la semaine précédente. À Annaba, plusieurs milliers de personnes ont défilé dans le calme, selon un journaliste local.
"Éviter tout débordement"
Manifestation à Alger contre un 5e mandat du président Abdelaziz Bouteflika, le 1er mars 2019. |
Photo: AFP/VNA/CVN |
"Nous sommes là pour encadrer la manifestation et éviter tout éventuel débordement", avait indiqué un officier de police.
Les forces de l’ordre ont jusqu’ici largement laissé faire, même à Alger où toute manifestation est interdite depuis 2001, mais le camp présidentiel a fait savoir cette semaine qu’il n’entendait pas reculer face à la rue.
Certains observateurs craignaient que les partisans du chef de l’État n’utilisent la manière forte pour s’éviter une campagne électorale avec le double handicap d’un candidat absent physiquement - M. Bouteflika n’apparaît plus qu’à de rares occasions et ne s’est pas adressé à la nation depuis son AVC - et contesté dans la rue.
La candidature de M. Bouteflika sera déposée le 3 mars, a annoncé son directeur de campagne, Abdelmalek Sellal. "Personne n’a le droit d’empêcher un citoyen algérien de se porter candidat. C’est un droit constitutionnel".
Le retour en Algérie du chef de l’État, hospitalisé depuis dimanche à Genève, officiellement "pour des examens médicaux périodiques", n’a cependant toujours pas été annoncé.
Comme d’autres membres du camp présidentiel, Ahmed Ouyahia a quant à lui, agité le spectre de la sanglante "décennie noire" de guerre civile (1992-2002) en Algérie et du chaos syrien. Les manifestants lui ont répondu en scandant massivement "Ouyahia, l’Algérie c’est pas la Syrie!".
Pour première fois depuis le début du mouvement de contestation, la télévision nationale algérienne a ouvert vendredi 1er mars son journal par des images des manifestations du jour, sans référence au mot d’ordre du refus d’un nouveau mandat du chef de l’État.